jeudi 29 février 2024

Crever de faim pour la propriété et sa gracieuse Majesté

 


Il est bien connu qu'une famine a ravagé l'Irlande au XIXème siècle, particulièrement entre  1845 et 1852.
On estime que cette disette fit la bagatelle d'un million de morts et en poussa un autre million à émigrer vers l'Amérique ou l'Australie.
L'île ne retrouvera un équilibre démographique qu'en...2022.
Mais quels furent les responsables ? Le mildiou qui ravagea la pomme de terre, principal aliment des fermiers pauvres ? La rapacité des propriétaires terriens qui expulsèrent à tour de bras ? La colonisation britannique qui avait morcelé les terres en guise de représailles et qui laissa crever ces "papistes" dans une indifférence flagrante tout en continuant d'exporter des aliments (détail piquant: seule la nation amérindienne Choctaw envoya des secours en Irlande. Entre occupés...) ? Le capitalisme libéral qui n'intervint en aucun cas ?
Un peu de tout cela à la fois.
Mais ce dénuement alimentaire ne fut pas plus "naturel" que celui qui sombra sur l'Ukraine en 1933 ou toute autre famine de ces deux derniers siècles. 
Une intéressante émission du "Cours de l'histoire" revient sur cette multiplicité de facteurs en compagnie des historiens Fabrice Bensimon et Karina Bénazech Wendling.
On peut l'écouter  en cliquant sur ce lien.
 
Cette tuerie a bien entendu laissé des traces dans la mémoire collective. 
Dont cette ballade narrant exil et prison, Fields of  Athenry, ici par les Dropckick Murphys, irlandais de Boston (Mass.)
 

 

Et plus accusatrice vis à vis du gouvernement anglais, une chanson de Sinead O'connor simplement nommée Famine.

lundi 19 février 2024

Les assasins de la mémoire

 

Femmes du groupe Marta, Marseile, 1945.

 

Ils sont incorrigibles ! Après Sarkozy honorant Guy Mocquet, voilà-t-il pas qu'un président dont le gouvernement mène la chasse les étrangers, passe des lois abjectes, réduit les conditions de travail et de chômage en bouillie, pose un tapis rouge à des fafs même pas repentis, laisse l'Arménie se faire dépecer et j'en passe s'en va panthéoniser le résistant arménien communiste Missak Manouchian et sa compagne pour qu'il y en ait pour tout le monde.

Mais qui croient-ils tromper ces minables ?
 
Rappelons qu'entre les Juifs de diverses origines, les Roumains, les Italiens, les Espagnols de l'armée en déroute, tous enfermés comme étrangers pernicieux et indésirables dès 1939, et même quelques Français entrés dans ses rangs, les FTP MOI étaient une belle bande métèques pas vraiment propres sur eux selon les critères de cette époque.

La preuve, comme l'écrivit sous forme d'aveu le patriote professionnel Aragon, "onze ans, que cela passe vite, onze ans".
Tu l'as dit bouffi ! Onze ans durant lesquels un parti sur une ligne nationaliste et cocardière avait "francisé" les actions des FTP de la MOI pour les redistribuer à des petits gars dont le nom fleurait plus la Bretagne ou la Bourgogne.
Et ce, que ce soit à Paris (groupe dit "Manouchian") Toulouse (35ème brigade dite "Marcel Langer") Marseille (groupe Marat) ou la région lyonnaise (groupe Carmagnole).
Alors pour des internationalistes, se faire récupérer tour à tour par la France, les volte faces du parti et désormais une bande de minables managers, voilà qui fait un peu beaucoup.
Nous crachons sur vos calculs, messieurs.
Ce qui n'empêche de réécouter la grande Monique
  

 

Et de partager ce film de MOsco de 1985 dont le PCF tenta d'interdire alors la diffusion télévisée. 
Faut dire qu'il y a là quelques approximations mais qu'est ce qu'on a aimé ces vieux !
Et puis, le film de Guédiguian était vraiment trop raté.

jeudi 15 février 2024

Une chanson d'Albert Londres

 

 
Le très fameux grand reporter Albert Londres, dont le métier, selon ses dires était de "porter la plume dans la plaie",commit, outre un nombre impressionnant de reportages plus d'une vingtaine de livres tirés de ses pérégrinations.
 Il semble qu'une de ses expériences les plus marquantes fut son séjour au bagne de Cayenne en 1923 et 1927.
Certes, ce n'était pas la première plongée dans l'univers de la misère carcérale (les Bat d'Af en 1925) mais le degré de sadisme institutionnel rencontré en Guyane le rendit fervent abolitionniste de cet enfer républicain. 
Le bagne n'est pas une machine à châtiment bien définie, réglée, invariable. C'est une usine à malheur qui travaille sans plan ni matrice. On y chercherait vainement le gabarit qui sert à façonner le forçat. Elle les broie, c'est tout, et les morceaux vont où ils peuvent. (Au Bagne, 1923)
Une autre rencontre fondamentale pour lui, fut celle du forçat Eugène Dieudonné, condamné pour appartenance à la Bande à Bonnot, ce que tous les autres anarchistes avaient farouchement nié, y compris au pied de l'échafaud ou avant de tomber sous les balles. 
En 1928, il écrivit L'homme qui s'évada en son honneur et fit campagne pour la grâce d'un des rares bagnards ayant réussi son échappée.
Utilisant tous les moyens à sa portée, le journaliste écrivit même une chanson qui sortit en 1928, interprétée par Lucienne Boyer, artiste alors fort en vogue (même si ce fut édité par Columbia).
Elle fut fort à propos, intitulée La Belle :

Évadé en 1926, amnistié suite à cette campagne de presse, Dieudonné témoigna à son tour dans son ouvrage, La vie des forçats, en 1930 et joua son propre rôle dans un film du surréaliste Brunius en 1934 (Autour d'une évasion).
Achevons cet hommage à un honnête journaliste par une version nettement plus contemporaine prise en charge par les inévitables Parabellum. Bientôt 10 ans que tu es parti, Schultz, c'est fou ce que le temps passe !

dimanche 4 février 2024

Wayne Kramer (1948-2024)

 

J'ai passé cinquante ans de ma vie à jouer la musique du MC5. Quand j'ai commencé, je n'avais même pas mon permis de conduire. Mais j'avais une guitare et des potes qui voyaient le monde comme moi. On se retrouvait dans la cave de ma baraque à Detroit pour jouer. On a créé cette musique ensemble.
La musique du MC5 est ce que j'ai fait de plus mémorable. L'album Kick out the jam à tellement compté pour moi et a continué à compter énormément à travers les décennies et continents. 
Alors, bienvenue gens du monde entier, de tout âge, couleur ou genre dans la musique.
Wayne Krambs aka Kramer
 
 


  

 "D'un point de vue esthétique, nous avons connu un énorme succès. D'un point de vue économique... il n'y a pas eu de succès. Il s'agissait de la musique du futur et malheureusement, le groupe n'avait pas de futur."

  



mercredi 24 janvier 2024

Du côté de l'élite

 

"Je suis toujours été en faveur de l'IVG"
 
Gérard Larcher, président du Sénat,* entendu hier à la radio.

* Ce qui laisse supposer qu'il est allé un peu au-delà du certoche.
 

mardi 9 janvier 2024

Gesundheit über alles !

 


En guise de billet tardif de début d'année, on aurait pu faire un constat désabusé du monde tel qu'il ne va pas.
Ce ne sont pas les sujets qui auraient manqué, des colossaux massacres à Gaza que certains prolongent sous prétexte d'aide humanitaire (remember Sarajevo ?), d'une guerre où l'Occident est prêt à combattre l'impérialisme le plus ignoble jusqu'au dernier Ukrainien à condition que ça ne lui coûte pas trop cher, d'une loi abjecte passée par un gouvernement qui ne fait même plus semblant (on croit avoir touché le fond avant de constater qu'il n'y a pas de fond), de la multiplication de guignols atroces au service du capital devenant démocratiquement chefs d'État, etc. 
On aurait même pu trouver des raisons d'espérer lorsqu'une Kurde nommée Roya Heshmati donne une leçon de dignité à une bande de fascistes libidineux.
Mais non, on partage notre stupéfaction sur tout autre chose.
Ami des années 1990, vous vous souvenez de Rage against the machine (rebaptisés par les anti tech pyrénéens Ariège against the machine) ?
Mélange de heavy punk, de funk et d'un soupçon de hip hop, ces Californiens firent fureur chez les jeunes gens par un gauchisme parfois de bon aloi.
Ou comment faire un tube mondial sur une triste réalité : la flicaille flingue. 
 
 
Quelle ne fut pas notre surprise de découvrir où va se nicher le refrain "Fuck you! I won't do what you tell me". 
Il semble que le petit père Kim Jong-Un goutte assez ce succès de 1992.
Aussi, le voir joué par un grand orchestre, devant un parterre de zombis en uniforme avec un fond de scène à base de symboles phalliques ravageurs, nous a laissé entre la jubilation la plus infâme et la tristesse la plus légitime.
Il faut dire qu'à Pyongyang, on swingue méchamment. Normal, une fausse note et te voilà au violon vite fait. 
On en est resté tellement baba qu'on se demande encore s'il s'agit d'un génial détournement à base de montage serré ou si cette séquence a vraiment existé, auquel cas, on le répète, il n'y a vraiment plus de fond à toucher.
Nous livrons l'objet de notre perplexité à votre sagacité.


Notre cher Kaurismaki, qui avait offert à la population d'Helsinki un concert des Leningrad Cowboys accompagnés par les chœurs de l'Armée Rouge peut aller se rhabiller. 
Allez, que l'année vous soit tout de même moins pénible que la précédente.


vendredi 22 décembre 2023

Surprenante reprise de Serge Lama

 

La colère selon Paul Strand

L'actualité étant trop dégueulasse, on s'est payé une tranche de nostalgie d'un monde disparu et certainement pas meilleur.
Avant de se prendre pour Napoléon et devenir une sorte d'incarnation du beauf giscardien Serge Lama avait écumé les cabarets de la rive gauche et ouvert pour Barbara, Brassens ou marcel Amont.
Plutôt que de chanson réaliste, on qualifiera son cas d'auteur de chansons populistes au sens où on l'entendait avant que le mot ne fut mis à toutes les sauces. Ce qui a donné le pire comme, parfois, le meilleur.
Prenons le cas de Les glycines (1973), co-écrite avec Yves Gilbert et apparue sur le 33 tour Je suis malade.
Le cadre en est un monde paysan à l'agonie où la seule promotion sociale consiste à se barrer chez la classe ouvrière. C'était aussi le temps où Gilles Servat chantait On manque toujours de prolétaires. S'ils avaient su...
Rajoutons à ce tendre tableau la misère sexuelle, un soupçon d'inceste entre cousin cousine et les mots qui ne sortent pas, on comprend qu'à l'époque une partie du public adopta cette chanson pathétique au croisement de la chronique sociale et du misérabilisme.
Fin de l'explication de texte.
Quelle ne fut pas notre surprise de retrouver ce morceau interprété par un groupe de punk confidentiel des années 1990, 10 Petits indiens. D'abord signés chez Island, puis Boucherie prod. Isabelle Voisin, Frédéric Cormier, Philippe le Bour, Papi et tougoudoum ont commis trois albums entre 1992 et 1996. 
Il semble qu'ils se soient reformés depuis mais on avoue notre ignorance.
En tout cas, ils auront fait swinguer Lama.