La mort
est omniprésente. Maladies, affrontements avec les forces de l'ordre
et dangerosité des actions économiques posent un cadre de vie
hautement précaire. Le guérillero est un mélange d'audace, de
courage et de fatalisme. Évoquant « Machado », Victorio
Vicuña signale « Je
me souviens qu'il se disait courageux, car il savait qu'il allait se
faire tuer. Et que ça lui était bien égal que ça lui arrive
aujourd'hui ou demain ». On le constate, la montagne n'est pas
le lieu le plus approprié pour les lâches. Dans tous les
témoignages des survivants, on rencontre une plus grande
appréhension pour la blessure ou l'arrestation que pour la mort
elle-même. La détention est particulièrement redoutée, la
condition de prisonnier de guerre n'étant pas reconnue, son sort et
sa vie dépendent alors exclusivement de l'attitude de ses gardiens. À partir de 1947, il est clair qu'être arrêté équivaut à une
mort certaine précédée de tortures en tous genres induisant le
risque de dénoncer ses compagnons et les agents de liaison. En
connaissance de cause, de nombreux guérilleros préfèrent se
suicider plutôt que de tomber aux mains de la Garde civile. Ou ils
mènent une attaque désespérée en sachant que l'issue leur sera
fatale.
Maquis. Histoire des guérillas anti-franquistes. Secundino Serrano.
Le livre de l'historien Secundino Serrano, étude complète et surprenante sur les maquis et la résistance active dans l'Espagne post-guerre civile sort enfin en français (édition Nouveau Monde). Cette petite vidéo* de 23 minutes présente plusieurs aspects de l'ouvrage. On peut trouver une version courte de 6 minutes à ce lien.
Et pour quelques traces laissées dans l'imaginaire populaire, un rap de Mala Fama en mémoire des deux derniers guérilleros de Cantabrie, Juanin et Bedoya.
* Montage réalisé avec des extraits de Los ultimos guerilleros de José Vicente Viadel et Los del monte de Reyes Ramos.
Il est communément admis que c'était le temps où, en France, on ne savait pas jouer de rock 'n roll, pas plus qu'on n'était foutu de sonoriser un concert correctement. En France, je ne sais pas, pour tout dire j'étais pas au Golf Drouot, mais en Confédération Helvétique, il semble qu'on ait su organiser un concert proprement.
La preuve: on tombe par hasard sur cet enregistrement de Jacques Dutronc capté à Yverdon-les-Bains, riante station thermale vaudoise, en 1966.
Miné par le service militaire obligatoire, le groupe originel, El Toro et les Cyclones, s'est séparé l'année précédente et le beau Jacquot s'est acoquiné avec Jacques Lanzmann pour entamer une carrière solo.
Des Cyclones, il reste ici Hadi Kalafate à la basse (un pote de jeunesse qui accompagnera ensuite Chamfort et Dick Rivers en tâtant du cinoche) et on trouve aussi Jean-Pierre Alarcen à la guitare (futur grand complice de François Béranger) et Alain Chamfort (lui-même) à l'orgue.
Si les gars avaient l'air aussi à l'aise sur scène, c'est que cette année là, ils se sont enquillés la bagatelle de 200 concerts (Little Bob doublé!).
Outre, les désormais classiques du duo dynamique, ils font ici deux reprises, une de Michel Polnareff et l'autre de... Mireille Mathieu !
Ils envoient donc :
01 - Mini, mini, mini
02 - Sur une nappe de restaurant
03 - On nous cache tout, On nous dit rien
04 - Les gens sont fous, les gens sont flous
05 - La Compapadé
06 - Qu' elle est belle
07 - L'Amour avec toi
08 - La fille du Père Noël
09 - L'Espace d'une fille
10 - Les cactus
11 - Les playboys
12 - Et moi, et moi, et moi.
Le vœu de Ramon Vila Capdevila, dit "Cara quemada" (visage brûlé) dit "Pasos largos" (grands pas) dit "Capitaine Raymond" dans les FFI, ne fut jamais exaucé. Il dut se contenter d'un enterrement à la sauvette dans une tombe anonyme, ce qui est presque aussi beau. Il fut l'ultime maquisard de sa génération en activité en territoire espagnol. Mineur anarchiste de la CNT, volontaire de la colonne de Fer en 1936, guérillero jusqu'en 1939, héros de la résistance française ayant refusé la légion d'honneur, il continua la guerre contre la dictature jusqu'au 7 août 1963 où il tomba dans une embuscade de la Garde civile qui le laissa se vider de son sang six heures durant sans oser l'approcher. Il avait 55 ans.
Willy Wolf était un ouvrier ajusteur polonais exilé à Nantes. Champion du monde de plongée autoproclamé, il vendait aussi des cartes postales à son effigie avec un étrange slogan ; "Achetez, l'homme qui va mourir !"
Il portait d'ailleurs un costume frappé à l'effigie de la tête de mort des pirates.
Le dimanche 31 mai 1925, il entra dans la légende.
Devant 50 000 personnes, il escalada le pont transbordeur de Nantes, haut de 53 mètres.
Là-haut, il se livra à une suite d'acrobatie. Il comptait faire le grand saut avec une moto enflammée mais on lui avait refusé l'engin. Il enflamma donc son écharpe (ou sa ceinture selon certains) et devint comète se jetant dans la Loire.
Il mourut ainsi en direct, filmé par les caméras de la Gaumont, qui s'était déplacée pour l'occasion.
Le trio Facteur Sauvage (Laurent Paris, batterie, Mathieu Sourisseau, basse et Daniel Scalliettt à la voix) se définissant comme "anomalie musicale" s'est emparé de cette histoire. Ils l'expliquent ainsi : "Mais Willy Wolf est-il mort ce jour-là ? Ou s’est-il engouffré dans
d’autres aventures sous-marines ? Pour Facteur Sauvage, il ne reste pas
de cette histoire un simple fait divers. Le spectacle de la mort importe
peu. C’est l’élan de ce fils d’immigré polonais, ajusteur de son
métier, acrobate rêveur, brailleur sur les marchés, qui interpelle. Il
nous raconte autre chose. Un petit homme se dressant devant sa condition
d’homme. Une histoire à colporter toujours. Un rêve défrisant le monde
du réel."
Don't sleep until you die en est, entre autre, le résultat.
Dance wiyh my bones également, ici filmé en 2019 dans un bistrot de Tarbes
Il y a du romanesque pathétique dans la fin d'un brillant jeune homme en colère qui révolutionna l'art poétique et termina son existence dans la peau d'un trafiquant d'armes.
Encore que certains anti-colonialistes pourront toujours se réjouir que le ci-devant poète, devenu trentenaire, ait eu comme client le Ras Ménélik, futur souverain éthiopien et grand vainqueur de l'armée italienne à Adoua.
Mais selon certaines sources, certes discutables (Edmond Goncourt) notre Arthur aurait viré mystique (ce qui n'est pas si étonnant, vu l'exaltation du personnage) et décrit sa jeunesse comme "une vaste fumisterie". Le reste est connu, l'homme aux semelles de vents n'en posséda finalement plus qu'une et mourra dévoré par le cancer, à peine rentré à Marseille.
Dans son album Météo für nada, de 1986, Hubert Félix Thiéfaine fut un des rares à magnifier une fin d'existence somme toute assez paradoxale
Ça s'appelle tout simplement L'affaire Rimbaud
Un petit retour aux origines avec la mère Patti Smith, éternelle admiratrice du poète, qui phantasme un Rimbaud en Allemagne lors d'un concert à Stuttgart en 2010. C'était l'année où des manifestants tentaient de protéger un parc contre la boulimie urbaine.