vendredi 29 juin 2018

Encore Béranger

Béranger avec la troupe La Roulotte dans les années 50

En 2004, un an après sa mort, parût un coffret de trois cds et un dvd consacré à François Béranger.
L'excellente sélection est déclinée selon les trois thèmes majeurs : la révolte, la poésie, l'amour. 
En ce qui concerne le dvd, on y trouve un concert de 1998, un film de Philippe Worms, et l'unique clip,à notre connaissance, du bougon tendre et rieur : Chanson Folklo



Un autre extrait d'un entretien avec Jean-Pierre Alarcen (son guitariste attitré) et Béranger résume assez bien le bon gars.


On trouve aussi une jolie biographie du Monsieur, signée par Marc Robine en cliquant là.

mardi 26 juin 2018

Et Moustaki fit fortune

Revenons sur le cas d'une chanson évoquée ici dans la version de Cher, de 1966.
En 1959, Georges Moustaki écrivit les paroles d'une chanson pour Édith Piaf, l'inoubliable musique en étant de Marguerite Monnot.
Succès foudroyant : grâce à cette histoire mélodramatique de la sempiternelle péripatéticienne au grand cœur accueillant un richard aux amours désespérés, la Môme vend 400 000 disques place la rengaine dans les hits parades de 11 pays.


Parmi moult reprises, celle de de la chanteuse hollandaise Corry Brokken créa de beaux remous. Dans le royaume batave de 1960, on se devait de ne pas évoquer la prostitution au pays d'Amsterdam et de Rotterdam.
Hypocrisie calviniste, quand tu nous tiens...


Un autre version fort populaire, fut celle de la rouge (dans les deux sens du terme) italienne Maria Ilva Bocalti, "Milva", chantée ici en duo avec l'auteur au piano, en 1983.


vendredi 22 juin 2018

Archives du scopitone (7) Guy Marchand fut élégant

 
Quand il ne jouait pas encore le détective de Malet, Guy Marchand pouvait être marrant.
La preuve en est un extrait de son deuxième EP, L'Amoureux transi (EP RIVIERA 231.12) , la face B Tout en dansant la Rumba (novembre 1965) dans lequel il cabotine à souhait.
Allez, un peu de légèreté, c'est l'été.





mardi 19 juin 2018

Le chant des ouvriers

Ça, c'est d'Oscar Wilde
Ringards et nostalgiques comme nous sommes, voici une chanson qui a fait et fera les beaux jours de quelques agapes et réunions arrosées.
Elle est d'un grand auteur du XIXème, Pierre-Antoine Dupont (1821-1870) poète, musicien et goguettier.
Orphelin, ce fils de forgeron lyonnais fut confié à un oncle curé dès ses quatre ans. Ne s'étant découvert aucun goût pour le séminaire, le jeune homme se fait ouvrier canut, puis employé de banque avant de rejoindre Paris pour y fréquenter assidûment les goguettes (futurs cabarets).

Il y rencontre Gérard de Nerval, Théophile Gautier, Charles Baudelaire, tente, sans succès de solliciter un coup de main à Victor Hugo et copine avec Charles Gounod avec qui il créée le refrain Les bœufs ("J'ai deux grands bœufs dans mon étable, etc...").
En 1846, il écrit ce qui restera comme sa chanson la plus populaire, celle dont il est ici question, Le chant des ouvriers, hymne de la Révolution de 1848.
Retiré dans l'Essone, chantre de la vie rustique, cela ne l'empêche pas d'être membre du Comité central de résistance et de faire paraître, en 1849, son recueil Le Chant des paysans hostile au prince président Napoléon Bonaparte futur troisième.
Lors du coup d'État du 2 décembre 1851, il se trouve sur la barricade du faubourg Saint-Antoine, ce qui lui vaut une condamnation à 7 ans de déportation.
Réfugié en Savoie, il se fait repenti pour obtenir sa grâce.
Aigri et alcoolique il retourne à Lyon en 1862 pour y mourir malgré le soutien de ses amis.
Pierre-Jean de Béranger disait de lui "Il est poète, plus poète que moi".
Ses chansons, Les carriers et Le chant des ouvriers (dit aussi la Marseillaise du peuple) accompagneront en musique de la Commune de Paris.


Marseillaise du peuple, peut-être, mais il s'agit bien ici de l'indépendance du monde, plus d'une quelconque nation. La version proposée ici n'est pas la plus répandue, par le récemment disparu Marc Ogeret, mais celle d'une chanteuse amie de Mac Orlan et de Dimey qui fonda un label pour chanter des chants révolutionnaires ou de maquis : Rosalie Dubois (née Jeanine Rolleau).
En conclusion, un peu de bon sens :


samedi 16 juin 2018

Point final

RIDEAU !
Après six années de loyaux service, il semble bien que la dernière émission de l'Herbe Tendre de la saison 2017 / 2018 soit... la dernière tout court.
Point de déception ou d'amertume là-dedans, juste, comme dans toute belle histoire d'amour, l'envie d'y mettre un terme avant que l'ennui ne vienne s'imposer.
Nous invitons donc tous et toutes les producteurs, productrices, les ex, ainsi que la chorale le Nez dans le ruisseau à venir ce lundi 2 juillet de 17 à 19h à Canal sud pour un thème qui sera, en toute simplicité Nos Indispensables.

Auditeurs, auditrices, à tout bientôt. Pour l'instant, ce blogue continuera en musardant de ci de là.
En avant goût, la grande Fréhel, un de nos amours de toujours, par laquelle advint cette émission, dans Comme un moineau.



Et puisque nous sommes tous destinés à crever au fond d'une impasse (Dead end street), nos estimés Kinks dans un film sur le destin de la working class qui fit son petit scandale en 1966



mercredi 13 juin 2018

Parenthèse d'actu : Grèves au CHU de Toulouse

Des mazarinades aux poissonades, de Napoléon III au régime de Pétain, des grèves de la Belle Époque à la Guerre d'Espagne, de la Révolution de 1789 à mai 68, le détournement de chansons en vogue a toujours accompagné les mouvements sociaux ou émeutiers.
En ces temps d'idéologie libérale bestiale, le secteur de la Santé est un des plus frappé et il s'agit là, non seulement de mépriser patients ou personnel sous prétexte d'économies, mais purement et simplement de soumettre et de terroriser ce dernier.
Rien qu'à Toulouse, des mouvements de grèves se sont succédés ces derniers temps, en vrac, au CHR, brancardiers, transporteurs de plasma, secteur psychiatrique, ces jours-ci, les ASH de l'hôpital Joseph Ducuing (ex Varsovie) se battent contre leur privatisation.
Et voilà qu'une bande de soignants a pris l'initiative de tourner un clip un dimanche après-midi en reprenant un tube d'Orelsan (avec la bénédiction de l'auteur) en tâchant, selon leur termes "d'éviter tout corporatisme et de faire tourner cette parole de travailleurs".
Conformément à leurs vœux, on relaie volontiers. On précise aux non toulousains qu'une liste pas exhaustive des établissement hospitaliers se trouve dans la chanson et que la vidéo fut tournée sur la ligne du tramway qui circule devant le CHU Purpan (celui rebaptisé Pierre-Paul Riquet)


Ci-dessous, autre exemple d'initiative entre personnel, travailleurs et chômeurs du coin. À noter que la direction de cet hôpital "social" bien connu des toulousains n'hésite pas à employer les méthodes digne d'un patronat brutalement classique. Quand on pense que le salon de conférence de Joseph Ducuing s'appelle "Salle des guérilleros espagnols" , ça laisse rêveur.  

lundi 11 juin 2018

Paris des maléfices



Amis de la poésie, des villes qui ressemblaient encore à des villes, des bistrots et de la lutte des classes, bonjour.
Aujourd'hui n'est pas coutume, nous allons faire une petite virée ésotérique dans les recoins d'un Paris mystérieux et disparu.
Voici une émission du 4 juin 1964, de la série "la France insolite". Réalisée par Claudes Dagues, on y retrouve Armand Lanoux, Jean-Louis Bernard, Pierre Dérlon et, bien entendu, l'inévitable Jacques Yonnet.
Le Poème d'Apollinaire sur l'île est récité par Jean-Marie Fertey.
Paris serait une ville "à sorcières, une ville à maléfices". C'est ce que prétend démontrer ce documentaire qui remonte au moyen-âge.
Le peintre et mage Baskin s'emploie à le confirmer : il y aurait des lieux maudits comme le pont, la rue de Bièvre, d'autres hauts lieux restés tels quels. C'était le cas du haut de la montagne Sainte-Geneviève ou la rue Clovis.




Pierre Derlon interprète un sort jeté par les gitans à un autre pont. Lui-même se revendique frère des tziganes dotés d'étranges pouvoirs.
Pour Jean-Louis Bernard, Paris serait une pierre philosophale ceinturée de monuments mégalithiques alignés. Analysant des noms des localités françaises, il y trouve des parentés avec Isaurée et Isolde, adorés par les anciens gaulois et leurs prédécesseurs. Les dieux égyptiens étant cousins de ceux de la Gaule, les Égyptiens s'appelaient Rômes c'est à dire des hommes qui avaient le sens de l'inconscient et des pouvoirs magiques. Ben tiens, encore une confusion sur le peuple errant...
Après un détour par la légende de la main de gloire, Armand Lanoux, qui a écrit "Physiologie de Paris", souligne le fait que de nombreuses émotions populaires ont eu lieu au Faubourg Antoine dans le 12ème arrondissement de Paris : forces telluriques, coups de rouge et peuple ouvrier se faisant arnaquer après chaque éclosion barricadière...
Un vrai régal pour l'amateur de vieilleries et de pittoresque social.

On conclue en zizique avec une peur bleue.


Et une page de pub pour touristes à Pigalle

jeudi 7 juin 2018

Édouard Luntz aimait (non plus) Gainsbourg


Les cœurs verts (1966)
Quelle ne fut pas notre surprise, au détour d'une émission du samedi sur une antenne du service public d'entendre évoquer un cinéaste atypique : Édouard Luntz, qui nous était parfaitement inconnu.
Doté d'une fiche rachitique chez tata wiki, renommé dans le milieu pour avoir collé, à lui seul, un procès au magnat Daryll Zanuck afin d'obtenir un droit au montage final, cet homme fut, sur la fin, également producteur.
Nous renvoyons à une présentation de France Culture :
 
Évoquant certains films de Truffaut, de Pialat ou Eustache, son œuvre est travaillée par les questions de l'enfance, de l'adolescence, de la délinquance dans la banlieue des années 60. 
Après avoir été l'assistant de Jean Grémillon, Nicholas Ray et Pierre Prévert, il se lança, aux premiers temps de la Nouvelle Vague, dans la réalisation de courts-métrages remarqués, en particulier Enfants des courants d'air, tourné dans un bidonville de la Plaine Saint Denis et récompensé du Prix Jean Vigo. Mais c'est surtout son long métrage de 1966, Les cœurs verts, qui domine sa filmographie ; une fiction tournée avec une bande de blousons noirs à Nanterre et Gennevilliers.

Il est pour le moins exagéré, comme on l'a entendu ailleurs, de taxer Les cœurs verts de "premier film sur les jeunes de banlieue" car un Marcel Carné vieillissant avait réalisé le quelque peu poussif Terrain vague en 1960.
Mais dans ce magnifique entretien de 1966, on voit à quel point ce réalisateur (9 films à son actif de 1959 à 1973) fut un homme sympathique, sensible et plein de bon sens. Par contre, le plateau d'invités était gratiné, heureusement compensé par les réactions d'un public juvénile enthousiaste ou dubitatif. 



L'autre grosse surprise est constituée par la musique du film. Pour les besoins de deux séquences de bal, Serge Gainsbourg composa une petite mélodie (Scène de bal-1) qu'il n'hésita pas à recycler avec profit deux années plus tard.
On n'en dit pas plus, on vous laisse reconnaître ce que ça a donné :



En ce qui concerne Scène de bal-2, le Lucien farceur a également repris le thème pour en faire Le canari sur le balcon, chanté par la Birkin en 1973. Rien ne se perd.


Ps qui n'a rien à voir ou presque : la nouvelle est tombée hier soir, Gilles Bertin a finalement écopé de cinq mois avec sursis. On est heureux pour lui.

lundi 4 juin 2018

Émission de juin : on the road again
























En préambule, hommage à une vieille connaissance, figure des voyages immobiles des nuits locales, partie aujourd'hui pour son dernier trajet. À la tienne !
Les survivants se transportèrent ainsi :
Philippe Léotard                        Le bateau ivre
Charles Trenet                           Je t'attendrai à la porte du garage
Sanseverino                               Les embouteillages
NTM                                           Ma Benz
Anne Sylvestre                           La reine du créneau
Gilles & Julien                            Hommes 40, chevaux 8
Henri Salvador                          SNCF blues
CUGI                                          Travailleurs, usagers
Nino Ferrer                                Sud Express
Lili Drop                                     Sur ma mob
Nakk                                           Le syndrome du trom'
Bourvil                                        À pied, à cheval, en voiture (enfin, non)
Zao                                             Corbillard
Guy Marchand                           Taxi de nuit
Bobby Hachey                            Mon sourire, ma limousine
Les Chiens des ruelles                Road trip
Les Colocs                                  La traversée
Marc Robine                               Les mangeux d'terre
Gilbert Bécaud                           Orly le dimanche
Chez  Là                                     La voiture
Les Frères Jacques                     En sortant de l'école
Bourvil 2                                     À bicyclette

L'Herbe Tendre de juin 2018 se retrouve pour, encore une fois à cette bonne vieille adresse.


Highway to heaven


 
Ceci était le morceau raté de l'émission
Et un p'tit rock à la gloire de Peugeot (quand ça existait encore et qu'à Montbéliard ça s'appelait pas PSA )



samedi 2 juin 2018

Pia Colombo, teigneuse méconnue


Par l'effet d'un manque d'imagination récurrent des médias, voici une chanteuse qui fut un temps pressentie pour prendre la place vacante d'Édith Piaf (décédée en 1963 et dont la grande Damia disait qu'elle lui avait tout piqué).
Mais ses positions très à gauche, une réputation "d'intellectualisme", de "réservée à la rive gauche" et, surtout, une censure fort vigilante firent chuter la Dame dans un certain oubli.
Fille du Nord née Éliane Marie Amélie Pia Colombo à Homblières (1934) et morte à Créteil en 1986, elle fut danseuse, comédienne et hanta les cabarets et meetings communistes.
Laissée à sa grand-mère, elle fut d'abord une grande adepte de l'école buissonnière, à tel point que sa famille considérait miraculeux qu'elle sache lire et écrire.
En 1946, ses parents l'ayant reprise en région parisienne, ils l'amenèrent au Châtelet où elle devint amoureuse de la danse.
Tombée malade à quinze ans, elle en restera très chétive et pourra faire une croix sur sa carrière de danseuse.

Elle tente alors le Cours Simon où elle est encouragée par un jeune professeur, Maurice Fanon, chez qui elle emménage en 1956.
Après divers refus sanglants, elle débute en chanson au cabaret l'Écluse cette année-là.
Elle y chante des chansons de Fanon, avec lequel elle se séparera quelques années après sans que jamais leur amitié ne soit remise en cause et sort ses premiers tours chez Versailles, puis chez Philips.
Au fil des années, elle sortira huit albums en studio, deux en public et treize EPs quatre titres.

Retrouvons-la dans un classique Fanon, l'Écharpe, filmée en 1963


À partir de 1958, elle fait des premières parties de Georges Brassens, se lie d'amitié avec Barbara, chante un débutant nommé Gainsbourg puis connaît la dèche médiatique due à l'irruption des yé-yés.
Se remettant à la vache enragée, elle passera aux Trois Baudets, à la Tête de l'art, à La Colombe et surtout à la Contrescarpe, en doublé avec Francesca Soleville.
Repérée par Roger Planchon, elle alterne scènes de théâtre et quelques brèves apparitions cinématographiques. Elle devient alors une grande interprète de Kurt Weill et Bertold Brecht comme dans ce Tango des matelots


Elle triomphe enfin dans l'opéra brechtien Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny, commentant à son propos "J'y ai tout appris. Avant je ne savais pas ce que c'était que chanter."
En 1967, elle enregistre Rue des Rosiers, de Sylvain Reiner et Maurice Holmès, sur la Rafle du Vel d'Hiv, puis tourne avec Aznavour, Alain Barrière, Marcel Amont....
 
En mai 1968, avec Jean Ferrat, Maurice Fanon, Francesca Solleville, Colette Magny, Isabelle Aubret et Dominique Grange, elle tente des tournées aux piquets des usines en grève avant que tout ce petit monde ne se fasse virer par une CGT inquiète de voir ses propres troupes lui échapper.
Puis elle remontera sur les scènes théâtrales, défendra l'écologie, se fera une autre spécialité à chanter Léo Ferré, tournera en Europe de l'Est et, pas rancunière, passera finalement en vedette à la Fête de l'Huma en 1973.
Rongée par le cancer, elle crée, entre 1979 et 1981, un spectacle autobiographique, Requiem autour d'un temps présent, écrit par le toujours fidèle Maurice Fanon.
Après quelques concerts et apparitions télévisées, le crabe finit par avoir sa peau en 1986.
Manière de rappeler que la sauvagerie policière ne date pas d'hier, un dernier pour l'émotion : Un Soir de mai, enregistré à l'Olympia en 1968 :