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lundi 19 août 2019

Lemarque, Mouloudji et Carné au musette


Francis Lemarque, Nathan Korb de son nom, écrivit Rue de Lappe en 1951 en hommage tant au quartier qui avait hébergé sa famille d'émigrants qu'à l'ambiance et l'histoire de celui-ci.
Peuplé de bistrots auvergnats, berceau du bal musette résultant de la rencontre de ceux-ci avec des arrivants Italiens et de la Miteleuropa, ce carrefour de La Bastille fut siège des nuits parisiennes pour prolos avec son désormais légendaire cortège d'apaches et de prostituées. Tout comme à Montmartre, ces spectacles assez peu familiaux attiraient également le bourgeois cherchant à s'encanailler.
Le piquant est qu'on n'avait pas attendu le triomphe d'Airbnb pour mettre l'exotisme crapuleux en scène. Dès l'entre-deux guerre, de faux bals d'apaches existaient avec tirs de brownings (de la manufacture de St Étienne) bidons destinés à foutre le frisson au touriste.
Mouloudji fut donc chargé de mettre en chanson cette agitation nocturne disparue de ce faubourg aujourd'hui symbole d'une bourgeoisie triomphante. 


Mais les années 1930 et leur développement des transports en commun furent surtout celles du triomphe des guinguettes de bord de Marne.
Ces coins de campagnes constituèrent un réservoir de parisiens souhaitant respirer un peu. Apparaissant dans de nombreux films, ce fut le cadre du premier court-métrage de Marcel Carné, Nogent, Eldorado du dimanche (1929)
Quatorze minutes bucoliques d'un monde d'avant la crise et les congés payés au son de l'inévitable accordéon.


vendredi 2 février 2018

Sous les toits de Paris

Un flic se cache dans le paysage

Délicieux film de René Clair de 1930.
Datant du début du cinéma parlant, ce film, à la limite du muet et de la comédie musicale, est, selon Georges Sadoul, un manifeste contre le "théâtre filmé" à caméra fixe du début du cinéma sonorisé.
Autrement dit, l'arrivée du "parlant" donne lieu à un cinéma bavard à la Guitry ou à la Pagnol, dans les meilleurs cas, jetant aux orties la créativité et la poésie du cinéma muet.

René Clair a tourné un film hybride, aux mouvements de caméra virevoltants mais surtout, n'a pas hésité pas à faire la part belle à la musique : de longues séquences sonorisées s'interrompant subitement pour faire place à des scènes gesticulées en musique. Particulièrement si un obstacle (porte vitrée de bistrot, fenêtre) vient se placer devant la caméra.
Et à l'inverse deux séquences : les ébats de deux tourtereaux dans une chambre et une bagarre de rue, sont entièrement obscures, uniquement compréhensibles par le son et les dialogues.
Un film tout aussi novateur que Les temps modernes de Chaplin. Juste qu'il est sorti six ans plus tôt.


 Le long travelling du début du film


Narrant les tribulations de marginaux, chanteur de rue (Albert Préjean), petit voleur (Edmond Gréville), cambrioleur (Bilboquet) ou carrément maquereau (le génial Gaston Modot) confrontés aux amours d'une Roumaine tout à fait délurée récemment arrivée en ville (Pola Illéry), évoquant un Paris des cours et des apaches déjà disparu, le film fut plutôt un bide en France mais pas en Allemagne où l'expressionnisme avait creusé les sillons.
Une scène de bal musette :



Comme dans bien des films de ce temps, il resta la chanson.
Interprétée, avec plus ou moins de bonheur selon le cas, par Préjean, en chorale, par les locataires d'un immeuble, elle est un fil conducteur de l'histoire. La musique fut écrite par Moretti et Préjean l'enregistra en microsillon.

vendredi 30 juin 2017

Roger Riffard est maladroit

Music hall d'avril 59 avec, en couverture, Roger Riffard, Pia Colombo, Anne Sylvestre et Pierre Brunet
Lorsqu'il n'écrivait pas dans le Monde Libertaire ou deux romans méconnus (La grande descente et Les jardiniers du bitume), Roger Riffard composait et interprétait des chansons. On a évoqué tout ça dans quelques articles.
Dans le registre de la parodie du musette, voici une très bath java des solitaires. D'ailleurs, si quelqu'un possède Jojo du Magenta, écrit et chanté par le même, on est évidemment preneurs.
On rappelle ce site consacré à Roger-la-déveine. Pourquoi déveine ? Parce qu'après tant d'insuccès, lui qui devait tant à Brassens poussa la poisse jusqu'à mourir le même jour que son protecteur. Inutile de préciser que ça n'a pas fait une ligne dans la presse.



Et merci à tonton Crumb

jeudi 20 avril 2017

À vos calepins


L'Herbe Tendre a cinq ans. En conséquence, l'Herbe Tendre aimerait partager un verre pour fêter ça. D'ailleurs, l'Herbe Tendre ne voit pas ce qu'il y aurait de plus passionnant à faire ce jour là. À moins que...
L'Herbe Tendre aime les bals musettes, le rockabilly, le folk transnistrien et les lampions. Car l'Herbe Tendre est souvent d'un passéisme crasseux.
L'Herbe Tendre donne rendez-vous aux aminches. L'Herbe Tendre fera donc des crêpes. L'Herbe Tendre veut guincher en attendant la mort. L'Herbe Tendre aime la valse, le be-bop et le pogo. Si l'Herbe Tendre ne peut pas danser, elle ne veut pas faire partie de votre révolution. L'Herbe Tendre vomit les tièdes. Certes, l'Herbe Tendre est parfois cuistre mais jamais vulgaire. L'Herbe Tendre a invité ses potes muzicos. Et a une riche sélection de disques.Vous n'aurez donc aucune excuse de ne pas venir agiter votre séant en rythme et partager un verre avant de repartir pour cinq années de deuil.
On vous attend donc le 7 mai 2017 dès 16h à l'Atelier Idéal (i.e. La Chapelle) au 36 rue Danièle Casanova (Métro Canal du Midi ou Compans-Cafarelli) 31000 Toulouse.

On peut aussi amener à grignoter.
Et on tâchera de ne pas démériter face à Helzapoppin


Et comme un bonheur n'arrive jamais seul l'émission de mai de l'Herbe Tendre se fera le lendemain, lundi 8 mai à l'heure habituelle (canalsud.net ou 92.2).
Le thème, d'actualité, sera Lendemains qui chantent et qui déchantent

Afin de mieux préciser notre propos, une chanson de ce bon vieil Eugène Pottier (auteur d'un tube immortel) qui décrit l'état des lieux que nous balaierons dans tous les sens du terme. 
Ça s'appelle L'antropophage (clic) ici interprété par une troupe de caf' conc', l' Œil du Silence (Olivier Copin, Aurélia Marceau et Christophe Seval) dans un spectacle entièrement consacré au père Ugène.
Extrait :  
Je suis la vieille anthropophage
Travestie en société ;
Les deux masques de mon visage
Sont : Famille et Propriété.
L’homme parqué dans mon repaire
Manque à ses destins triomphants ;
Je le tiens, j’ai mangé ton père
Et je mangerai tes enfants !‎


Et puis, de beaux lendemains illustrés par le tube en question par Oyoun Al Kalam. "Il n'est pas de sauveur suprême, ni dieu, ni césar, ni tribun..."
Un chaleureux salut aux camarades de Tunisie et d'ailleurs.  
 

mardi 13 septembre 2016

Daniel Denécheau en jâse musette

Ophélia et Daniel
On l'a ici d'abord découvert en complice de Patrick Denain, puis on a appris que le bougre pratique des instruments plutôt spéciaux. Sa découverte du vieux style musette parisien, lors de ses recherches au sein de l’association des Musiciens routiniers sur les musiciens auvergnats émigrés à Paris, lui a fait découvrir l'accordéon diatonique mixte (ce qui signifie donc à moitié chromatique) dont il est l’un des rares représentants.
Il est à l'origine du groupe Jâse Musette.
Leur originalité : avoir recréé la formation typique des bals musette parisiens des années 30. Pour cela ils reprennent le tout premier répertoire musette et utilise les mêmes instruments, certains étant d'époque. Il sont même le seul groupe à le faire aujourd'hui.
Tout ça est raconté dans une passionnante émission d'Héléne Azera du 27 mars 2016:
Si ça s'affiche mal ou pas, c'est ici-même.
Les Jâse Musette sont :
Daniel Denécheau : accordéon diatonique mixte
Robert Santiago : Jâse (batterie ancienne), chant, accessoires (jazzoflûte, pipeau, ocarina, flexatone, tôle...)
Denis "Scotch" Gérard : banjo
Ophélia Bard : chant, bigophone, percussion
Et selon le cas
Pour la partie swing-musette, manouche : Jean Claude Laudat : accordéon chromatique et Jean Yves Dubanton : guitare
Pour la partie auvergnate :Michel Esbelin : cabrette.

samedi 26 décembre 2015

Les Auvergnats de Paris

Bouscatel en uniforme
En plus de ravitailler Paris en pinard et en charbon, les Auvergnats l'ont aussi fait danser.
L'invention du mot "bal musette" vient d'ailleurs de la cornemuse du Cantal et de l'Aubrac, la cabrette. L'industrie du disque balbutiante va multiplier les 78 tours renvoyant ainsi les airs de balloche faire un tour dans leurs montagnes d'origine. Et racketter les musiciens en leur mettant la SACEM aux trousses.
Et il a suffit de marier cet instrument à l'accordéon des Italiens pour inventer une nouvelle musique : celle qui va régner à partir des années 20. 
Le tout, sous le regard de la statue du commandeur, Antoine Bouscatel, le "Jimi Hendrix de la cabrette".
Mais tenir un bal musette, c'était aussi vite entrer dans un certain "milieu". De limonadier, à barbeau il n'y a parfois qu'un pas.

C'est cette aventure que raconte cet excellent documentaire sonore de Péroline Barbet passé le 22 décembre dans "La fabrique de l'histoire" de France Culture avec les musiciens-chercheurs Jean-Francois Vrod, Eric Montbel et André Ricros, et Claude Dubois (historien), René Saget (musicien).

lundi 20 juillet 2015

Danielle Darrieux en zizique

DD avant les pin-up américaines
La divine Danielle (DD pour les intimes), fut une  star incontestée du cinéma français de l'avant, de la pendant et de l'après guerre.
Avec plus de 80 films et presque autant de rôles au théâtre, cette ogresse, née en 1917, est toujours en activité a accompli une carrière qui va du rôle de la pure jeune fille à celui de la vieille dame.
Non seulement elle n'hésitait pas à pousser la rengaine selon les besoins du scénario mais cette musicienne (pianiste et violoncelliste) a enregistré  un bon paquet de chansons qu'on peut retrouver en quasi intégrale sur un double cd : Danielle Darrieux - Intégrale 1931-1951 (56 titres sur 2 CD - Fremeaux & Associés)



On la rencontre également au côté de Henri Garat  dans un classique du musette.
C'était en 1936.

lundi 15 juin 2015

Folklore musette à la harissa

Les Boukakes, de Montpellier, doivent leur nom à un quelconque beauf raciste.
Pas la peine de vous faire un dessin.


Groupe de rock-électro-musette, ils ont démarré en 1999 et sont composés de  Thierry Chadelle (guitar, mandole) Pascal Bonnafous (drums, gembri)
Laurent Durafourd (bass guitar) Eric Manchon (samplers, derbouka) et
Adil Smaali (voice, karkabou)
Ils ont sorti quatre disques à ce jour.
Dans la tradition du chanteur d'Oran Lili Boniche, ils reprennent ici un grand classique du Musette écrit en 1942 par Léon Angel et Émile Carrara et créé par Lucienne Deyle.
Cette aimable chanson d'amour existait auparavant sous les versions Les barbeaux de St Jean ou Mon costaud de St Jean, peu compatibles avec l'ordre moral vichyste.
Et voilà la deuxième par Jane Chacun (1937 et non 1942 comme spécifié sur la vidéo)

jeudi 18 décembre 2014

Jo Privat par lui-même

Et un pacson de musette 


Le roi de la boite à frissons du temps où la Rue de Lappe ressemblait à autre chose qu'à une turne à touristes.
On constatera que le Gitan Blanc a non seulement des doigts d'or mais aussi une langue assez bien pendue !
C'est une trouvaille du Lexomaniaque aux nuits de France Culture de décembre
 2014.

Jo Privat au temps de la bâche à jonc

jeudi 11 septembre 2014

Les bals clandestins

 
On dansait donc sous la botte du Maréchal gâteux et des hordes de touristes en feldgrau.
Un chouette documentaire sur les bals (plus ou moins) clandestins durant l'occupation.
C'était sur France Culture en janvier 2014, avec entre autre témoignages, celui de Marcel Azzola :


mardi 9 septembre 2014

Les primitifs du futur



A la base, il y a Dominique Cravic, éminent guitariste de blues, de jazz, de musette et de bien d'autres choses de bon goût. Collectionneur de 78 tours, il croise une autre névrosé atteint par la même maladie, le dessinateur américain Robert Crumb, lui-même banjoiste et pianiste à ses heures (mais ça, vû les superbes illustrations des pochettes, vous aviez sans doute deviné que le gars était dans le coup). Ces deux-là, devenus complices, vont aller vadrouiller les marchés aux puces à la recherche des trésors à trois balles.
C'est l'écoute des vieux musettes des années 20 ou 30 qui convertira Crumb à cette musique juste avant son déménagement de Californie au Sud de la France.
Du coup, les deux lascars vont s'acoquiner avec toute une bande de zicos hétéroclites pour monter leur groupe de World Musette : Daniel Huck, saxophone, scat, Jean-Michel Davis, vibraphone, xylophone, Daniel Colin, accordéon, bandonéon, Faye Lovsky, ukulélé, taramin et scie musicale et Claire Elzière, chant, ainsi qu'une brochette d'invités variés parmi lesquels on retiendra, entre autre, l'harmoniciste Jean-Jacques Milteau.
 



Les Primitifs, ce sont des morceaux classicos ( blues, ragtime et jazz, des années 20-30, vieux musette parisien…) revus et corrigés avec aussi des créations écrites par Cravic dans lesquelles il met toujours un travail de recherche, d’archivage, de gimmicks repris à partir de vieux 78 tours, des compos pleines de poésie et d'émotion, souvent empreintes d’une certaine nostalgie qui ne se prend pas pour autant au sérieux.

C'te bande là n'a produit que six disques en 25 ans. Toujours illustrés par devinez qui ?


mardi 10 juin 2014

émission de juin : Monte-à-regret et Boite à frissons

Et une émission en direct, la première. On les a rencontré un jour dans une cave. On les a donc invité...
Ils jouent en direct. Et puis, leurs choix et les nôtres...


Gigi & Nénesse :          La Rose Blanche
Yvette Guilbert :             A la Vilette
Jacques Marchais :         Ma tête
Patrick Denain :              Conseil à un pègre
Simone Bartel :               Les ballons
Gigi & Nénésse :          La marche des cambrioleurs
Modest Lovers :             Chant des pègres
Fréhel :                           La vraie de vraie
Béatrice Bonifassi            Attila Marcel
Raoul de Godewarsvelde : Mettez un verre
Gigi & Nénesse :            La java du solitaire
Gainsbourg & Clay :       Accordéon
Léo Ferré :                     Ne chantez pas la mort
Gigi & Nénesse :          Mister Gorgina
Jeanne Moreau :             La peau d'Léon
Brigitte Fontaine :            Le nougat
Gainsbourg :                   Vilains garçons, vilaines filles
Marianne Oswald :         La chasse à l'enfant
Mano Solo :                   Les gitans
Noir Désir :                    Des armes
Gigi & Nénesse :         Rue du Dragon
Actualités
Coluche :                       On est pas là pour se faire engueuler 

C'est donc toujours téléchargeable là (clic droit, enregistrer le lien ou la cible sous...)
           

jeudi 10 avril 2014

MOULOUDJI chante VIAN




    En 1971 Mouloudji tente un retour fort réussi du musette. Extrait : cette javouille parodique écrite par Vian et Assayag en 1947. Un régal pas si connu !

samedi 11 janvier 2014

Non, je ne me souviens plus 

Du nom du bal perdu...

 

  A ceux qui auraient raté le coche, la Fabrique de l'histoire consacrait une semaine à l'histoire des bals.
   On n'a pas encore tout écouté, mais nous vous conseillons vivement l'émission  où on cause bal clandestin pendant la seconde mondiale avec, entre autres, monsieur Marcel Azzola...
   On pourra la retrouver ici-même .

  


Et on prend le biais de Damia pour illustrer le propos (des chansons de 43 et 44).









mardi 26 novembre 2013

Le bal musette du mois d'août

 (fainéants, va !)


Fréhel                     La java bleue
Damia                     Le grand frisé
Fréhel                     Un petit bal musette
Lucienne Delyle     Java qu'est ce que tu fais là ?
Charles Trénet        La java du Diable
Damia                     La guinguette a fermé ses volets
Le p'tit crème          Sur la grand route
Pierrot Noir            Le champ de naviots
Georgius                 La plus bath des javas
Albert Huard           La java des fatigués
Darcelys                  Une partie de pétanque
Simone Bartel          A la Belle de Mai
Renaud Séchan        C'est mon homme
François Béranger     Au bord de l'eau
Félix Leclerc            La chanson du pharmacien
Lisa Leblanc            Aujourd'hui ma vie c'est d'la marde
Igor Agar                 Javazooka
Andrex                    Chez Bébert
Gainsbourg  et Clay  Accordéon
Caussimon                Paris jadis
Fréhel                       La vraie valse des guinguettes
Jean Yanne               J'aime pas le rock
Bernadette Lafont     Une belle fille comme moi
Alain Schneider         La java des squelettes
Les 4 Barbus             La ceinture
TMESDM                  Tmesdm
Jean Constantin           Waterloo  
Les 4 Barbus              Soeur Marie-Louise



Venez prendre votre overdose de java ici (écoutable & téléchargeable)

dimanche 3 novembre 2013

Java ?


Le Bal des Quatre-saisons, rue de Lappe, vers 1932, par Brassaï.

    "Qu'est-ce que la java, cette quintessence du populo de Paris ? Dans Du bouge... au Conservatoire, Louis Péguri se moque des alphonses, de ces messieurs les souteneurs qui, après quelques tours de valse, le naturel reprenant le dessus, se refusaient à tout effort supplémentaire au grand dam de ces dames... Le patron du Rat mort à Pigalle, que Péguri ne cite pas, avait remarqué que la clientèle féminine prisait fort la mazurka Rosina *, que les habitués valsaient à petits pas entrecoupés. Aussi, dès que les ardeurs faiblissaient, le taulier réclamait Rosina à l'orchestre et, accent de là-bas à l'appui, demandait : "Alors cha va ? cha va?" Et, un beau matin, Paris apprit qu'une nouvelle danse était née, "une danse qui tenait de la valse mais avec un pas plus crapuleux, plus canaille.- Cha va! Cha va !.. Ainsi naquit d'une déformation du parler auvergnat le fameux pas de java". Une fois encore on se rend compte du goût prononcé de Louis Péguri pour le mythe.
   L'origine du  mot java est-elle réductible à cette historiette ? Au hasard d'une chanson écrite plus tard pour Fréhel, Soi-même java, Francis Carco semble apporter de l'eau au moulin de Péguri :

 "Quand l' gros Gégèn'
Soi-même
S'amène au bal musette
A petits pas il danse la java
Et tout's les poul's
Comm' saoul's
Lui riboul'nt des mirettes
Mais question de plat il leur répond
Ça va ! va ! va ! va!"



Bref ! A défaut d'autre explication, tous s'en contentent. Dans Images secrètes de Paris, en 1928, Pierre Mac Orlan consacre un beau chapitre à la java. Sur l'origine du mot, lui aussi n'avance qu'une hypothèse : "Cette danse fut consacrée par ceux que l'on appelait encore, il n'y a pas si longtemps, les apaches. Elle doit être un hommage à cet argot puéril que l'on nomme le javanais et qui n'est plus parlé que par des crétins incurables [sic!]." On le comprend, personne n'est en mesure de dire pourquoi la java s'appelle java. Il y a quelques années à Chamonix, un musicien d'origine rom avait une clé : dans une langue rom, dchjava est l'impératif d'un verbe signifiant aller. Donc "java" serait la transposition de dchjava, à savoir "vas-y". Pourquoi pas, d'autant que, dans Ils ont dansé le Rififi-Mémoires, Auguste Le Breton l'affirme : jadis, avec les Espagnols, les gitans étaient "les plus fins gambilleurs de la capitale."
    Sur cette danse, Péguri ajoute pourtant, sans rien apporter de précis : "Quant à sa dénomination elle peut être aussi une conséquence du retour à Paris de certains trafiquants de la route de Buenos-Ayres (sic), ayant ramené le pas glissé du tango Milonga qui a un certain rapport avec la marche glissée du pas de la java primitive, en réalité une valse au ralenti et à mouvement décomposé. Par évolution, la vraie java est devenue une valse musette et la vieille mazurka des faubourgs comme Rosina est restée cette vraie java dont Maurice Yvain a écrit musicalement le prototype avec Une petite belotte (sic) [...]Le succès de ce pas nouveau est extraordinaire. On danse la java même dans le grand monde." Incorrigible Louis Péguri et ses idées de grandeur !... Cela étant, Philippe Krumm me le confirme, la java est bien une mazurka massacrée. Après la guerre, Carco voyait en elle une "mazurka faite d'emprunts à toutes les danses" et la comparait à la belote qui, à l'image de la java sa contemporaine, "se complique de manille, de poker et d'inventions déterminées". La petite belote** d'Yvain, belote et java associées, est une photographie parfaite d'un certain Paris des années vingt. Mais attention, André Warnod l'a attesté au Bal des Gravilliers, la java date d'avant 1914 !

Claude Dubois, La Bastoche, Une histoire du Paris populaire et criminel.





  
   Concernant Claude Dubois, on pourra écouter ci dessous sa Nuit rêvée où l'on trouvera notamment une séquence sur le Balajo avec Francis Lemarque et Jo Privat en invités. Un grand merci à George qui nous a retrouvé cette archive.



  Concernant Philippe Krumm, spécialiste de l'histoire de l'accordéon, cité dans le texte de Dubois, nous vous conseillons vivement d'aller consulter son papier très fouillé (et richement illustré) sur les bals musettes et la rue de Lappe. C'est ici .




* Pour ce faire une idée de cette mazurka, un extrait par un groupe italien


** Le morceau en question, par Mistinguett