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lundi 26 août 2024

Cinéma : la fin de la frontière

 

Andy Dale Petty

WESTERN LANDS un film de Nicolas Drolc - FR / USA  - 86 minutes

Un essai cinématographique à la gloire de la côte Ouest américaine, à travers la parole de ses habitant-e-s en résistance contre l'ordre établi et la culture dominante.

Alors qu'ils s'embarquent pour une tournée d'un mois sur la côte Ouest, le musicien de Folk originaire d'Alabama Andy Dale Petty et son ami, le cinéaste nancéien Nicolas Drolc en profitent pour improviser un film, à la croisée du road movie, de l'expérimental, du documentaire fauché et du journalisme gonzo. Sillonnant les routes des Etats de Californie, Oregon, et Washington, le film est un hommage à l'esprit de liberté qui caractérise ces lieux et leurs habitants, des pionniers de la ruée vers l'or, jusqu'au beatniks de San Francisco des années 50, aux punks de Portland des années 70 jusqu'à l'explosion culturelle Grunge qui part de la région de Seattle à la fin des années 80 pour embraser le monde entier. Le long de la route, on croise des curiosités oubliées et on obtient une collection visuelle détaillée , hommage à une amérique étrange, vouée à disparaître.

On y écoute les témoignages de Lloyd Kahn, architecte hippie de 87 ans, ancien rédac chef de Shelter et du Whole Earth Catalog, d'Art Chantry, l'un des plus importants graphistes vivants, figure de proue du mouvement grunge, de V. Vale, anthropologue et éditeur du fanzine Search & Destroy et des livres Re-Search), de Kelly Halliburton, activiste punk pionnier de la scene de Portland et collaborateur du groupe culte de garage punk Dead Moon, d'Eric Isaacson, fondateur du label indépendant Mississippi Records, de Dave Reisch, du groupe de rock psychédélique new yorkais Holy Modal Rounders, de Bret Lunsford, historien, et musicien membre du groupe Beat Happening, ainsi que bon nombre d'anonymes, artistes, activistes politiques et agitatrices et agitateurs notoires.

   

Un film de l'ami Nicolas Drolc est toujours une (bonne) surprise.
Western Lands ne déroge pas à la règle en nous offrant une errance qui va de Big Sur jusqu'aux environs d'Oak Harbour en compagnie du musicien folk Andy Dale Petty.
S'il y a bien un ensemble de sensations plus difficiles à faire ressentir au spectateur qu'elles n'y paraissent, ce sont bien celles du vent, du frais, de la chaleur, de la pluie et du froid au long de cette longue route ponctuée de motels, de snacks, de bars, de boutiques étranges et de musées bizarres. 
On ressent tout ça en avançant vers le Nord. Et en tombant sur autant de pancartes, montagnes, panneaux, plaines, baraques, routes et encore d'autres routes.
Et on y croise des fantômes. Ceux de la classe ouvrière émiettée, des diggers de l'été 1969, des lobotomisés oubliés, des squatters expulsés, des Indiens pas assez glamour pour Hollywood, des homeless, des rockers SDF, des créateurs du punk de l'Ouest, des trop pauvres pour rester là alors barrez-vous vers l'Est ce coup là, des country singers et soulmen du nord-ouest... De tout un peuple qui est devenu gênant car il n'est ni assez propre ni assez soumis ni surtout, assez friqué pour ce monde.
C'est ce que nous racontent toutes ces voix, graves, profondes, hésitantes, éraillées dont on ne verra jamais le visage mais qui forment le choeur de cette évocation. 
On adorerait avoir une deuxième série qui serait, par exemple, une route Detroit / Chicago / Cleveland. Mais chaque film a son histoire et l'histoire ne se répète point. 

Un rappel d'un de ses autres films, Bungalow sessions avec la séquence consacrée à Andy Dale Petty.
 

jeudi 1 décembre 2022

Mort naturelle d'un anarchiste

 

Livrozet et Drolc

Serge Livrozet était d'une autre époque, pas meilleure ni pire, quasiment d'un autre monde.
Né en 1939 à Toulon de père inconnu et de mère prostituée ("je suis un authentique fils de pute!") il a un parcours de pauvre assez classique, de l'armée à une boite de pub, jusqu'à être victime d'un associé véreux. Qu'il cambriole en représailles. Et le cassement, quand on y a pris goût...
D'où un premier séjour à l'hôtel des gros verrous de 1961 à 1965.  
En sortant, devenu forain par obligation (merci le casier) il écrit, adhère à la CNT et occupe la Sorbonne en 1968. Il se refait gauler en fin de cette même année pour avoir repris le turbin afin de financer une maison d'édition révolutionnaire. 
Sorti en 1972, il cofonde, accompagné d'un parterre d'intellos en vogue, le CAP (Comité d'action des prisonniers) en pleine période d'émeutes carcérales. 
Son premier livre, De la prison à la révolte sort en 1973, préfacé par Foucault.
 Une nouvelle condamnation sera due à une remarque pleine de bon sens hurlée dans un tribunal : "Pourriture de justice française!". Phrase pour laquelle il se rétractera ensuite : " Je n’aurais pas dû dire pourriture de justice française... Mais pourriture de toutes les justices, la française, la russe, l’américaine, etc." 
S'ensuivent les luttes contre le QHS, la guillotine, etc. Et nous sommes un certain nombre a avoir été frappés par la lecture de son livre Hurle !
Ayant créé la maison d'édition Les Lettres libres en 1981, il est à nouveau arrêté en 1986 pour fausse monnaie. Acquitté mais ruiné en 1989, il zonera désormais entre ateliers solidaires et cinéma.
Le réalisateur Nicolas Drolc a d'ailleurs réalisé un documentaire sur sa personne en 2017, La mort se mérite, film qui n'a pas trouvé de distributeur et que nous faisons un plaisir d'envoyer ici. Commentaire de l'intéressé : "Qui a envie d'aller voir râler un vieux con ?" 

LA MORT SE MÉRITE from LES FILMS FURAX on Vimeo.

Il a écrit une quinzaine de bouquins et intervient dans quatre films.
Il est mort de maladie le 28 novembre dernier.
En guise d'hommage, qui de meilleur que Johnny Cash dans un classique joué à San Quentin dans l'inégalé Folsom prison blues.
 

 

Décidément, ce blogue vire à la rubrique nécrologique "Avis de décès". 

mardi 22 septembre 2020

Le film qui n'aurait jamais du exister

Hasard des projections dans de très rares festivals, on a pu voir ce dimanche 20 septembre, un film aussi étrange que réjouissant, tout simplement intitulé This film should not exist, co-réalisé par Gisella Albertini, Massimo Scocca, et l'ami Nicolas Drolc
Vous souvenez-vous des Country Teasers ? Rassurez-vous nous non plus, jusqu'à ce que... 
Voici la geste d'un groupe de branleurs, fondé à Édimbourg en 1993, qui prétendaient jouer de la country mais à la manière de Joy Division ou de The Fall, et se sont retrouvés signés chez Crypt Records, le label des garageux purs et durs par excellence (à ce stade les amateurs sont déjà perdus et se demandent quel est cet étrange mélange). 
Ils étaient drivés par Ben Waller, inadapté social déclamant des textes cyniques, provocateurs, ironiques ou juste marrants. Issu de la meilleur société, Waller avait tout largué pour embarquer ses potes dans de la musique improbable avant de s'épanouir comme cariste dans un Jardiland londonien, faire des concerts occasionnels sous le pseudo de The Rebel et enregistrer des bidouillages comme le forcené qu'il est.
Partant comme un documentaire rock classique de la tournée européenne de 1995 en compagnie des Oblivians (Memphis, Tennessee) le film débute comme une virée de concerts chaotiques dans des caves puant sueur et mégots avec un groupe de déconneurs irresponsables, avant de glisser progressivement vers une intimité de bon aloi où apparaissent, entre autres, les grandes influences de Waller, le très surprenant duo gallois Datbyglu dont Dave entretint quinze ans d'amitiés épistolaires avec Ben sans oser se rencontrer "pour de vrai" par timidité et peur d'une déception.
Pour vous donner une idée, la bande annonce de la chose, hélas non sous-titrée (la traduction des chansons, à elle seule, vaut le détour).

 

Le genre de truc inattendu que vous ne trouverez pas sur Arte TV. Alors, si vous connaissez une salle de cinoche sympa, un festival décalé, un squat déconnant, près de chez vous, n'hésitez pas à contacter les films Furax.
Un ultime pour le plaisir : Points of view.  De rares spectateurs n'ont pas supporté ce genre de paroles.
 

mercredi 10 avril 2019

Un documentaire fait maison


Chouette soirée de retrouvaille lors d'un samedi toulousain.
De Nicolas Drolc, cinéaste lorrain, on avait apprécié Sur les toits, documentaire sur les mutineries des prisons de Nancy et de Toul en 1971, 1972. Ce film était, au passage, accompagné d'une superbe musique de King Automatic et de M. Verdun.
On avait aussi aimé un autre docu, La mort se mérite, sur Serge Livrozet dont la diffusion fut sabotée par le distributeur même.
Le 6 avril dernier, nous avons eu le plaisir de le retrouver dans un bar toulousain où il montrait son dernier film, Bungalow sessions, en première partie du ménestrel d'Alabama Andy Dale Petty.
Six portraits, d'une dizaine de minutes chacun, de six musiciens de folk, country, blues, gospel, l'essence du rock en somme. Tour à tour émouvantes, décalées, comiques ou barjots, ces petites tranches de vie vous embarquent vers les racines de la musique du diable. Un film aussi modeste que jouissif.



Comme l'a écrit M.A. Litter
Drolc voulait réaliser un film rendant compte du bouillonnement de la scène folk, blues et gospel américaine actuelle, sans pouvoir toutefois quitter sa base -son "bungalow"- situé quelque part dans la ville de Nancy.

Il a résolu le problème géographique en invitant ses musiciens préférés à venir  jouer dans le bistrot du coin, à dormir chez lui puis à se plier à un jeu de questions/réponses improvisées le lendemain des concerts- induisant par là une session d'enregistrement acoustique. 
Le film réunit le troubadour de l'Alabama Andy Dale Petty, la légende de la scène garage de Detroit Danny Kroha (The Gories), le prêcheur n'à-qu'un-oeil Reverend Deadeye, le prophète du folk californien Willy Tea Taylor, le songwriter et instituteur Possessed by Paul James et le grand seigneur du gospel de cave the Dad Horse Experience.
Pour mieux vous donner une idée, cette séquence avec Danny Kroha, ancien guitariste de garage punk qui se replonge dans le blues le plus antique.Il glisse de sa passion pour cette musique à la classe ouvrière et ... au paradis.

dimanche 25 octobre 2015

Novembre entre quatre murs

La prison est ce lieu où Ulysse est sous l’œil d'un Cyclope qui garde et mange les moutons. (AH Benotman)

Depuis qu'un certain Hamourabi a chié les premières traces écrites de la loi, il semble que l'humain ait développé une passion certaine pour entraver et enfermer son semblable.
Et ce n'est pas allé en s'arrangeant depuis, c'est même un business qui peut rapporter gros.
De même qu'il existe une littérature carcérale, un cinéma carcéral, une peinture carcérale, la chanson s'est souvent attaquée au triste sort du taulard, du galérien, du bagnard, du gosse en maison de redressement.
Mais on ne réduira pas ici l'enfermement à la seule prison. Hôpitaux psychiatriques, mouroirs de retraites, centre d'éducations fermés (bel oxymore administratif, au passage), stockage concentrationnaires sont autant de lieux d'enfermement.
Chacun peut se retrouver enfermé et en faire une complainte, un hymne, un blues vengeur ou un refrain ironique.

L'Herbe tendre de novembre ira donc fouiner entre quatre murs pour l'émission du lundi 2 novembre à 18h sur radio Canal Sud (canalsud.net)

Un documentaire de Nicolas Drolc sur les mutineries de Toul et Nancy en 1971 (musique de King Automatic et M. Verdun)


Où nos working class heroes conseillent de ravager les maisons de redressement (les images viennent de la mutinerie de Stangeways, Manchester,1990)