Alfred de Musset, que Baudelaire n'hésitait pas à qualifier de "croquemitaine langoureux" (sic) et que bien d'autres traitaient de plagiaire de Byron, Musset, ce dandy débauché qui bousilla sa jeunesse non sans atteindre l'âge alors relativement respectable de 46 ans, fut abondamment mis en musique dès le XIXème siècle, que ce soit par Berlioz, Lalo ou Viardot.
Ce romantique déglingué ne pouvait donc qu'intéresser un Gainsbourg à l'aube de sa carrière.
Voilà aussi l'opportunité d'évoquer le récemment disparu Alain Goraguer qui arrangea les six premiers albums du Lucien, de 1958 à 1964. Vian, Reggiani, Bobby Lapointe ou Jean Ferrat lui doivent aussi beaucoup.
La nuit d'octobre est tirée de Serge Gainsbourg (n°2) de 1959.
Certains extermineraient leur famille pour faire carrière, d'autres s'en foutent un peu du moment qu'ils peuvent partager un moment musical avec autrui.
Simone Tassimot (1943-2018) était certainement de celles-là.
Après une jeunesse gauchiste (elle apparaît dans Grands Soirs et Petits Matins de William Klein, documentaire exquis sur Mai 68) elle devint journaliste puis graphiste jusqu'à tout envoyer bouler à cinquante balais en montant sur scène "à l'ancienne". Une chanteuse, un pianiste et elle s'attaqua au XXIème siècle à la façon d'une goualeuse des cabarets rive gauche des années 1950.
Elle mena vingt ans de pur cabaret avec des spectacles tels Chansons d’escales, Saint-Germain-des-Prés, La Fille des bars, Carnaval, Léo Ferré et les poètes, Qui j’aime, D’une fin de siècle à l’autre…en chantant Carco, Caussimon, Ferré,Mac Orlan et, bien entendu Gainsbourg auquel elle consacra tout un disque de reprises Gainsblues (2009).
Ici, Dépression au-dessus du jardin accompagnée par Jérôme Destours.
Elle interpréta également des chansons de films de l'entre-deux guerres et apparut dans quelques films de Paul Vecchiali (C’est l’amour, Le Cancre, Les 7 Déserteurs ou la Guerre en vrac, Train de vies ou les Voyages d’Angélique.)
Elle chanta d'ailleurs quelques chansons écrites par ce réalisateur comme Les Nuiteuses pour son spectacle Chansons pour la nuit.
Une chanteuse discrète qui perpétuait la tradition de ses aînées juste parce que ça lui plaisait. Ce qui fait toujours plaisir.
Nostalgie de la Giscardie. En 1975, après deux concepts albums flamboyants (Histoire de Melody Nelson et Vu de l'extérieur) un Serge Gainsbourg encore inspiré tente un provocation rock 'n roll grâce à un disque entièrement consacré au nazisme : Rock around the bunker.
Enregistré à Londres avec de solides tâcherons, l'album souffre principalement d'un son maigrelet digne d'un groupe de rock français. Le Lucien ne poussera pas la provoc' jusqu'au bout en retirant sa chanson Les silences du Pape (crainte des réaction des milieux cathos) et le scandale n'éclatera qu'une demi décennie plus tard avec sa Marseillaise. Hors quelques gauchistes dénués d'humour, la provoc' est tombée dans une indifférence générale et le disque s'est vendu honorablement.
Promotion oblige, un passage à la télévision s'imposait. On y découvre un pénible Bouvard, de pénibles choristes nippées en souris grises, une sono défaillante. On y apprend au moins qu'en 1975, la République Fédérale d'Allemagne n'allait pas tarder à poursuivre ses anciens nazis. Pour accélérer un peu le mouvement, deux ans plus tard, la RAF descendait le patron de Daimler-Benz, l'ex Obergruppenführer Hanns Martin Schleyer, ci-devant proche collaborateur de Reinhard Heydrich.
Malgré sa sonorité ratée, on aime bien cet album. Surtout ce titre, J'entends des voix off
Comme on a pu le constater cette semaine, la faucheuse ne se met jamais en grève.
Tout a été dit, en mieux au sujet d'Anna Karina, on vous passe donc les "égéries de la nouvelle vague" et autres "fraîcheur libertaire" (si, on l'a entendu !) pour un duo de 1967 avec le grand manipulateur de jeunes filles à la voix toujours à la limite du juste
Et la veille, disparaissait le feu follet de San Francisco. À 73 ans, Roy Loney, cofondateur des légendaires Flamin Grooviesen 1965 avec Tim Lynch, Ron Greco et Cyril Jordan a lâché la rampe.
Non seulement ces gars ont maintenu vive la flamme d'un rock 'n roll joyeux et primitif au milieu de la grande décadence post hippie mais le Roy avait derrière lui une carrière tout à fait honorable suite à son départ du groupe (qui, à notre avis, ne s'en est pas relevé) en 1972. Particulièrement avec les Phantom Movers.
Ici, avec les Groovies (Lp Flamingo, 1970) dans Headin' for the Texas border.
Casquettes qui ne s'envolent jamais (et illustration abusive : c'est une Triumph )
On avait autrefois cité la Norton en la taxant de plus belle moto du monde.
À vrai dire on s'en fout un peu de l'esthétique des grosses chromées, il s'agit juste ici de se repasser ce que d'autres nomment une rengaine entêtante.
Remarquons tout de même que la Harley-Davidson, débarquée dans nos contrées en 1944 dans les fourgons des GIs, fut l'engin qui symbolisa le mieux monde des bikers, des grands espaces (pas trop pourvus en virages vu la maniabilité du truc) et de la conso à go-go des années soixante.
Toujours à l’affût de l'air du temps, Gainsbourg fit chanter ce blindé à deux roues par Brigitte Bardot en 1968.
Tube que reprirent les Bordelais de Gamine en 1984
Fermons le ban de cette rubrique anti-écologique avec OTH en concert
Les Vanneaux se cassent jusqu'à septembre. On souhaite à tous et à toutes d'en faire autant. Surtout à ceux qu'on enferme et qui ont survécu à la chaleur.
Quelques suggestions à ce sujet :
La Polla Record No mas presos
Johnny Cash Wanted man
Sham 69 Borstal breakout
113 Les évadés
Lucienne Boyer La belle
Tatyana Kabanova Odesskoga Kichmana
Albert Marcoeur Le fugitif
Belton Richard Cajun fugitive
Sanseverino La jambe de bois
Triptik Panik
Harry Belafonte Midnight special
Chumbawamba The smashing of the van
AC / DC Breakout
Los Chichos Libre quiero ser
Merle Haggard I'll Breach out again tonight
Catherine Sauvage La belle jambe
Dooz Kawa Me faire la belle
The Sound I can't escape myself
Vous pouvez vous faire la malle (d'Houdini) en écoutant tout l'été cette émission.
Un Gainsbourg qui servit en son temps de générique à la première série des Vidocq de l'ORTF, L'évadé.
Et un un autre classique irlandais, The auld triangle, cette fois par les ricains Punch Brothers.
Danièle Chareaudeau tirerait son pseudonyme de son premier rôle dans "La jument verte", bouffonnerie de Claude Autant-Lara où elle passe son temps à lutiner dans une grange. Son amitié avec Pierre Barouh et Francis Lai lui a fait essayer la chanson pour un album assez original en son temps : Moitié-ange, moitié-bête. Outre un duo avec son compagnon, le comédien Jean-Pierre Kalfon et une reprise de Mouloudji "La chanson de Tessa", on y trouve son premier tube : "La guérilla" écrit pour elle par Gainsbourg
Puis elle enchaîne quelques films et joue quelques concerts avec son futur mari Ian Jelfs, plutôt folk, puis glissant vers un reggae un peu punk sur les bords à partir de 1977. Au début des années 1980, elle a un succès retentissant : Faut plus me la faire. Chanson devenue disque d'or, qui constitue une tentative de Pat Benatar à la française, le solo de guitare étant assuré par Steve Hillage, ex-membre de Gong et futur producteur de Rachid Taha. Puis, elle tourne avec un groupe de luxe : The Ruts DC, anciennement The Ruts, un des groupes post punk les plus doués de son temps temps, brutalement stoppé par la stupide mort par overdose de son talentueux chanteur, Malcolm Owen. En ouverture de l'album "Chez moi", enregistré en Angleterre par Mick Glossop, Showbiz :
Elle fera quatre albums dans les années 80 avant d'être lourdée par sa maison de disque et se consacrer à l'humanitaire et à son compagnon gravement malade. Elle a fait un retour, en 2003, sous le patronage de Benjamin Biolay.
ps : on aimerait comprendre pourquoi cet humble site est bloqué par la mairie toulousaine et donc inaccessible dans les bibliothèques. Sa seigneurie, mètre-étalon de la médiocrité, se serait-elle sentie insultée ou désobligée ? Z'ont que ça à foutre les veilleurs municipaux ?
Voici une drôle d'américaine tombée amoureuse de la chanson française des années 1950 et 1960.
Elinore Blake est née en 1965 à Frisco, Californie. Elle a d'abord gagné sa vie comme dessinatrice de films d'animation. Et puis joué dans les groupes Pussywillows, un trio féminin sixties, puis dans les plus durs Shitbird avant de prendre son pseudonyme et de s'attaquer à la musique yé-yé de nos années 60, en particulier à Serge Gainsbourg.
Le succès débarque avec une reprise de France Gall, Chick Habit, cooptée par le laborieux Tarentino pour son Boulevard de la mort (2007).
Entre-temps cette dame a collaboré avec Brian Wilson (celui-là même des Beach Boys), Yo La Tengo, Ronnie Spector et ce petit génie de Jonathan Richman. Elle a également monté un groupe de garage rock pur et dur, Bassholes. En France , elle a fait quelques duos avec Bertrand Burgalat.
Qui, par ailleurs, a conçu ce clip de 1996.
Quoi ? Ben oui, c'est de la pop. Et alors ? Un peu de légèreté de temps en temps, que diable ! Après tout c'est dimanche.
Péremptoire, un fanzine de ma jeunesse proclamait, en son éditorial, Nous ne serons pas les Eddy Mitchell de notre génération !
Même s'il est vrai qu'on préférera toujours plutôt être Louise, Monsieur Eddy a finalement fait une carrière discographique et cinématographique plutôt moins pire que bien d'autres.
Au moins et contrairement à beaucoup de ses semblables, notre Schmoll de Ménilmontant sut pratiquer une chanson gentiment contestataire bien AVANT mai 68, se dotant ainsi d'une image de crooner et rocker sceptique pessimiste capable de rallier des blousons noirs de la Porte de Montreuil comme des cadres en plein malaise, comme on disait à l'époque.
Prenez sa chanson "sociale" par excellence, Société anonyme de 1966 (avec ici une apparition de Lulu) :
Monsieur John Warsen, du blog Je suis une tombe, nous fait remarquer que le gars avait auparavant commis une adaptation du No particular place to go d'un Chuck Berry qui, s'il n'avait cure du prix de l'essence, galérait avec sa ceinture de sécurité.
Cette reprise l'ayant rendu lyrique (John, pas Eddy), on se fait une joie de citer la fin de son article :
L'adaptation d'Eddy
Mitchell, quant à elle, escamote subtilement la question raciale,
pour se concentrer sur une critique radicale du capitalisme
financier. Eddy venait de lire La société du spectacle de
Guy Debord et voulait se payer le rêve américain, en épinglant ses
pires travers. A l'époque où sort le quarante-cinq trous A
crédit et en stéréo on pensait que le consumérisme ne
s'en relèverait pas, mais finalement sa capacité à récupérer sa
critique fonde son aptitude à la survie, et je crois bien que tant
que l'homme blanc n'aura pas pollué la dernière rivière et abattu
le dernier arbre, il n'acceptera pas l'idée que l'argent ne se mange
pas, il est un peu idiot, à crédit et en stéréo.
En 1966, Gainsbourg enregistre une nouvelle version des Papillons noirs en duo avec Michèle Arnaud.
Elle avait été sa première interprète et même si ce duo n'apporte pas grand chose à la version originale, ce sera toujours un prétexte à mater un scopitone de la grande époque.
Ne reculant devant aucun sacrifice, la maison vous offre une autre version assez marrante et beaucoup plus récente par les Dead Brothers, groupe fanfaresque jazzy, bluesy à tendance rock monté en Suisse par Alain Croubalian, Jean-Philippe Geyser, Alain Meyer, Barbara Bagnoud et une vingtaine d'autres joyeux zigotos.
Le pacha de Georges Lautner restera comme une série B relativement honorable qui connut quelques ennuis avec la censure pour cause de violence policière assumée.
Parmi les quelques scènes marquantes, on trouve l'enregistrement du Requiem pour un con (dans le film l'inspecteur « Albert, la galoche » est surnommé « l'empereur des cons ») par Serge Gainsbourg.
Appelé à la demande de Gabin, acteur et coproducteur du film, le Serge n'hésita pas à reprendre, une fois encore du Dvorjack, (en l'occurrence, le dernier mouvement de la Symphonie du Nouveau Monde)
Jugée excessivement vulgaire par la censure, cette chanson se verra interdite d'ondes (on comptait cinq radios à l'époque) par la commission de censure. Ce qui lui attirera certainement sa renommée suite au 45 tour (Philips 370 617 F) qui comportait Psychasténie en face B.
Du coup, ce thème fut copieusement repris.
Les punks parisiens d'Oberkampf conclurent leur premier album de 1983, P.L.C., par cette aimable version :
Plus récent et plus inattendue, une version enregistrée à Sainte-Marie aux Mines le 10 juin 2006, par le trio dynamique Jacques Higelin, Daniel Darc et Rodolphe Burger.
Quelle ne fut pas notre surprise, au détour d'une émission du samedi sur une antenne du service public d'entendre évoquer un cinéaste atypique : Édouard Luntz, qui nous était parfaitement inconnu.
Doté d'une fiche rachitique chez tata wiki, renommé dans le milieu pour avoir collé, à lui seul, un procès au magnat Daryll Zanuck afin d'obtenir un droit au montage final, cet homme fut, sur la fin, également producteur.
Nous renvoyons à une présentation de France Culture : Évoquant certains films de Truffaut, de Pialat ou Eustache, son œuvre
est travaillée par les questions de l'enfance, de l'adolescence, de la
délinquance dans la banlieue des années 60. Après avoir été l'assistant
de Jean Grémillon, Nicholas Ray et Pierre Prévert, il se lança, aux
premiers temps de la Nouvelle Vague, dans la réalisation de
courts-métrages remarqués, en particulier Enfants des courants d'air,
tourné dans un bidonville de la Plaine Saint Denis et récompensé du
Prix Jean Vigo. Mais c'est surtout son long métrage de 1966, Les cœurs verts, qui domine sa filmographie ; une fiction tournée avec une bande de blousons noirs à Nanterre et Gennevilliers.
Il est pour le moins exagéré, comme on l'a entendu ailleurs, de taxer Les cœurs verts de "premier film sur les jeunes de banlieue" car un Marcel Carné vieillissant avait réalisé le quelque peu poussif Terrain vague en 1960.
Mais dans ce magnifique entretien de 1966, on voit à quel point ce réalisateur
(9 films à son actif de 1959 à 1973) fut un homme sympathique, sensible et plein de bon sens. Par contre, le plateau
d'invités était gratiné, heureusement compensé par les réactions d'un
public juvénile enthousiaste ou dubitatif.
L'autre grosse surprise est constituée par la musique du film. Pour les besoins de deux séquences de bal, Serge Gainsbourg composa une petite mélodie (Scène de bal-1) qu'il n'hésita pas à recycler avec profit deux années plus tard.
On n'en dit pas plus, on vous laisse reconnaître ce que ça a donné :
En ce qui concerne Scène de bal-2, le Lucien farceur a également repris le thème
pour en faire Le canari sur le balcon, chanté par la Birkin en 1973. Rien
ne se perd.
Ps qui n'a rien à voir ou presque : la nouvelle est tombée hier soir, Gilles Bertin a finalement écopé de cinq mois avec sursis. On est heureux pour lui.
Avant d'être égérie new-yorkaise et devenir une des voix du Velvet Underground, puis d'enregistrer six albums en solo, Christa Päffgen (1938-1988) mieux connue comme Nico, a été mannequin à quinze ans et actrice à vingt ans. Enrôlée, en 1959, par Fellini dans sa Dolce Vita, la starlette aura la vedette d'un film de Jacques Poitrenaud, Strip-tease, de 1962. Dans ce film plutôt anecdotique, elle interprète une allemande qui déserte sa troupe de danse pour devenir strip-teaseuse et faire la rencontre d'un gosse de riche dont elle devient la maîtresse. Afin de se venger d'une humiliation de la part du jeune con, elle remet une dernière séance d'effeuillage avant de retrouver le chemin de la danse. On a eu chaud, mais la morale est sauve.
Un extrait intéressant avec le pianiste Joe Turner et un petit jeune qui perçait dans le métier, à quatre mains.
Ainsi que la fameuse scène qui est l'occasion d'une chanson écrite par Gainsbourg arrangée par le pianiste de jazz Alain Goraguer. Celui-ci travailla aussi avec Boris Vian et Bobby Lapointe. Même si le Lucien se plagie vaguement avec cette démarque de L'Eau à la bouche, c'est l'occasion d'entendre la voix si particulière de la future chanteuse en second du Velvet.
Née au Danemark en 1940, Hanne Karin Bayer a débuté là-bas en chantant dans les cabarets.
Venue à Paris et devenue, pour un temps, madame Godard, elle a tourné dans une bonne soixantaine de films, principalement dans les décennies soixante et soixante-dix.
Outre Jean-Luc Godard, elle fut dirigée par Jacques Rivette, Agnés Varda, Luchino Visconti, George Cuckor, Volker Schlöndorff ou Rainer Werner Fassbinder, entres autres...
Elle pousse donc régulièrement la chansonnette lors de ses apparitions, comme dans "Une femme est est une femme" (Godard, 1960) où elle entonne la Chanson d'Angela.
Ce rôle lui vaudra le prix d'interprétation au festival de Berlin.
Idem en 1963 dans "Dragées au poivre" de Jacques Baratier où elle crée La vie s'envole en duo avec Pierre Brasseur. Écrite par Serge Rezvani, cette ballade sera ensuite popularisée par Jeanne Moreau.
Mais elle connaît la renommée surtout en 1967, grâce au téléfilm et comédie musicale, Anna, de Pierre Koralnik,dans lequel elle joue une ingénue poursuivie par Jean-Claude Brialy, lui-même secondé par Gainsbourg, qui avait écrit toute la musique du film pour l'occasion. Tout le monde ayant en mémoire Sous le soleil exactementon envoie plutôt un autre extrait Roller Girl où on retrouve toutes les obsessions du moment de notre Lucien.
Sil fallait encore une preuve qu'on peut avoir été de fieffés réacs et avoir eu un talent indiscutable, en voici une de plus.
Philippe Clay "Le Désossé*" et Serge Gainsbourg, notre "Lulu", ont fait leur petit numéro le 20 février 1964 à l'émission "Demandez le programme".
Au sommaire, un inédit : "L'assasinat de Franz Lehár ".
Pour mémoire, le Franz Lehár en question (1870-1948) fut un compositeur Austro-Hongrois majeur dans un genre mineur, l'opérette. Die Lustige Witwe (La veuve joyeuse) ou Das Land des Lächelns (Le pays du sourire), c'est de lui.
Ce compositeur fut largement utilisé par le troisième Reich à des fins de propagande et il est venu diriger lui-même la version française du Pays du sourire à Paris en 1941. Grand admirateur du Führer, il n'arrivera même pas à empêcher la déportation à Auschwitz de son
librettiste Fritz Löhner-Beda.
On s'interroge encore sur la présence de son fantôme ci-dessous.
Les deux cabotins en profitent, au passage, pour nous interpréter L'accordéon, chanson que Gainsbourg avait refourgué à Juliette Gréco en 1962.
Quand on vous dit qu'ils avaient du talent...
* Clay avait tenu le rôle de Casimir le Serpentin (alias Valentin le Désossé) dans le film de Renoir French Cancan (1954).
Le « Torrey Canyon » fut le premier supertanker à provoquer une marée noire majeure, le 18 mars 1967 au sud de l’Angleterre.
Battant pavillon libérien, propriété de l'Union Oil Company of California, ce monstre chargé de 120 000 tonnes de brut s'échoua sur les îles Sorlingues.
Pris de court, le gouvernement britannique commença par envoyer des bombardiers pour tenter d'incendier le bateau et la nappe. 42 bombes rateront d'ailleurs leur cible sous le regard incrédule des riverains.
Puis l'utilisation massive de détergents se révélera un remède pire que le mal.
On estime que plus de 15 000 oiseaux et phoques furent étouffés sous le mazout au long des 200 km du littoral de Cornouailles puis de Guernesey et des côtes bretonnes, trois semaines plus tard.
Serge
Gainsbourg, en fit une
petite chanson très rhythm 'n blues trois mois plus tard, en juin
1967, enregistrée au studio Chappell de Londres et incluse dans l'album Initial B.B. Le morceau est co-signé avec David Whitaker, arrangeur musical, entre autres, des Rolling Stones. La choriste est Madeline Bell.
À part la déploration cette
première catastrophe pétrolière, c’est un chouette démontage de la chaîne capitaliste et au passage un manifeste écologiste, même si ce genre de sujet n'est pas la tasse de thé du beau Serge.
La catastrophe est résumée aux actualités britanniques à ce lien.
Admirez l'accompagnement musical digne des meilleurs films de guerre.
C'est en 1976 que Philippe Dauga, bassiste et chanteur, Vincent Palmer, guitares, chant et lunettes noires, et Dynamite Yann à la batterie, sortent de leur cave avec l'ambition de changer la face du rock hexagonal.
À cause de leurs costards et de leur rhythm'n blues nerveux, on les a d'abord pris pour des mods à la française alors qu'ils s'apparentaient à merveille à la vague de groupes de pub rock (rock de bistrot, quoi) qui secouaient les cocotiers (sic) d'outre-manche : Dr Feelgood, Eddie & the Hot Rods, Count Bishop, Sean Tyla Gang, etc.
Et d'ailleurs, tout ce petit monde du tchacapoum de comptoir et du punk naissant va se retrouver aux deux premier et uniques festivals punk en France, ceux de 1976 et 1977 à Mont-de-Marsan. Bijou y a fait des apparitions remarquées.
Contrairement à la plupart des rockers de l'époque, Bijou n'a jamais renié ses grands ancêtres, ici par exemple :
C'est en reprenant les "Papillons noirs", de Gainsbourg qu'ils s'acoquinent avec l'auteur au creux de la vague et le font regrimper sur scène pour leurs rappels. Reconnaissant, il leur écrira Betty Jane Rose en 1978.
Les voici ici réunis. Et puisqu'on citait, Dr Feelgood, nos petits gars de Juvisy ont carrément emprunté le riff de "Watch your step" au maître Wilko Johnson. On la passe en hommage aux nouveaux maîtres des USA.
Mais le parolier attitré du groupe était essentiellement Jean-William Thoury, manager du groupe.
Malgré un succès d'estime et quelques semblant de tubes comme "Rock à la radio", "Danse avec moi" ou " Ok Carole", ils se sont retrouvés victimes de la vague anti-rock des lamentables années 80. Et ils sombrèrent dans la tourmente.
Mais dans les années 2000, Dauga a remonté les Bijou SVP (lire Sans Vincent Palmer).
Il tourne encore avec Frantz Grimm (gtre) et Jo Mathis (Batt.) et ça continue (presque) comme avant. Quoi ? Le rock, une musique de vieux ?
On les retrouve avec le gars Didier Wampa en invité.
Àl'origine, "les Tueurs de la lune de miel*" sont un groupe bruxellois fondé par Yvon Vromman, Gérald Fenerberg et JF Jones Jacob, en 1974 pour aller explorer le monde de la "délinquance musicale" : parodie et déconstruction de chansons, de rockabilly, free jazz, punk, d'hymne national (la Brabançonne mise en pièce) et de fanfares de fêtes.
Ce noyau de base enregistre son premier album, Special manubre, en 1977.
Puis fusionnant avec le groupe Aksak Maboul, ils sont rejoint par Marc Hollander, Vincent Kenis et Véronique Vincent en 1980.
C'est en alternant leur nom avec celui de "Honeymoon killers" qu'ils enregistrent leurs deuxième disque et vont rechercher le gros tube du côté de chez Charles Trenet.
S'ensuit un gros succès radio accompagné d'un clip artisanal, désargenté, qui ne vieillit pas trop mal :
Ce deuxième album sera déclaré "meilleur
album de rock belge de tous les temps" par le magazine MoFo et figure
dans la liste des 10 meilleurs albums belges de l'histoire, du magazine Le Vif/L'Express. Fallait oser.
Le groupe s'est séparé en 1985 et Yvon Vromman disparaît en 1989.
En 2014, Véronique Vincent et Askak maboul sortent Ex-Futur Album, constitué à partir de bandes inédites enregistrées entre 1980 et 1983, chez Crammed Discs.
Un autre exemple de leur humour absurde, cette fois emprunté à Gainsbourg :
* Oui, en référence au film de Leonard Kastle (1970).