vendredi 30 août 2019

Les débuts de Catherine Ringer

Vue inédite de Flashes Rouges (1979)

Née en 1957, fille d'un peintre déporté de camps en camps pendant la guerre, Catherine Ringer laisse tomber l’école vers es 15 ans pour entrer au Théâtre de recherche musicale de Michael Lonsdale.
Elle fréquente ensuite le Café de la gare où elle se retrouve dans une comédie musicale montée par deux chorégraphes argentins, Armando Llamas et Marcia Moretto (la future Marcia Baila) . 
Elle est ensuite embauchée par Iannis Xenakis comme chanteuse soliste à "voix sauvage" tout en apparaissant au théâtre ou dans quelques films pornos. En 1979, elle rencontre Fred Chichin lors d’une audition pour la pièce musicale Flash rouge de Marc'O. Ce guitariste d'Aubervilliers avait déjà joué avec les groupes plus ou moins punks Fassbinder, Gazoline, ou les premiers Taxi Girl.
Il se serait présenté au casting après avoir été séduit par l’affiche du spectacle, représentant une photo de Catherine Ringer en héroïne de la pièce.




Se voulant une énorme provocation à base d'apologie de la lutte armée et de musique déstructurée ou bluesy, cet opéra rock fut, comble d'avant-gardisme, filmé en "Nouvelles images", c'est à dire avec des filtres de couleurs donnant un effet post psychédélique.


Il semble bien que Catherine et Fred aient en une semaine décidé de s'enfuir de cette pétaudière pour aller monter le groupe Sprats (fleuron de la cuisine yiddish) qui devient vite Rita Mitsouko. Mais c'est une autre histoire.
C'était notre rubrique curiosités diverses.

jeudi 22 août 2019

Rentrée des Vanneaux : la grande trouille


La peur occupe une place fondamentale dans la palette des émotions et sentiments humains. Permettant à la fois de ne pas faire trop d'imprudences et d'être gouverné par des tyrans, des mégalomanes ou des crapules, elle hante les musiques et airs du monde entier.
Les Vanneaux en feront leur thématique du 2 septembre à 17h30 sur le 92.2 de Radio Canal Sud.

En clin d’œil à un récent disparu, cet extrait de La cité de l'indicible peur de Jean-Pierre Mocky (1962) On vous envoie la chanson du générique, celle de l'inspecteur Triquet. À l'époque, des béotiens de producteurs avaient rebaptisé le film La grande frousse, trouvant ce titre inepte plus vendeur.



En 2001 les Mexicains de la Maldita Vecindad y los hijos del quinto patio chantaient leur crainte de ces monstres tout droit sortis de la légende de leur ville qui se consacrent à administrer le peuple.



lundi 19 août 2019

Lemarque, Mouloudji et Carné au musette


Francis Lemarque, Nathan Korb de son nom, écrivit Rue de Lappe en 1951 en hommage tant au quartier qui avait hébergé sa famille d'émigrants qu'à l'ambiance et l'histoire de celui-ci.
Peuplé de bistrots auvergnats, berceau du bal musette résultant de la rencontre de ceux-ci avec des arrivants Italiens et de la Miteleuropa, ce carrefour de La Bastille fut siège des nuits parisiennes pour prolos avec son désormais légendaire cortège d'apaches et de prostituées. Tout comme à Montmartre, ces spectacles assez peu familiaux attiraient également le bourgeois cherchant à s'encanailler.
Le piquant est qu'on n'avait pas attendu le triomphe d'Airbnb pour mettre l'exotisme crapuleux en scène. Dès l'entre-deux guerre, de faux bals d'apaches existaient avec tirs de brownings (de la manufacture de St Étienne) bidons destinés à foutre le frisson au touriste.
Mouloudji fut donc chargé de mettre en chanson cette agitation nocturne disparue de ce faubourg aujourd'hui symbole d'une bourgeoisie triomphante. 


Mais les années 1930 et leur développement des transports en commun furent surtout celles du triomphe des guinguettes de bord de Marne.
Ces coins de campagnes constituèrent un réservoir de parisiens souhaitant respirer un peu. Apparaissant dans de nombreux films, ce fut le cadre du premier court-métrage de Marcel Carné, Nogent, Eldorado du dimanche (1929)
Quatorze minutes bucoliques d'un monde d'avant la crise et les congés payés au son de l'inévitable accordéon.


vendredi 16 août 2019

Pierre Barouh et Saravah

Barouh avec son épouse Anouck Aimée en 1967
On ne peut apprécier toute la production de ce touche-à-tout et c'est normal.
Introducteur de la samba brésilienne en France, découvreur de Brigitte fontaine, Areski Belkacem et Higelin ou Pierre Akendengue, poussant au micro Jean-Roger Caussimon ou Alfred Panou, initiateur du free-jazz, explorateur de musique japonaise, musicien et producteur lui-même, le maître du studio des Abesses régna pendant plus de quarante ans sur un des labels les plus originaux de l'hexagone, Saravah.
Disparu en 2016, France Culture rendit hommage au travail de Pierre Barouh avec une trop brève histoire de Sarvah.
C'était dans la série Histoire française de l'exploration sonore d'Étienne Menu du 2 août dernier.

mardi 13 août 2019

Mistinguett : érotisme primitif



Avec sa collègue Arletty et bien avant le Môme Piaf, Mistinguett fut une de ces hirondelles du faubourg à devenir une immense vedette de la France de l'entre-deux guerres. Couronnée "Reine du Music-hall", Colette écrivit d'elle qu'elle était propriété nationale.
Née Jeanne Florentine Bourgeois en 1875, issue d'une famille plus que modeste comme ne l'indique pas son patronyme, Miss Hélyett puis Mistinguett débuta au Trianon en 1894.
Malgré un physique particulier, un talent limité de danseuse et chanteuse, elle profita de sa suite de revues, pièces de théâtre et même petits films d'un cinématographe débutant pour imposer sa gouaille coquine et une paire de gambettes qu'on disait les plus belles du monde.

Partenaire de Maurice Chevalier* dès 1911 aux Folies Bergère, elle connut la gloire après 1917 aux côtés de Harry Pilcer, Georges Guétary ou un petit jeunot qui promettait, Jean Gabin.

Si on se souvient surtout de Mon homme, Ça c'est Paris ou C'est vrai, on apprécie particulièrement son Il m'a vue nue, de 1926 (Pearly / Chagnon) dans lequel on mêle allégrement du littéraire un peu cuistre ( La lune soudain vint s'exhiber, /
J'allais lui dire : "Ta bouche, Phoebé !" / Quand j'entendis près d'moi / Un cri d'émoi)
à une raillerie toute populaire ( Il m'a vue nue / Toute nue / Sans cache-truc ni soutien-machins / J'en ai rougi jusqu'aux vaccins) avec une gaillardise parfaitement explicite : Et je pensais / Il va me rejoindre bientôt / Pourvu qu'il ne perce pas mon incognito.


 

Comme quelques autres, la Miss se fera plus discrète après l'Occupation. Elle est morte en 1956 à 81 ans.

* Côté gaillardise anecdotique, ces deux-là ont vécu une grande histoire d'amour durant une décennie. Mobilisé en 14, le Maurice avait offert une copie de son sexe à sa belle pour qu'elle patiente en attendant l'armistice.

samedi 10 août 2019

Conseils d'été: restez couverts

Atomic cafe (1982)
Notre période sacrée de congés plus ou moins payés est cette année anxiogène. On ne cause pas ici de canicule, de féroces policiers mugissant dans nos rues ou des "réformes" à venir. Il y a plus grave.
L'Inde joue avec le Pakistan, les USA jouent avec l'Iran, Israël joue avec l'Iran, la Corée du Nord joue avec celle du Sud et les USA, la Russie joue avec l'OTAN qui joue avec la Turquie.
On imagine bien des doigts pointés sur quelques boutons.
Ce blogue se doit donc de vous donner de judicieux conseils issus d'une époque triomphante quoique qu'assez paranoïaque mais on n'est jamais trop prudent.
Ce film de 1951 fut tourné la Défense civile des États-Unis afin que les citoyens ne soient pas pris au dépourvu en cas d'attaque atomique.
Il fut abondamment passé dans les écoles durant toute la décennie.
On ne saurait trop conseiller aux habitants voisins d'une centrale nucléaire ou d'une cathédrale au plomb d'appliquer ces consignes à la lettre.




 Une vieillerie joyeusement vietnamienne pour faire passer la pilule d'iode.

mercredi 7 août 2019

Lutte des classes ? No sir, Fantômas !



Qui est plus maléfique, plus puissant, plus dévastateur, plus élégant que Mesrine, Ben Laden, Mussolini et Al Capone réunis ? Fantômas, bien entendu !
Inventé par Pierre Souvestre et Marcel Allain en 1910, les exploits de ce dandy empereur du crime se déclinèrent sur 12 000 pages en 32 volumes, devenant le héros le plus populaire de la soi-disant Belle-époque.
La fameuse affiche du film

Bénéficiant des derniers progrès techniques, l'odieux personnage fut aussitôt porté à l'écran par le grand Louis Feuillade en cinq opus dès 1913.
Contrairement à beaucoup d'autres, cette crapule survécut à la Grande guerre et à la mort de son créateur, Souvestre, emporté par une congestion pulmonaire en 1914.
Allain reprit la suite en solitaire, dans un style encore plus "déplorable" (jugement de Max Jacob) à partir de 1926.
Dès avant la colossale boucherie, Guillaume Apollinaire, Blaise Cendrars, Max Jacob (qualifiant également ces romans de Nietsche pour bonniches) avaient déjà fondé la société des "Amis de Fantômas".
Désormais archétype du mal sans limite, enraciné dans la culture populaire, la chanson se fit écho de ses exploits.
L’inénarrable Robert Desnos écrivit La Complainte de Fantômas en 1933, année qui coïncide avec le procès du "réseau Fantômas" (espionnage dans les usines d'armement au profit de l'URSS). Exilé en France, Kurt Weill mit aussitôt cette complainte à l'ancienne (chronique et étalage de mauvaises actions) en musique pour Radio Paris. Hélas, il semble que Juve et Fandor courent encore après les enregistrements originaux, dérobés par une main maléfique.
Accompagnée par Jacques Loussier, Catherine Sauvage l'enregistra en 1961, conservant 13 couplets sur les 26 originaux. On peut retrouver cette plaisante interprétation .
Une version plus contemporaine dont la chanteuse n'est pas précisée se trouve sur Dailymotion.



On en dégotte encore une sur le net. Le chanteur possède un tonalité de parenté avec Guy Béart. Et pourtant on doute que ce soit lui.
Lectrices, lecteurs qui sont donc ces deux apologistes de la malversation ?



dimanche 4 août 2019

Chanson du Quai des Brumes

Le film de Carné (1938) n'a qu'un rapport relatif au roman
Grâce à son adaptation cinématographique du duo Carné-Prévert (1938) Quai des Brumes est certainement le roman le plus connu de Pierre Mac Orlan.
Le cadre du livre n'a rien à voir avec Le Havre mais se déroule entre le Montmartre du Lapin Agile et la ville de Rouen, deux lieux ou l'auteur avait pas mal roulé sa bosse.
D'ailleurs, il paraît que c'est Max Jacob qui avait surnommé Frédé, tenancier du fameux cabaret "tavernier du Quai des brumes" en référence non pas à un quelconque dock mais à cette butte mal famée.
Quant à Jean Rabe, jeune sans-le-sou de l'année 1910, il emprunte pas mal de traits à un Mac Orlan qui vécut alors dans la dèche.
Tout cela est assez connu.
Mais, amoureux comme on l'est des chansons du Dumarchey, voilà-t-il pas qu'on vient à peine de réaliser qu'un de nos airs favori, Nelly, est également issu de ce bouquin de 1927.
À l'origine, elle est dans le roman une go-go girl, comme on ne disait pas encore, des salles de bal de Pigalle et Montmartre. Prostituée occasionnelle, elle accorde ses faveurs à Rabe avant de monter en grade et régner enfin sur la vie parisienne en soignant son cafard de l'époque du Lapin.
Plus modestement, la fille de la chanson (sortie en 1953 dans Chansons pour accordéon avec V. Marceau) ne gouverne que son bistrot à Rouen. Elle est le dernier souvenir d'un petit gars qui part au casse-pipe en 14. Voilà pourquoi on avait passé ce titre à l'époque dans l'émission sur racaille militaire.
C'était en 2013 et cette découverte mérite bien un rappel. Chanté par la Morelli.