dimanche 23 juin 2019
Encore et toujours Kaurismaki. Mais avec qui ?
Sans la littérature russe, la littérature finlandaise n’existerait pas. Comme la Finlande a fait partie de la Russie pendant plus de cent ans, ces influences ont été si fortes qu’elles existent toujours. La littérature finlandaise est née quelque part entre Tolstoï, Dostoïevski, Tchekhov, Tourgueniev, Gogol d’un côté et Zola ou Victor Hugo de l’autre. Aki Kaurismaki
Pour mieux illustrer ses assertions, le premier film d'Aki Kaurismaki fut l'adaptation du roman de Fedor Dostoïevski Crime et châtiment (Rikos ja rangaistus, 1983) peut-être parce qu'il avait lu dans l'entretien d'Alfred Hitchcock avec Truffaut que le maître jugeait ce livre "trop compliqué, inadaptable*".
Tout Kaurismaki est déjà dans cet hommage à cet âge d’or où il suffisait d’un seul meurtre pour faire un film policier. Raskolnikov n'y est plus étudiant mais ouvrier dans un abattoir, l'usurière est devenue un ignoble homme d'affaire et le Finlandais se régale à filmer ce qu'il fait le mieux : des scènes de travail ou d'interrogatoire.
Un seul détail nous chiffonne. La musique est bien présente dans ce film, comme dans cette scène rythmée par une reprise tout à fait fidèle du Love her madly des Doors (LA Woman, 1970).
Comme on n'a pas été foutu de trouver qui interprète cette version ni dans le générique en finlandais, ni dans aucune fiche technique, nous voilà réduit à faire appel à notre distingué et érudit lectorat généralement plus malin que votre serviteur.
Mais qui donc est derrière cette honorable reprise ?
*Il existait déjà une mouture de Josef von Sternberg, de 1935 avec Peter Lorre.
jeudi 28 février 2019
Kaurismäki, du rock, du tango, du twist...
Une des choses formidables avec le cinéma d'Aki Kaurismäki, c'est que même dans ses films ratés (enfin, y'en a qu'on aime moins) il y a toujours une séquence musicale qui vaut la peine d'être non seulement ouïe mais aussi vue.
On ne sait si notre Finlandais préféré a vraiment pris sa retraite du cinéma, lui qui fut recalé pour cynisme à l'entrée de la FEMIS locale. Mais on conseille aux réalisateurs en herbe d'appliquer sa méthode : soyez ouvriers pour bouffer un peu et allez voir une bonne quantité de films. Au moins, si vous causez du prolétariat, ce sera en connaissance de cause, pour une fois.
À titre d'illustration, André Wilms en prophète et en grande forme dans une séquence de Leningrad Cowboys meet Moses (Les Leningrad Cowboys rencontrent Moïse) 1994.
Un tango en finnois, spécialité du maître qui n'hésite pas à truffer ses films de chansons de Carlos Gardel. Il semble que vu son climat quelque peu pénible, sa condition de satellite déguisé de l'URSS et de parent pauvre et méprisé de la Scandinavie, la Finlande soit assez propice aux chansons nostalgiques. Ça s'appelle Kauas pilvet karkaavat (Au loin vont les nuages) et ça donne le titre de ce film de la dite "trilogie finlandaise " de 1996.
Terminons sur notre scène préférée, celle qui nous fit bondir sur un fauteuil à la sortie du film en gueulant "Merde ! Il est là, celui-là aussi !"
Un extrait de I hired a contract killer, 1990, (J'ai engagé un tueur). Outre Jean-Pierre Léaud frisant la perfection, Serge Reggiani interprétant à merveille le rôle d'un agonisant, on y croise le Kaurismäki lui-même en vendeur de lunettes et accoudé au bar, Nicky Tesco, ex chanteur des légendaires Members, en homme de main d'un truand minable.
Et qui chante dans ce pub ? Un Joe Strummer éblouissant de grâce, de simplicité et d'inspiration.
Promis, on vous en remettra.
jeudi 7 février 2019
Rocking class hero
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Castres 2 février 2019 |
Mais ce dimanche 3, on est allé retrouver le meilleur ami du rocker, notre dernier trésor national vivant, monsieur Roberto "Libero" Piazza, alias Little Bob.
Quand on songe qu'on a du le voir la première fois autour de 1980, ça donne une idée de la longévité du bonhomme.
Il a vieilli, nous aussi au passage, mais la voix est intacte, les yeux toujours aussi vifs, le regard bienveillant, chaque geste empreint de simplicité et de complicité. Il est heureux d'être là, quoi.
Et son "nouveau" groupe (depuis 2012), les Blues bastards lui sied à merveille : Bertrand Coulome en contrebassiste inspiré, Gilles Mallet à la guitare moulinette, Jérémie Piazza, neveu du Bob et batteur efficace et enfin, Mickey Blow, de Saint Ouen, ci-devant harmoniciste des Stunners (1979-1985) mémorable groupe de pub rock banlieusard, des Belleville Cats ou de Johnny Thunders.
Petit Robert a cavalé deux heures, nous assénant nouveaux morceaux et classiques (y'a qu'à puiser dit-il) dont l'inévitable Riot in Toulouse qui connaît une nouvelle jeunesse dans nos rues, le swamp Lost Territories, Libero, la chanson en l'honneur de son père, ouvrier italien anarchiste atterri au Havre, ( celle que Kaurismaki a foutu dans son film. Mon vieux m'a toujours exigé d'être libre. Il l'était, je le suis).
Puis, il a achevé en balançant coup sur coup deux reprises de Little Richard à toutes blindes ! On avoue avoir furtivement craint que le camarade Piazza n'aille calancher sous l'effort, là-même, sur scène. Mais non il tient le coup et s'il vient un jour à lâcher la rampe, sa place est de toute façon réservée au paradis de la musique du diable, quelque part entre Robert Johnson et Eric Burdon (toujours là, lui aussi).
On lui laisse le dernier mot :
Il paraît que je deviens culte. Moi j’ai pas bougé d’un iota. Je ne suis pas devenu riche, mais je fais ce que j’aime depuis 42 ans.
Extrait tiré du documentaire Rockin' class hero de Gilbert Carsoux et Laurent Jézéquel. Only liars, qui nous valut une diatribe au sujet des salauds qui gouvernent.