Surprenant à quel point, à l'occasion de son cent-cinquantenaire, la Commune de Paris fait recette et pas uniquement dans la presse de gauche et bien pensante. Ça prend même des airs d'enterrement qui ne sont pas sans nous rappeler d'autres commémoration d'il y a plus de trente ans, en 1989.
Il semble que comme, par exemple, George Orwell, cette révolution écrasée serve de consolation à bien des bons bourgeois démocrates.
Faut-il rappeler que ce sont parfois les mêmes qui adulent Jules Ferry, Gambetta, voire Clemenceau, qui viennent aujourd'hui verser une larme de crocodile sur le mur des Fédérés ?
Et que c'est bien la République qui écrasa la Sociale avec tout son savoir-faire.
Mais journalistes policiers vomissant leur eau-forte et récupérateurs grouillent comme un tas de verrues sur la cadavre des vaincus (merci pour les images, Eugène).
Rappelons une réalité vue par un témoin :
Les gens du quartier commencent à sortir, ils vont prendre connaissance de ce qui se passe dehors. Ils reviennent avec des récits épouvantables. La berge du fleuve est parsemée de cadavres, les rues aussi. Dans certaines cours, des corps morts sont amoncelés. On emporte les carcasses par charretées pour les enfouir dans des fosses profondes qu'on recouvre de chaux vive. Ailleurs, on les asperge de pétrole puis on les brûle. On a vu des convois de dix à douze omnibus remplis de débris humains.
Un ami qui nous apporte des renseignements montre les semelles de ses bottines imprégnées de sang.
Des deux côtés de la Seine, un filet rouge coule le long des berge.
Elisée Reclus La Commune de Paris au jour le jour (27 mai)
cité par Michèle Audin dans La semaine sanglante (Libertalia)
Puisqu'on paraphrasait Pottier, son Jean Misère par Mouloudji (1971)