mercredi 8 avril 2020

Tranche de vie (s'armer contre la justice)




Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient.
     Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux. Et je l'ai trouvée amère. Et je l'ai injuriée.
     Je me suis armé contre la justice.
     Je me suis enfui. Ô sorcières, ô misère, ô haine, c'est à vous que mon trésor a été confié!
     Je parvins à faire s'évanouir dans mon esprit toute l'espérance humaine. Sur toute joie pour l'étrangler j'ai fait le bond sourd de la bête féroce.
     J'ai appelé les bourreaux pour, en périssant, mordre la crosse de leurs fusils. J'ai appelé les fléaux, pour m'étouffer avec le sable, le sang. Le malheur a été mon dieu. Je me suis allongé dans la boue. Je me suis séché à l'air du crime. Et j'ai joué de bons tours à la folie.

  Et le printemps m'a apporté l'affreux rire de l'idiot.
     Or, tout dernièrement m'étant trouvé sur le point de faire le dernier couac ! j'ai songé à rechercher la clef du festin ancien, où je reprendrais peut-être appétit.
     La charité est cette clef. − Cette inspiration prouve que j'ai rêvé !
     "Tu resteras hyène, etc...," se récrie le démon qui me couronna de si aimables pavots. "Gagne la mort avec tous tes appétits, et ton égoïsme et tous les péchés capitaux."
     Ah ! j'en ai trop pris :  − Mais, cher Satan, je vous en conjure, une prunelle moins irritée ! et en attendant les quelques petites lâchetés en retard, vous qui aimez dans l'écrivain l'absence des facultés descriptives ou instructives, je vous détache ces quelques hideux feuillets de mon carnet de damné.


Arthur Rimbaud
Une saison en enfer

 

Et à propos de haine et de justice, on lira avec profit les arguments légaux d'un avocat connu dans une célèbre revue hebdomadaire.
On ne vous dira jamais assez de ne pas raquer les amendes reçues pour la simple cause d'avoir été au mauvais endroit au mauvais moment mais de les contester. Enfin, en général...

5 commentaires:

  1. L'homme aux semelles de vent, encore et toujours présent !

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  2. Si vous avez une vieille paire à refourguer, surtout n'hésitez pas.

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  3. Les miennes, de chaussures, ont des semelles aussi derrière.
    Désolé, je passais par là...

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  4. Parfois, vous devriez avoir honte.

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  5. Parfois, nous devrions.
    D'ailleurs Macron faisait pas un groupe de rock dans sa jeunesse ? Il reprenais OTH ("Quand on n'a que la honte en partage et comme seul héritage...") et LSD ("Honte honte honte").
    Je sais, je sais...

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