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vendredi 22 mai 2020

De l'héroïsme

Gloire au travail !
Ce qui est très pratique avec les héros, c'est qu'ils ne coûtent pas si cher que ça.
Chair à canon collective au nom de laquelle des fabricants de monuments aux morts font fortune ou chair à travail qu'on glorifie puis à laquelle on accorde éventuellement une prime, un timbre poste ou une médaille en chocolat, le destin historique du héros est d'être mort, mutilé ou balayé sous le tapis.
Les trois en même temps, si possible. Après y'a plus qu'à lancer des appels d'offre chez les statuaires.


Le meilleur résumé de ce état de fait m'a été donné par un mineur asturien : "Chaque fois qu'on nous traite de héros et de fer de lance de la classe ouvrière, je me demande par où on va nous niquer."
Tant que nos maîtres bombarderont des exploités d'appels à l'héroïsme et qu'il se trouvera parmi ces derniers des crétins pour aller défiler au pas en souvenir du casse-pipe où on les a envoyés, tout restera à régler.
Une fois cette question entendue, on préfère adopter la position des Stranglers*, vilains petits canards du punk, en 1977 : No more heroes.



Puisqu'on aime, on ne compte pas. Une reprise en castillan de ce bon vieux Loquillo accompagné d'Hugh Cornwell, des mêmes Stranglers en guest. Vous remarquerez que si en anglais on cite volontiers Trotsky et Lénine, en espagnol, ce serait plutôt Durruti et le Quijote. Vivement que cette putain de frontière soit rouverte.


* Dont le clavier, Dave Greenfield n'a pas survécu à l'épidémie en cours.

mercredi 20 juillet 2016

Un peu de lecture pour fêter l'anniversaire

Photo tirée du film "Los aguiluchos de la FAI"

Bruno Salvadori est un jeune anarchiste italien, vagabond, qui comme tant d'autres a fui sa terre d'origine et de chemises noires et doit échapper à la police politique fasciste, l'OVRA.
Il se trouve à Lerida, en Catalogne, lorsque le putsch éclate en Espagne, le 18 juillet 1936 et que la révolution libertaire déferle sur la région. Bruno, devenu Antoine Gimenez,* prend le train de la révolution en marche et s'engage dans un groupe de miliciens de la colonne Durruti venus de Barcelone pour reprendre Saragosse aux fascistes.
Extrait des carnet de Gimenez :
 En 1936, j’étais ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui un marginal : quelqu’un qui vit en marge de la société et du code pénal. Je croyais être un anarchiste. Je n’étais en réalité qu’un révolté. Mon action de militant se limitait à faire passer la frontière à certaines brochures imprimées en France et en Belgique, sans jamais chercher à savoir comment on pourrait reconstruire une nouvelle société. Mon seul souci était de vivre et de démolir l’édifice existant. C’est à Pina de Ebro, en voyant s’organiser la collectivité, en écoutant les conférences données par certains copains, en me mêlant aux discussions de mes amis, que ma conscience, en sommeil depuis mon départ d’Italie, se réveilla.

S'étant enquillé la guerre au sein du Groupe International de la colonne Durruti, puis dans la 26ème division (les mêmes en version "militarisée"), ayant connu la déroute, l'occupation de la France, la résistance, le désormais Gimenez va s'établir à Marseille et devenir maçon. C'est à la demande d'une petite-fille adoptive, en 1974, qu'il va rédiger ses souvenirs de la période 1936/1937 au sein des miliciens anarchistes.

Ce témoignage de première main sera refusé, méprisé par les quelques éditeurs libertaires de l'époque, trop cul-serrés et orthodoxes pour admettre que des jeunes gens en train de changer le monde et qui frôlent ou embrassent la mort tous les jours ne se consacrent pas à la révolution à plein temps et profitent de l'occase pour se livrer à une saine activité : l'amour sous toute ses formes.**  Qui a dit que les années soixante-dix étaient débridées ?
C'est en 2006 qu'un groupe de passionnés, qui se baptise "Gimenologues," va non seulement faire éditer les carnets d'Antoine sous le titre "Les Fils de la nuit"*** mais y adjoindre un appareil de mise en perspective historique, politique, biographique des personnages cités qui atteint le double du récit d'Antoine.
Le bouquin originellement paru chez les camarades de l'Insomniaque étant épuisé depuis belle lurette, les furieux l'ont fait reparaître, augmenté, sous forme de coffret chez les camarades des éditions Libertalia.
Mille pages et le cd de l'émission radio originelle qui servit de base à l'idée de l'ouvrage à un prix relativement prolétarien. On arrête là avant de se faire accuser de copinage flagrant.
Une citation pour la route :
Le groupe [international] fut formé avant qu’il ne soit question d’accorder une solde aux miliciens. (...) la plupart de ses membres avaient abandonné leur profession et leurs occupations habituelles pour accourir en Espagne. Bianchi, le voleur qui offrit le produit de ses cambriolages pour acheter des armes. Staradolz, le vagabond bulgare qui mourut en seigneur. Bolchakov, le makhnoviste qui, bien que sans cheval, perpétua l’Ukraine rebelle. Santin le Bordelais dont les tatouages révélaient la hantise d’une vie pure. Giua, le jeune penseur de Milan venu se brûler à l’air libre. Gimenez aux noms multiples qui démontra la puissance d’un corps débile…. » (Mercier Vega, alias Ridel, en 1976).

Première pause musicale cafardeuse par ce vieux rocker de Loquillo.
Petite précision lexicale : les "naranjeros" ne sont pas des orangers mais les mitraillettes espagnoles type MP 18.

Et comme si cette réédition fort bienvenue ne suffisait pas, les Gimenologues sortent, chez les toujours camarades de l'Insomniaque, un ouvrage retraçant l'itinéraire de quatre anarchistes aragonais dont l'histoire est reconstituée par ces rescapés ou leurs descendants.
Comme désormais de coutume, ces récits sont suivis d'une histoire et analyse de la mise en place du communisme libertaire en Aragon (qui a duré quatre fois plus longtemps que la Commune de Paris) et de quelques éclaircissements sur la question de la violence révolutionnaire ainsi que la fabrication de la "légende noire" anarchiste. D'actualité ?

On ne vous expliquera pas ici la raison du titre étrange de l'ouvrage qui fait référence à une blague du XIXème siècle. Lisez le bouquin, volez-le ou commandez-le à votre bibliothèque municipale si en plus d'être fauchés vous êtes maladroits. 

Deuxième pause par le groupe navarrais  "Virus de Rebelion" en 1986



* La plupart des combattants internationaux en Espagne ont des pseudonymes, que ce soit pour éviter des représailles à leurs familles ou pour se ménager un avenir en cas de malheur. À l'instar d'Antoine, ces noms de guerre deviendront parfois leur nom d'usage.
** Hilarant passage où, tout comme Orwell, Gimenez se retrouve à Barcelone en mai 37 au milieu des affrontements entre staliniens et révolutionnaires. Mais à la différence de l'Anglais, il se trouve aux prises avec deux demoiselles dans une piaule et rate ainsi la plupart de ces événements historiques.
*** "Hijos de la noche" est le nom employé pour qualifier les groupes de franc-tireurs, saboteurs et guérilleros en général dans les troupes républicaines.

samedi 23 avril 2016

Loquillo : Brassens en rock et en castillan


José Maria Sanz Beltran est mieux connu outre-Pyrénées sous le pseudo de Loquillo.
La presse espagnole l'a parfois abusivement comparé à Johnny Hallyday, certainement à cause de sa longévité dans le milieu du rock national.
Sauf que... cette grande bringue à l'allure de cigogne a commencé sa carrière bien plus tard, à la fin des années 70 à Barcelone, loin des tendances variétoches et rumba de l'époque en mélangeant rockabilly et punk avec ses groupes d'alors, Los Intocables puis Los Trogloditas.
Même s'il est un plus posé depuis, imaginez-vous jamais ouïr un jour notre Johnny cacochyme se mettre à reprendre les Clash (reprenant eux-mêmes Bobby Fuller) ou les Stranglers du début ?
Ou chanter des hommages à Durruti, Puig Antich, aux miliciennes de 36 et à Sancho Panza !
Un rocker à l'ancienne donc, autoproclamé star, un peu voyou, un peu anar mais plutôt sympathique car ayant évité bien des grosses erreurs en plus de 35 ans.
Plus inattendu, il a aussi chanté Brassens, en reprenant les excellente paroles adaptées par Pierre Pascal (lui-même écrivain et chanteur en provençal et castillan) pour Paco Ibáñez sur le disque de 1979 Paco Ibáñez canta Brassens.
Évidemment, il a choisi la Mala reputacion pour y imprimer sa marque.

 
Pour rappel, on passe la "version originale" précédée d'une apologie de l'auteur toute en lyrisme désordonné.