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vendredi 2 février 2018

Sous les toits de Paris

Un flic se cache dans le paysage

Délicieux film de René Clair de 1930.
Datant du début du cinéma parlant, ce film, à la limite du muet et de la comédie musicale, est, selon Georges Sadoul, un manifeste contre le "théâtre filmé" à caméra fixe du début du cinéma sonorisé.
Autrement dit, l'arrivée du "parlant" donne lieu à un cinéma bavard à la Guitry ou à la Pagnol, dans les meilleurs cas, jetant aux orties la créativité et la poésie du cinéma muet.

René Clair a tourné un film hybride, aux mouvements de caméra virevoltants mais surtout, n'a pas hésité pas à faire la part belle à la musique : de longues séquences sonorisées s'interrompant subitement pour faire place à des scènes gesticulées en musique. Particulièrement si un obstacle (porte vitrée de bistrot, fenêtre) vient se placer devant la caméra.
Et à l'inverse deux séquences : les ébats de deux tourtereaux dans une chambre et une bagarre de rue, sont entièrement obscures, uniquement compréhensibles par le son et les dialogues.
Un film tout aussi novateur que Les temps modernes de Chaplin. Juste qu'il est sorti six ans plus tôt.


 Le long travelling du début du film


Narrant les tribulations de marginaux, chanteur de rue (Albert Préjean), petit voleur (Edmond Gréville), cambrioleur (Bilboquet) ou carrément maquereau (le génial Gaston Modot) confrontés aux amours d'une Roumaine tout à fait délurée récemment arrivée en ville (Pola Illéry), évoquant un Paris des cours et des apaches déjà disparu, le film fut plutôt un bide en France mais pas en Allemagne où l'expressionnisme avait creusé les sillons.
Une scène de bal musette :



Comme dans bien des films de ce temps, il resta la chanson.
Interprétée, avec plus ou moins de bonheur selon le cas, par Préjean, en chorale, par les locataires d'un immeuble, elle est un fil conducteur de l'histoire. La musique fut écrite par Moretti et Préjean l'enregistra en microsillon.

mercredi 19 juillet 2017

L'Opéra de quat' sous (2) Le bon vieux temps

Que font un flic et un truand lorsqu'ils se rencontrent ?
Dans une maison close de Turnbridge, ils se tombent dans les bras et évoquent leurs souvenirs de régiment. Et dans l'Opéra de Quat'sous, ils le célèbrent en chantant Der kanonen Song. Un duo entre le policier Brown et le truand Macheath (ou Mackie selon les latitudes) signé Weil / Brecht.
Extrait de l'Opéra joué à Francfort en 2007 par l'ensemble Modern (chef d'orchestre Nacho Paz)



Si on a choisi celle-ci de commencer par cette interprétation, c'est qu'en version française elle est souvent trop grandiloquente (on ne dénoncera personne) ou un peu molle à notre goût. Finalement, parmi toutes on préfère, encore l'originale, celle de Florelle, enregistrée en 1931. Notons au passage l'incontestable infériorité de l'adaptation en français de Steinhof et Mauprey par rapport aux paroles originelles en allemand utilement sous-titrées ci-dessus.



Et pour rappel une séquence du film de Georg Wilhem Pabst avec Albert Préjean et Jacques Henley, 1931 aussi :


vendredi 29 avril 2016

L'opéra de Quat' sous

« Un ancien chef de la police fera toujours un bon directeur de banque. »

 
 
  L’Opéra de quat’sous, (Die Dreigroschenoper) est le chef d’œuvre de Bertold Brecht et Kurt Weill, le premier s'étant largement inspiré du Beggar's Opera de John Gay (1728)
Son cadre est une lutte d’influences entre  mendiants, pègre et police de Londres. Une plongée dans les bas-fonds...

Sorti à Berlin en 1928, il ne sera joué en France qu'en...1939 !
Vu sa renommée, une version filmée est tournée en 1931. La Warner, qui produisit le film, choisit Georg Wilhem Pabst pour le réaliser. Il avait déjà une certaine réputation : La rue sans joie avec Greta Garbo ou Loulou avec Louise Brooks. Le film est grinçant: bourgeoisie, police, idéologie dominante sont passés à la moulinette et cet anarchisme primitif l'a fait censurer partiellement en France et descendre en flammes par des critiques de la presse de droite comme de gauche.
Chez les nazis (avec qui Pabst s'acoquinera pourtant par la suite) ce fut encore plus simple : Strecklich VERBOTEN !
Curieusement, deux versions ont été réalisées simultanément, l’une allemande et l’autre française. Il semble que ça se faisait à l’époque.
Préjean et Pabst

La partie musicale du film est prétexte à des scènes de transition entre les différentes parties. L'interprétation reste encore et toujours émouvante et burlesque (le chef de la Police particulièrement gratiné).
Une chanson est devenue mondialement connue, celle de l'ouverture goualée au théâtre par un musicien de rue : Die Moritat von Mackie Messer, en anglais Mack the knife et en Français La complainte de Mackie.
Ce sont surtout les immenses versions jazzy de Louis Armstrong puis d'Ella Fitzgerald qui la populariseront partout. 
Mais la première version fut bien évidemment celle de Lotte Lenya (à l'époque madame Kurt Weil). Et c'est Florelle (Odette Rousseau 1898-1974) qui se chargera du morceau en français et du rôle de Polly à l'écran.
Mais qui mieux que Damia pouvait interpréter ce morceau d'anthologie ?
La "tragédienne de la chanson" enregistra cette version pour la Columbia en 1931.




Une surprise : du temps giscardisme faisandé, à l'heure où, chaque dimanche, la France rotait et pétait avec Jacques Martin, on avait parfois, en guise de lot consolation, l'apparition de la grande chanteuse italienne Milva pour interpréter le rôle de Polly la serveuse, alias Jenny des pirates.



Mesdames et messieurs, ne reculant devant aucun sacrifice, la maison vous offre une rareté pour la fin : l'Ange Noir, l'Homme à la Cadillac, le loser absolu, le king du nunchaku, Vince Taylor, lui-même, reprend, en direct, la complainte de Mackie à la télévision le 28 avril 1962 !