En 1969, Pia Colombochanta plusieurs adaptations en français des chansons de Kurt Weill et Bertold Brecht dont bon nombre issues de L'Opéra de quat' sous.
Ce répertoire fut l'objet d'un enregistrement au TNP pour un LP vinyle chez Disc'AZ.
Pourquoi, on y a pensé ? Allez savoir... Peut-être la proximité de certaines échéances électorales où l'obscène dispute au ridicule.
Voyez ce titre qui semble fait pour notre leader maximo.
Et cette immortelle rengaine toute droit tirée du Dreigroschenoper.
Par l'effet d'un manque d'imagination récurrent des médias, voici une chanteuse qui fut un temps pressentie pour prendre la place vacante d'Édith Piaf (décédée en 1963 et dont la grande Damia disait qu'elle lui avait tout piqué).
Mais ses positions très à gauche, une réputation "d'intellectualisme", de "réservée à la rive gauche" et, surtout, une censure fort vigilante firent chuter la Dame dans un certain oubli.
Fille du Nord née Éliane Marie Amélie Pia Colombo à Homblières (1934) et morte à Créteil en 1986, elle fut danseuse, comédienne et hanta les cabarets et meetings communistes.
Laissée à sa grand-mère, elle fut d'abord une grande adepte de l'école buissonnière, à tel point que sa famille considérait miraculeux qu'elle sache lire et écrire.
En 1946, ses parents l'ayant reprise en région parisienne, ils l'amenèrent au Châtelet où elle devint amoureuse de la danse.
Tombée malade à quinze ans, elle en restera très chétive et pourra faire une croix sur sa carrière de danseuse.
Elle tente alors le Cours Simon où elle est encouragée par un jeune professeur, Maurice Fanon, chez qui elle emménage en 1956.
Après divers refus sanglants, elle débute en chanson au cabaret l'Écluse cette année-là.
Elle y chante des chansons de Fanon, avec lequel elle se séparera quelques années après sans que jamais leur amitié ne soit remise en cause et sort ses premiers tours chez Versailles, puis chez Philips.
Au fil des années, elle sortira huit albums en studio, deux en public et treize EPs quatre titres.
Retrouvons-la dans un classique Fanon, l'Écharpe, filmée en 1963
À partir de 1958, elle fait des premières parties de Georges Brassens, se lie d'amitié avec Barbara, chante un débutant nommé Gainsbourg puis connaît la dèche médiatique due à l'irruption des yé-yés.
Se remettant à la vache enragée, elle passera aux Trois Baudets, à la Tête de l'art, à La Colombe et surtout à la Contrescarpe, en doublé avec Francesca Soleville.
Repérée par Roger Planchon, elle alterne scènes de théâtre et quelques brèves apparitions cinématographiques. Elle devient alors une grande interprète de Kurt Weill et Bertold Brecht comme dans ce Tango des matelots
Elle triomphe enfin dans l'opéra brechtien Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny, commentant à son propos "J'y ai tout appris. Avant je ne savais pas ce que c'était que chanter."
En 1967, elle enregistre Rue des Rosiers, de Sylvain Reiner et Maurice Holmès, sur la Rafle du Vel d'Hiv, puis tourne avec Aznavour, Alain Barrière, Marcel Amont....
En mai 1968, avec Jean Ferrat, Maurice Fanon, Francesca Solleville, Colette Magny, Isabelle Aubret et Dominique Grange, elle tente des tournées aux piquets des usines en grève avant que tout ce petit monde ne se fasse virer par une CGT inquiète de voir ses propres troupes lui échapper.
Puis elle remontera sur les scènes théâtrales, défendra l'écologie, se fera une autre spécialité à chanter Léo Ferré, tournera en Europe de l'Est et, pas rancunière, passera finalement en vedette à la Fête de l'Huma en 1973.
Rongée par le cancer, elle crée, entre 1979 et 1981, un spectacle autobiographique, Requiem autour d'un temps présent, écrit par le toujours fidèle Maurice Fanon.
Après quelques concerts et apparitions télévisées, le crabe finit par avoir sa peau en 1986.
Manière de rappeler que la sauvagerie policière ne date pas d'hier, un dernier pour l'émotion : Un Soir de mai, enregistré à l'Olympia en 1968 :
Outre avoir été le populaire de Peyrac de la série historico-érotico primitive, Angélique ou Rémy dans l'excellent Du rififi chez les hommes de Jules Dassin, Robert Hossein a réalisé 13 films, à peu près tous anecdotiques, entre 1955 et 1986.
Le film dont il est le plus fier, Le vampire de Düsseldorf, a, à notre goût, pas très bien vieilli. Mais ce fait-divers, tiré des crimes du tueur Peter Kurten dans l'Allemagne des années 30, s'il est assez laborieux (surtout en la comparant à M le Maudit ou à l'Oeuf du Serpent pour ne citer que ces deux là) nous donne l'occasion de découvrir une chanson.
Elle apparaît lorsque Kurten tombe amoureux d'Ana, chanteuse de bouge qui causera sa perte.
Et c'est Pia Colombo qui double Marie-France Pisier, compagne du réalisateur, dans la scène du cabaret dont on voit un extrait dans cette bande-annonce:
La chanson avait été écrite par André Hossein, père du réalisateur, l'orchestre d'André Lafosse accompagnait le tout.
On peut en écouter l'enregistrement original en cliquant à ce lien.
On reviendra sur la cas de Pia Colombo, chanteuse et actrice aujourd'hui relativement négligée.
En attendant, retrouvons-là dans Un soir de mai de Maurice Fanon, enregistrée en 1965 lors d'un rare passage à la télévision: