lundi 13 octobre 2025

The Smugglers : rock de proximité

 

Il était une fois quatre gars plus vraiment dans le vent qui décidèrent, malgré leurs multiples activités annexes, de combattre l'ennui et la médiocrité ambiante par tous les moyens à leur portée.

Ainsi naquirent les Smugglers (en français passeurs, contrebandiers) aimable combo de rythm'n blues à tendance punkisante voire rockabilly s'ils sont en forme. 
Passant d’une balade libidineuse à un blues mexicain, d’un rock alcoolisé à un chant de voyou de la Belle époque, d‘un hymne aux guérilleros à un country folk en hommage à l’espoir nos lascars (Nick Zegrick à la basse, Champion Jack Thierry à la guitare, Mojo Guitou à l'harmonica et Julio V. au chant) se mirent donc à écumer irrégulièrement* les bistrots du midi toulousain, les bonnes causes à défendre ou un piquet de grève si on en trouve encore un qui tient.
Malgré les crins poussant dans dans leurs mains, nos lascars ont fini par laisser une trace en espérant que la postérité se montrera bonne fille.
Après tout, si Sixto Rodriguez est arrivé à réaliser un comme-back en Afrique du Sud**, qu'est ce qui les empêcherait de devenir cultes et reconnus en Albanie ou au Paraguay ?
En attendant cette future glorieuse tournée, on peut toujours les entendre en cliquant à cette adresse, sachant que tout téléchargement y est gratuit et fortement encouragé. 
Afin d'illustrer le propos, voici leur première vidéo sur le tube : un hommage aux guérilleros anti-franquistes tout comme au groupe de Pampelune, Barricada.
Avec par ordre d'apparition (hélas, de disparition serait plus juste) sur les images... Bah, on vous le dira pas ce coup-là.


De l'aventure, de l'amour, de la fureur, de la dérision, donc.
Ça tombe bien, ils seront au Bistro Ducoin (40 rue du gal Compans, Toulouse) jeudi prochain, le 16 !
Ah ! Bien entendu les trois gugusses de l'affiche ne sont pas le groupe annoncé. Qui sont-ils donc ? Sachez juste que la photo fut prise aux États-Unis en 1977.


Et tant qu'on y est, quelque part entre Muddy Waters et Guy Debord, un classique

* Ça leur va si bien !
** Vu dans un documentaire que nous soupçonnons fort d'être bidonné ( Sugar man, de Malik Bendjelloul, 2013) 

mardi 30 septembre 2025

Le 2 octobre mexicain

 


S'il est une maxime toujours vivace à Mexico, c'est bien "Nous n'oublierons pas le 2 octobre". Ce qui fait référence à "la nuit de Tlatelolco" ou la tuerie qui mit le point final à la rébellion de la jeunesse mexicaine en 1968.
Tout avait commencé là-bas au mois de juillet, le 22. Le feu aux poudres avait été allumé par des bagarres entre diverses bandes d'étudiants et des porros, gros bras chargés par le parti au pouvoir de faire le ménage des éléments contestataires à la matraque, tous ces jeunes gens ayant ensuite été brutalement dispersés par la police anti-émeute.
1968 était aussi l'année où le président Gustavo Díaz Ordaz s'était payé SES Jeux Olympiques qui débutaient le 12 octobre et était prêt à tout pour que ceux-ci soient la vitrine d'un pays triomphant (ça vous rappelle rien ?).
Rajoutons que ces années furent celles d'une expansion soudaine de la ville de Mexico et que les étudiantes et étudiants qui se répandaient dans les rues étaient petit à petit rejoints par des jeunes prolos et marginaux ravis de défier le pouvoir (ça vous rappelle rien ?).
Durant tout le mois d'août, les rues de la capitale, puis des autres villes du pays, furent envahies de manifestations contre la répression et un régime sclérosé soi-disant héritier de la Révolution de 1911-1920 (qui fut, en fin de compte, la confiscation du pouvoir par des propriétaires du Nord).
Le côté remarquable étant qu'aucun leader n'était apparu et que le seul organe menant ce combat était le Comité national de grève (CNH) formé d'un groupe de 250 représentants des écoles en excluant tout parti politique.

Bus incendié au cours des affrontements  
Dès l'origine, ce mouvement, qui réclamait essentiellement un peu d'autonomie et de démocratie, la libération des prisonniers et la dissolution de corps répressifs (dont les sinistres granaderos) fut traité par l'État comme "tentative subversive téléguidée de l'étranger pour instaurer un régime communiste" et ses participants de "délinquants, terroristes et dangers sociaux" (ça vous rappelle toujours rien ?).
Ce qui fait que le niveau de répression fut particulièrement élevé, surtout dès la nuit tombée, le gouvernement n'hésitant pas à envoyer l'armée fédérale contrôler la rue. 
Blindés sur la place du Zocalo
 
Les troubles ne faiblissant pas et la date des JO se rapprochant, l'État mit les bouchées doubles : fin septembre, la soldatesque s'empare de l'Université Autonome (UNAM) au sud et de l'Institut Polytechnique National (IPN) au nord de la ville, école fréquentée par des étudiants plus pauvres et qui donnera une nuit d'affrontements sanglants.Suite à cette répression, le CNH appela à un meeting géant près de l'IPN, sur la place dite "des trois cultures" (on y trouve un reste de pyramide aztèque, une église espagnole et des immeubles modernes et moches) plus connue comme place Tlatelolco (comme ça se prononce). 
Le quartier étant cerné par les troupes fédérales, un groupe paramilitaire (le bataillon "Olympie") se chargea d'ouvrir le feu sur les soldats depuis toits et terrasses suite à un signal lancé par un hélicoptère, atteignant même le général commandant le dispositif.

La réponse fut immédiate : les fédéraux mitraillèrent copieusement la place, laissant environ plus de 300 cadavres (qui furent aussitôt escamotés), commirent plusieurs exécutions sommaires dans les appartements alentour, procédèrent à des arrestations massives (la plupart des prisonniers ayant atterri, au secret, au camp militaire n°1) et achevèrent ainsi violemment cette révolte de la jeunesse mexicaine. 
L'État reconnut officiellement 4 morts et les JO s'ouvrirent en grandes pompes le 12.
Un procès monstre fut ensuite monté contre les prétendus "auteurs intellectuels" du mouvement (dont l'écrivain communiste dissident José Revueltas) et on envoya des centaines de gens moisir à la prison de Lecumberri avant une amnistie de 1971.
Il fallut attendre 1998 pour qu'une commission d'enquête soit mise en place (mais les archives avaient magiquement disparu) et 2002 pour que l'État reconnaisse un semblant de responsabilité.
Depuis les années 1980, ce massacre est commémoré chaque 2 octobre par des manifestations, généralement agitées, devenues le rendez-vous de la jeunesse (mais pas que) en colère.
Une des dernières séquelles de la tuerie fut la disparition des 45 étudiants de l'école normale d'Ayotzinapa (Guerrero) en 2014. Ces jeunes gens s'étaient emparés d'autobus pour se rendre à la manif du 2 à Mexico avant d'être interceptés à Iguala par des policiers, confiés à des narcos et disparus à côté d'un camp militaire.
À l'heure actuelle, on en est encore là... 

À titre d'illustration musicale, le chanteur agitateur de rue José de Molina (ici d'après une VHS de 1995) dans En esta plaza. On vous laisse son long discours avant. 


Et les rockers chilangos de La Maldita Vecindad commémorant eux aussi le 2 octobre.

La place Tlatelolco le 3 octobre au matin

Et suite à un commentaire, on rajoute les Salario Minimo (nom de groupe utopique)

mercredi 10 septembre 2025

C'est un bon jour pour bloquer

Gare de Saragosse oct 1934


On va enfin savoir si la plèbe a encore son mot à dire ou si les militants se contenteront de leur happening.
Et quoi de mieux, pour y aller en sifflotant, que ce bon vieux Joe qui nous manque encore (boomer, va !).
À tout de suite dans la rue ou au violon !
 

Même gare côté extérieur


vendredi 5 septembre 2025

Un docu sur OTH

 


On vient tout juste d'envoyer un morceau d'OTH sur ce bric-à-brac (ci-dessous) et en le recherchant, voilà-t-il pas qu'on a découvert que le seul et unique documentaire sur ces gloires du rock'n roll montpelliérain et au-delà, celui de Jérôme Prudent vu à FR3 à l'époque, a été posé sur YouTube.
Y'a donc pas de raisons de ne pas partager.
Et comme disent des potes : "ce qu'il a de bien avec eux, c'est qu'ils n'étaient pas prétentieux, pas comme... (suivez mon regard), que c'était une belle histoire d'amitié et que le succès ne leur allait vraiment pas."
Non seulement j'approuve ce message mais j'ajoute que c'est pour ça qu'on les aimait et que c'était un putain de groupe de scène.
Tous ceux et celles qui ont assisté au fameux concert du Bikini (l'ancien) où, à la demande générale ils on rejoué le concert intégralement et où la condensation atteignit un tel stade qu'il pleuvait à l'intérieur savent de quoi je parle.




Domi (Villebrun, guitare) est mort en 2016 et Beubeu (Banon, batteur qu'on avait vu officier derrière Comelade) en 2019. Les images de Dom viennent leur ultime répétition en 1991.
On les retrouve ici après la séparation du groupe tous deux d'accord sur leurs rapports avec la belle famille du showbiz.

samedi 30 août 2025

Désolation

 


Résumons l'affaire : le 10 septembre le pays est censé être paralysé suite à un appel d'on ne sait qui (ou parfois trop bien). Les journaleux qui font normalement silence dans ces cas en ont rajouté durant tout ce mois d'août. Frustrés d'avoir raté le train jaune des gilets, les récupérateurs divers et avariés sont déjà sur les rangs sans même réaliser à quel point leur présence seule fait office de repoussoir. 
Certes, on n'est jamais à l'abri d'une divine surprise et ce serait trop con de ne pas attiser les braises. Quitte, pour une fois, à tenter d'être là où on ne nous attend pas.
Pour désamorcer, la crise annoncée le ravi de Bétharam se suicide politiquement remplissant à merveille son rôle de fusible. Son honneur s'appelle certainement fidélité (point Godwin, on sait).
Par ailleurs, les syndicats qui font tout pour ne surtout pas déranger ont appelé à la grève... le 18 !
Alors oui, on se méfie des prédictions soi-disant auto-réalisatrice et il y aura des fafs, des pénibles, des staliniens divers, des complotistes, mais que voulez-vous, face à ce monde lamentable, il faut bien commencer (continuer ?) quelque part.
À bientôt donc sur les barrages.

Quant aux gesticulations politico-syndicales :

vendredi 20 juin 2025

On a chanté les narcos avec talent (il y a longtemps déjà)



Le film de 1978
 
Un des nombreux charmes du Mexique est la vivacité toujours réelle des corridos.
Équivalents à nos anciennes complaintes, ces chansons dont l'origine remonte à la colonisation espagnole sont des chroniques obéissant à quelques règles musicales qui narrent les faits divers, les bouleversements politiques, les faits glorieux, dérisoires ou catastrophiques parvenus dans le pays, la région, le quartier.
La longue tradition de banditisme mexicain a été bien entendu un des thèmes centraux de ces chansons populaires alors propagées toujours encore par des musiciens ambulants mais désormais popularisées par les radios, l'industrie du disque puis internet. 
Et voici l'entrée en scène du plus populaire des groupes de corridos, señores y señoras, j'ai nommé Los tigres del norte :

Bon goût typique du Nord

 Aussi incroyable que cela paraisse, cet ensemble de 
musique norteña, c'est à dire du Nord, avec accordéon omniprésent, fondé en 1968 au Sonora (État historiquement de narcotrafic) a dans le pays toujours une popularité seulement comparable ailleurs à Oum Kalthoum, Édith Piaf ou Johnny Cash.
Talentueux, non dépourvus d'une bonne dose de démagogie, les Tigres chantent, comme tout bons Mexicains la vie quotidienne, les amours malheureuses, la vie des migrants, les rapports conflictuels avec le voisin du dessus (présentement Trumpland) des saloperies politiques nationales et surtout... des histoires de voyous.
Coup de maître en 1974 : Contrabando y traición (contrebande et trahison) aventures d'un couple infernal qui s'achève par un meurtre amoureux (où c'est la femme qui flingue l'homme) dans une ruelle californienne. Cette chanson accouchera de deux suites en zizique (Ya encontraron a Camelia et El Hijo de Camelia), de trois romans, d'un film (Contrabando y traición, Camelia la Texana, 1975), d'un opéra (Únicamente la verdad) et de droits d'auteur qui auraient dus plonger le groupe dans une saine inactivité.
Mais en 1975, re-belote selon la même recette : La banda del Carro rojo va devenir le morceau qui tourera en boucle pour une trentaine d'années au moins.  
L'histoire (imaginaire) des frères Rodrigo y Lino Quintana et de leurs deux complices forcés par l'injustice sociale et les dettes à se convertir en trafiquants et qui en paieront le prix sera reprise par tous les groupes de baloches du pays.
Faut dire que le texte est assez habile pour poser une situation : Il paraît qu'ils venaient du Sud / dans une bagnole écarlate / chargée de 100 kilos de coke / en route vers Chicago... Ainsi le dit le mouchard / qui les avaient balancés.
Ou pour la conclure dignement : Et "Nino" Quintana disait / Ça devait arriver / mes copains sont morts / ils ne peuvent plus se mettre à table / et je le regrette, shérif / mais je ne sais pas chanter. 
Avec même la morale de rigueur : Des sept qui y sont passés / Il n'est resté que des croix / Quatre étaient de la bagnole rouge / les trois autres du gouvernement / Pour ceux-là, vous en faîtes pas / ils rejoindront Lino en enfer.


Évidemment, ça va donner un aimable nanard en 1978, réalisé par Rubén Galindo, un genre de Sam Peckinpah du pauvre.... 


Mais surtout ça va déboucher sur un certain nombre de reprises, y compris par des groupes de rock qui ne peuvent qu'être séduits par ces destins de hors-la-loi.
Et voici donc le type même de la reprise intelligente par La Barranca de Mexico sur un disque d'hommages aux Tigres en 2001.


Bon, inutile de préciser qu'au Mexique, le narcotrafic est devenu tout sauf folklorique depuis, qu'il a gangréné la société à tous les niveaux et que les chansons sont devenues vulgaires, grossières et à la gloire de parrains qui payent sans compter.
Au moins, les Tigres inventaient-ils leurs chroniques...

vendredi 30 mai 2025

Enfumage

 

Délinquants de bas étage

Il est assez croquignolet de constater que la même semaine où est officiellement rétabli l'usage de pesticides jamais éradiqués, où on reprend l'autorisation des méga bassines, où on apprend que l'absurde autoroute Toulouse-Castres va repartir de plus belle, la plus urgente tâche de notre ministre de la santé soit de traquer les fumeurs en plein air que ce soit sur les plages, dans les parcs et jardins ou à proximité des établissements scolaires (c'est beau comme du Churchill en 1940). Vous allez voir que les mômes finiront par s'en griller une dans les chiottes de leurs écoles, comme dans les films en noir et blanc.
Ah oui, nos petits génies suppriment aussi les ZFE pour pas pénaliser les pôvres. Et curieusement, l'augmentation du prix des clopes ne réserve toujours pas le cancer aux hautes sphères de la société car ces cons de gueux n'entendent toujours pas perdre leurs honteuses manies. 
Certes, il existe de multiples sujets tellement plus cruciaux et tragiques.
Mais avouez que dans le genre foutage de gueule et bonne conscience à deux balles, ça se pose un peu là...  
Le mot mascarade est encore faible. 
Enfin, ça aurait pu être pire, au lieu de naître en Absurdie on aurait pu voir le jour, je sais pas moi, au hasard à Gaza ou dans un camp réservé aux Sahraouis. 
Allez, honneur aux Dames :