L'indispensable Béranger
L'indispensable Béranger
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Toulouse 1er mai 2023 | |
Salut tout le monde,
Je m’appelle Serge et j’ai été gravement blessé, comme beaucoup d’autres, à la manifestation contre la mégabassine de Sainte Soline du 25 mars 2023. J’ai été atteint à la tête par une grenade, probablement tiré en tendu par un gendarme équipé d’un lanceur de grenade cougar. J’ai subi un grave traumatisme crânien qui m’a mis en situation d’urgence absolue, situation aggravée par le blocage de ma prise en charge par les secours durant la manifestation. Après un mois de coma artificiel et six semaines en réanimation, j’ai été transféré dans un service de neurochirurgie, puis en centre de rééducation. A l’heure actuelle, je ressens d’énormes progrès dans ma faculté à bouger, manger et tout simplement échanger et réfléchir. Le chemin va être extrêmement long mais je suis déterminé à tout donner, à me battre pour récupérer ce qui me constituait, tant physiquement que mentalement. Je le fais évidemment pour moi, mais aussi parce que je pense que refuser d’abdiquer, refuser d’être écrasé par la machine répressive est une nécessité politique, à l’heure où les Etats font le pari de la terreur et de notre passivité.
Je tiens d’abord à remercier celles et ceux qui, dans ce champ de mines, m’ont porté, tenu la main, protégé, promulgué les premiers soins (ralentissement de l’hémorragie, massage cardiaque, intubation etc.) et m’ont tout simplement permis de rester en vie. Je tiens également à remercier les soignants qui, à chaque stade, ont pris soin de moi et m’aident encore aujourd’hui à reconquérir mon corps et ma tête. Je ne peux que vous faire part du bien fou que j’ai ressenti à ma sortie du coma devant la solidarité massive qui s’est exprimée : assemblées, textes, tags, dons, musiques, actions et messages divers de camarades de par le monde. L’écho de vos voix et des rugissements de la rue nous a aidé, mes proches et moi, à ne rien lâcher. Pour tout cela, je vous dis à toutes et tous un grand merci. Vous avez été énormes.
Tout ceci nous rappelle qu’il est primordial qu’aucun tabassage, qu’aucune mise en geôle, qu’aucune mutilation, qu’aucun meurtre ne soit passé sous silence par les forces de l’ordre social capitaliste. Ils mutilent et assassinent tellement souvent que cela n’a rien d’accidentel, c’est dans leur fonction. Beaucoup trop d’histoires dans le monde nous rappellent qu’il n’y a pas plus vrai que la formule « ACAB ». Tous les flics sont bien des bâtards. Ils sont et resteront les larbins de la bourgeoisie dont ils protègent les intérêts et assurent, jusqu’à maintenant, la pérennité.
La classe capitaliste a comme seule perspective la dégradation de nos conditions de vie à une large échelle et tous les prolétaires d’ici et d’ailleurs en font actuellement l’amer expérience. Face aux luttes que nous menons pour contrecarrer ce funeste destin, ils ont clairement fait le choix d’augmenter drastiquement la répression, autant par des nouvelles lois répressives que par le fait de donner carte blanche aux forces de l’ordre, comme à Sainte Soline. Nous devons en prendre acte, et porter collectivement l’idée qu’il est hors de question de participer à une lutte sans des protections efficaces et des capacités de résistance. Nous ne sommes pas des martyrs.
Néanmoins, notre force n’a pas grand-chose à voir avec une histoire de champ de bataille. Notre force, c’est notre nombre, notre place dans la société et le monde meilleur auquel nous aspirons. Contre les quelques organisations de dirigeants et de bureaucrates qui souhaiteraient nous ramener à la maison une fois leur place au soleil acquise sur notre dos, il nous faut mille façons de nous organiser à la base par et pour des solidarités concrètes, à destination des camarades du mouvement mais aussi, et peut-être surtout, à toutes celles et ceux qui rejoindront les élans révolutionnaires futurs.
Force aux camarades actuellement dans le viseur des Etats !
Vive la Révolution !
A vite dans les luttes.
Le S
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Ici, même les mémés aiment la castagne |
Toulouse, 23 mars 2023, 6h30 du matin. Des barrages filtrants ou enflammés sont en place aux entrées Sud, Ouest, Nord (à l'est rien de nouveau). Mention spéciale au barrage enflammé sur le périphérique ouest qui provoqua le plus monstrueux embouteillage de l'année.
Le côté rigolard s'exprime dans les chants, les slogans : Il fait beau, il fait chaud, sortez les canons à eau ! Ou on voit des milliers de gens reculer face à une charge en chantant On vous a niqué ! avant de se reformer au cul de la charge. Une rumeur court sur les grévistes d'Enedis ayant coupé le jus sur les quartiers concernés et, de ce fait, les caméras de surveillance. Qu'en est-il vraiment, on va pas tarder à être fixés. À la tombée de la nuit, la ville est illuminée de brasiers. Dans la pénombre d'un éclairage public déficient, entre deux incendies, des jeunes gens dansent au son d'un accordéon sur une place libérée. Bilan de la journée : la peur, cette sainte trouille par laquelle on prétend tenir la foule s'est envolée. On dirait même qu'elle a sauté dans la tranchée d'en face.
Comme un printemps avec un millier de 19 juillet. Esprit du feu, ne nous abandonne jamais !
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Allez gars, plus que 5 ans au taf ! |
* Mais aussi en 1977, 1985, 1987....
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Un public amorphe |
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Belarmino Tomàs | |
Germaine Montéro dans une chanson de Paul Lançois et Paul Arma (1934)
Et pour détendre l'ambiance, Cuenca minera (bassin minier) de Siniestro Total (1993)
Un autre air fort populaire fut Saluez, riches heureux, repris aux ouvriers de Carmaux lors des grèves de 1909 et 1910. Ici chantée par Marie-Aline Lagadic et Klervi Rivière
On retrouve cette histoire dans une chronique d'Aliette de Laleu sur France Musique.
À Bastien R.
In memoriam
Curieusement, il existe plusieurs variants bretons de cet hymne, dont une reprise par Gilles Servat ainsi qu'une autre évoquant une grève d'ouvrières sardinières sur laquelle on reviendra.
On se quitte sur un authentique air d'octobre 1934.
Les armureries sont dévalisées et les vigiles des entreprises minières désarmés. Leur arsenal, ajouté à celui récupéré aux forces de l’ordre, passe aux mains des miliciens. Près de Mieres, à Santullano, les miliciens empêchent les travailleurs de lyncher José Cela, cacique local. Dans bien des bourgs, le peuple prend les mairies d’assaut et brûle les registres de propriété. À Nava, la maison d’un grand propriétaire et le presbytère sont incendiés. Plusieurs moines et prêtres particulièrement détestés sont exécutés par le peuple en armes.
« Les détonations qui se propageaient de village en village et de vallée en vallée étaient le signe que la révolution s’étendait victorieusement dans toutes les Asturies, les enveloppant de son rouge brasier. » (Manuel Villar)
La progression des révolutionnaires est irrésistible : ils fondent sur le dépôt de locomotives de La Argañosa, la caserne de la sécurité publique et la radio. Ils se battent dans le quartier historique autour de la mairie dont ils s’emparent finalement. Les dynamiteurs sont en avant-garde, suivis des fusiliers.
« … parmi les révolutionnaires, une catégorie doit passer à l’histoire de l’insurrection asturienne avec tous les honneurs : les dynamiteurs. Ils formaient l’avant-garde des colonnes insurgées devant lesquelles, juste à les sentir approcher, les forces de la réaction abandonnaient fréquemment leurs postes. Ils étaient vus comme des demi-dieux par le peuple ouvrier et comme des démons échappés du pandémonium par les bourgeois et autres ennemis de la révolution. Ils formaient un petit groupe qui, placé à l’avant des tirailleurs, ouvrait inexorablement la voie. Si quelques portes s’opposaient à l’avancée de la révolution, ils les faisaient voler en éclats, si c’étaient des murs, ils les abattaient, si c’étaient des hommes, ou ils se dispersaient pour laisser le champ libre aux insurgés ou ces derniers n’avaient plus qu’à passer sur leurs cadavres. » (N. Molins i Fábrega)
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La soldatesque tire à Roux |
En 1886, une flambée insurrectionnelle se répand de Liège à Charleroi pendant près d'une semaine, résultat d'une rage confusément accumulée pendant des années. Ce mouvement obtiendra deux réponses . D'une part, une implacable répression étatique (la troupe charge, sabre, tire et tue; les magistrats ont la main lourde). D'autre part, l'encadrement politique et social par le tout jeune Parti Ouvrier Belge (futur Parti Socialiste), fondé l'année précédente.
18 mars 1886, 15e anniversaire de la Commune de Paris. Une poignée
d'anarchistes liégeois décide de commémorer l'événement par un meeting
qui va déborder au-delà de leurs espérances.
Bien sûr, un tract ne produit pas un soulèvement, mais il peut comme ici en exprimer, en clarifier, en attiser les motivations. Les émeutes qui s'étendent pendant près d'une semaine depuis Liège jusqu'au bassin de Charleroi témoignent d'une colère qui grondait souterrainement. Le radicalisme des mots d'ordre, les destructions perpétrées sur l'appareil de production et sur les biens de leurs propriétaires (comme aux verreries Baudoux à Jumet), la violence des affrontements avec les forces de répression sont autant d'indices qui témoignent de la virulence de la flambée insurrectionnelle. Les autorités craignent même que la contagion ne gagne la troupe envoyée rétablir l'ordre. Le danger devenait en effet bien réel et que l'on passe ainsi de l'émeute et de l'insurrection au mouvement révolutionnaire. Cela ne s'est pas produit. L'histoire a des leçons à donner, pas à recevoir.
La répression n'a eu d'égale que la crainte éprouvée par les possédants. Dès le 24 mars, les sanctions pleuvent. presque toutes les peines prononcées atteignent le maximum. (...) Au lendemain des troubles de Liège, l'opinion conservatrice et le gouvernement, d'une seule voix, en avaient attribué la cause à des agitateurs, à un complot de l'étranger. alertées, les chancelleries n'en ont découvert aucune trace, si ce n'est des mouvements analogues en France, en Angleterre ou aux États-Unis d'Amérique (René Van Santbergen, La grève de 1886).
Le retour au travail, la mise au pas des prolétaires sous l'égide de leur représentants politiques ne se fera pas sans heurts. " Le POB voulait faire peur à la bourgeoisie en lui disant: Attention, je vais lâcher les chiens, mais la vraie peur du POB, c'était de devoir vraiment les lâcher " (Robert Devleeshouwer, cité par JP. Schreiber, in La Wallonie née de la Grève?, édition Labor, 1990). Et puisque régulièrement certains amnésiques accusent le Parti socialiste de trahison, voire même de chanter faux l'Internationale, il est bon de rappeler qu'il n'a résolument jamais rien fait d'autre.
Comme cet article est tiré du site des René Binamé on leur laisse le dernier mot avec un tube écrit par un Wallon célèbre suivi d'une chanson ouvrière en dialecte wallon.