Gilets rouges, rond-point de Stalingrad, janvier 1943
Le 31 décembre 2018, les Vanneaux se retrouveront donc à un rendez-vous qui sera révélé à 23h45 pour honorer dignement une année qui nous promet tous les dangers et bien des espoirs. Les festivités suivront.
Le 7 janvier 2019, ils célébreront donc la fête sous toutes ses formes et en chansons. Sur les ondes de Canal Sud à 17h30.
En guise d'apéritif, et en hommage aux tovaritchs de l'illustration ci-dessus, les joyeux bougres du groupe Отава Ё (Otava Yo) venus du far-east :Про Ивана Groove, dans lequel, puisque Ivan a disparu, sa chère et tendre part jouer du violon dans la rue.
Suivi des rudes conséquences de nos excès, ici illustrées par le maître es flamenco burlesque et coupe de jambon noir, Tito el Francès, avec une vidéo artisanale.
Malgré la classification de ce post, on s'excuse au près des Acadiens, ce coup-là, ça ne nous vient pas du Québec mais du Nouveau Brunswick.
Ça fait presque une décennie que cette gaillarde de 28 balais mène son entreprise de réhabilitation de la country et du bluegrass avec un certain succès. Comme on connaît mal la Dame, vu d'ici, on aime bien.
Et quoi de plus indiqué, pour terminer une année pleine de rebondissements que cette aimable vidéo de 2012 ? On la dédie à tous deux et celles qui cultivent l'espoir que ça pète en 2019, nom de Diou ! Peut-être demain ça ira mieux...
Ah oui, ça s'appelle Aujourd'hui ma vie c'est d'la marde.
Également une pensée pour les proches de Claude Mesplède, infatigable érudit du roman Noir et ami des écrivains parti s'en jeter un avec Robin Cook et Jean-Patrick Manchette.
Avec toute cette agitation, on a failli oublier la magie des Noëls de notre enfance.
Heureusement, le petit génie de Chatham, l'homme aux 120 albums et aux 2500 peintures, est là pour nous les évoquer. On le constatera ci-dessous, cet homme a quelques raisons d'en conserver de cuisants souvenirs. Comme souvent, y'avait une couille dans le potlatch.
Ladies and gentlemen, mister "Wild" Billy Childish :
My father walked in pissed through the door And chucked the telly across the floor Then he fell drunk to his bed And these were the last words he ever said
Merry Fucking Christmas to you all! Merry Fucking Christmas to you all!
Plus moqueur, plus léger, on en remet une dernière pour la route avec ce titre d'Éric Frasiak C'est beau Noël (2016)
Comme le reste de l'Europe, le royaume d'Angleterre connut une vie sociale agitée au XIXème siècle. La particularité des Brits, héritiers des insaisissables Robin Hood ou Dick Turpin, fut d'avoir résolu le problème des représentants du mouvement en créant des personnages mythiques qui prenaient la tête d'armées de gueux et sur les traces desquels les bataillons des autorités s'épuisaient en vaines poursuites.
En 1830, les campagnes britanniques sont ravagées par l'introduction des premières machines batteuses, les abus de propriétaires maintenant une partie des ouvriers en chômage, profitant de cette situation pour sous-payer une main d’œuvre corvéable à merci.
Le Captain Swing
Nées dans le Kent, une suite d'émeutes paysannes, les Swing Riots, vont s'étendre dans tout le royaume. Les cibles en sont les Landlords, gros propriétaires fonciers dont les machines ou les maisons étaient incendiées s'ils avaient le malheur de ne pas accéder aux revendication salariales des métayers (sous forme d'argent, de nourriture ou de...bière).
Les pétitions sont signées par le chef suprême des insurgés : le Capitaine Swing, héros imaginaire dans lequel tous pouvaient se reconnaître.
Le nom du leader fut certainement choisi en référence à la sentence de mort par
pendaison qui menaçait quiconque prenait part au mouvement (le verbe "to
swing" signifiant "se balancer").
Après une année qui vit les contrées en flammes, l'armée reprit progressivement le contrôle de la situation : on compta alors 19 exécutions officielles, plus de 600 peines de prison et un demi-millier de déportations aux colonies (Canada, Australie).
Il exista plusieurs chansons à la gloire des saboteurs, cette balade, ici par Robb Johnson, connut un regain de popularité lors de la révolte contre Thatcher et sa Poll Tax, en 1990.
Mais avant l'irruption du facétieux capitaine, l'agitée Albion avait eu à subir les agissements du Général Ludd de 1780 à 1820. Là aussi, l'introduction du machinisme et de l'industrie avaient mis au rencard une foule de tondeurs, tisserands, et autres artisans qui se virent privés de toute maîtrise sur leur office, réduits à l'état de prolétaires allant mendier un salaire.
Menés par le chimérique John ou Ned (selon les endroits) Ludd (aussi bombardé général, capitaine ou carrément roi) les ouvriers insurgés n'aimaient rien tant que s'armer de masses pour briser les machines responsables de leur exploitation. Dans les Midlands, le gouvernement envoya contre eux plus de troupes que celles expédiées sur le continent combattre les armées de Napoléon.
Malgré quelques victoires partielles, en 1812, la peine de mort fut introduite contre le sabotage et treize luddites furent pendus.
La création des syndicats prit peu à peu la pas sur la révolte spontanée et auto-organisée.
Lord Byron écrira un poème en hommage aux Luddites.
Méprisés par les courants progressistes, ces Luddites vont bénéficier d'une belle renommée grâce aux courants anti-industriels modernes. Chumbawamba dans The triumph of general Ludd
À part ça, l'acte 6 a donné une quatrième journée d'affrontements dans Toulouse et la presse régionale a vomi son eau-forte (ce qui va à ravir avec l'utilisation des canons à eau).
Allez, on souffle un peu... La guerre civile qui suivit la révolution russe fit également rage dans une Sibérie au sens large. Nous entendons par là un territoire qui va de l'Oural à la Mandchourie et à la Mongolie, des lignes du Transsibérien aux steppes glacées, où s'affrontèrent des armées russes rouges, blanches, vertes, japonaises, tchèques, chinoises, bouriates et divers autres corps expéditionnaires. Comme bien d'autres, notre découverte de ces événements a débuté par la BD d'Hugo Pratt : Corto Maltese en Sibérie.
"Roman graphique" (terme ô combien prétentieux) dans lequel apparaît la figure haute en couleur du Baron Fou ou Sanglant, Roman Ungern von Sternberg, aristocrate russe blanc descendant d'un chevalier teutonique qui, après avoir commandé sa "Division Sauvage" pour le compte des blancs, tenta de créer un empire basé sur un ordre militaire bouddhiste en Mongolie avant de finir livré par ses officiers aux rouges qui se firent un plaisir de le fusiller.
Si nous n'avions alors pas encore lu les fabuleux livres de Ferdynand Ossendowski, Bêtes, Hommes et Dieux et Asie fantôme, Pratt, lui, les avait à coup sûr attentivement décortiqués. Géologue et explorateur polonais (la Pologne faisant alors partie de l'empire russe) Ossendowski, envoyé par l'Académie des sciences, parcourut la Sibérie de 1901 à 1921. Socialiste, il prit part à la révolution de 1905 dans un soviet sibérien, fut condamné puis gracié avant de se retourner contre les bolcheviks en 1917 et d'entrer au service l'amiral Koltchak, chef suprême des blancs de l'Est. Or, dans son premier ouvrage, narrant sa fuite désespérée des bolcheviks dans une situation de déliquescence du camp contre-révolutionnaire, Ossendowski tombe, en Mongolie, dans les griffes du Baron Ungern.
Non seulement sa situation établit un parallèle avec celle de Corto Maltese mais, dans la BD, les échanges du Baron avec le héros de papier, y compris le passage des prédictions chamaniques, semblent calquées sur le récit du savant polonais.
Un exemple de la prose du baron cinglé : La grande guerre a prouvé que l'humanité doit s'élever vers un idéal toujours plus haut, mais elle a marqué l'accomplissement de l'antique malédiction que pressentirent le Christ, l'apôtre saint jean, Bouddha, les premiers martyrs chrétiens, Dante, Léonard de Vinci, Goethe, DostoÏevsky... La malédiction a fait reculer le progrès, nous a barré la route vers le divin. La révolution est une maladie contagieuse; l'Europe, en traitant avec Moscou s'est trompée elle-même comme elle a trompé les autres parties du monde. (...) Ce qui nous attend, c'est la famine, la destruction, la mort de la civilisation, de la gloire, de l'honneur, la mort des nations, la mort des peuples. Évidemment, si Corto détruit un canon japonais avant d'être relâché, Ossendowski finit par poursuivre sa route vers Vladivostok plus modestement, non sans nous avoir livré, au passage, les prophéties du Bouddha vivant. Il regagnera la Pologne en 1922 et y mourra en 1945, non sans avoir fait partie du gouvernement clandestin durant l'occupation sous la tutelle des nazis de Hans Frank. Avec leur goût prononcé pour la soldatesque perdue, la Souris Déglinguée ne pouvait se priver d'une allusion au Baron tragique et à ses trains. Cheval de fer est issu de leur huitième opus Tambour et soleil (1995).
Quant à Ferdynand Ossendowski, si vous ne l'avez pas encore lu, bande de veinards, on vous le recommande vivement. Ça vaut tous les romans d'aventure.
Version désabusée: il y a eu le rouleau compresseur médiatique et policier, les vautours prospérant sur les victimes de la tuerie de Strasbourg, les contradictions du mouvement, une pluie glaciale, la ville occupée militairement et surtout pas moyen d'arrêter les canons à eau ou les blindés de la Gendarmerie. On s'était mal habitués ces derniers samedi, même si c'était à prévoir, le 15 décembre dans la ville Rose, les forces de l'ordre n'ont jamais été débordées ou si peu...
Version optimiste : après des blocages en matinée (dont, encore un coup, le dépôt d'Amazon) plus de 5000 personnes occupent les boulevards en toute illégalité, accompagnées d'un petit millier de syndicalistes en manif déclarée leur cavalant au train (en marche). Des barricades à Jaurès, Victor Hugo, St Sernin, la place du Capitole occupée puis brutalement dégagée. Pas si mal pour une ville où le centre-ville était interdit aux manifs depuis des années. Et toujours cette solidarité, cette joie retrouvée entre anonymes. Si une barricade est (osons le mot) un acte d'amour entre participants, on considère que l'émeute n'est pas un but en soi, tout juste un moyen parmi tant d'autres et qu'elle ne se décrète pas.
Quelle que soit la version à retenir, c'est tout naturellement qu'en se quittant dans la nuit, on se disait "À samedi prochain". On verra bien.
Ce 15 décembre est également apparue, à Toulouse, cette chanson qui, sur un air bien connu, rappelle les riches heures des airs des années d'après 68. Quant à la grève, rêver, au moins, ne coûte rien.
Les deux samedis
précédents, il avait déambulé avec un équipement de protection
complet : masque, casque, veste de protection coquée. Samedi 8,
cet équipement lui a été confisqué par des policiers, dès
9 h 15, dans une des rues donnant sur l’Arc de triomphe.
« Je ne suis pas d’accord, mais je peux éventuellement
comprendre qu’on m’enlève mon masque et mes lunettes,
témoigne-t-il. Ce que je ne comprends pas, c’est qu’on a
aussi pris, volé, devrais-je dire, 120 fioles de sérum
physiologique, que j’avais apportées pour aider et soulager les
gens qui seraient forcément pris dans les gaz lacrymogènes. »
« Mon ami a
demandé pourquoi on nous enlevait nos masques si les policiers y
avaient toujours droit. Réponse de l’un d’eux, très menaçant,
à deux centimètres de son visage : “C’est pour mieux te
casser la gueule.” » Lassé
d’avoir assisté à des violences de la part des policiers, dont
des tirs de flashball au visage, à plusieurs reprises, Jean-Philippe
s’interroge à haute voix sur la « dictature » que
serait en train de devenir la France. « En fait, on
te dit de fermer ta gueule, c’est tout », s’indigne-t-il.
Il promet néanmoins de revenir manifester le 15 décembre à Paris.
Avec de moins en moins l’intention de « rester pacifique,
puisque ça ne sert à rien ».
Mediapart
10/12/2018
Tiens, voilà-t-il pas que les camarades de LKDS se mettent au karaoké :
Ce matin, la presse parle de douze
blessés à Toulouse. Ce n’est même pas le nombre de personnes que
j’ai pu prendre en charge dans l’après-midi. Certains parmi nous
ont raconté avoir chargé les personnes quatre par quatre dans les
véhicules de secours qui parvenaient jusqu’à nous. J’ai même
du mettre un blessé à bord de la voiture d’un riverain qui
passait par là, à quelques mètres de la charge de police, et qui a
rapidement accepté de le conduire à l’hôpital.
Ce matin, la préfecture comptait 5.500 manifestants dans
Toulouse : il faut vraiment être resté chez soi toute la
journée pour y croire. A 14h, le boulevard Lacrosses dégueulait une
foule compacte, un cortège tellement long qu’il permettait aux
premiers de ne pas entendre les grenades qui visaient les derniers.
(...)
Je n’ai pas envie ici d’exprimer mon point de vue sur la
violence en manifestation ; la vérité, en tout cas, est qu’il
ne s’agissait pas d’une « centaine de casseurs »
comme l’évoquent les journaux, mais de milliers de personnes qui
se succédaient, se soutenaient, se soignaient, s’encourageaient.
Impossible pour les gendarmes de faire quoi que ce soit, hormis
contenir bien imparfaitement l’émeute et répliquer à coups de
flash-balls et de grenades. Médiatiquement, les violences qui ont eu
lieu sont peut-être un mauvais coup mais elles ont été un vrai
coup de génie tactique. La queue de cortège a concentré
l’essentiel de l’attention sur elle, servant de point de fixation
pour les forces de l’ordre qui étaient déjà trop peu nombreuses
pour l’enrayer. Pendant ce temps, la tête de cortège continuait
sa route et s’emparait de la ville. La presse raconte que les « casseurs » étaient des
banlieusards profitant de l’occasion pour « tout casser »
-comme si la violence révolutionnaire était un simple loisir. De
mon côté, j’ai passé la journée à soigner des gens très
divers : lycéens voulant riposter à la violence subie toute la
semaine, étudiants, travailleurs de tous secteurs et tous âges
(vers 18h30, j’ai même administré du sérum phy à un retraité
qui avait été gazé), filles et garçons, « anars »
comme gilets jaunes et écolos, tous unis et constamment solidaires
sans regarder leur origine.
Pendant
que dès l'ouverture, le Décathlon connaissait son Black friday
(rayon casques de vélos et skate et lunettes de ski et plongée) les
gardes mobiles (GM) occupaient le haut de la rue Rémusat depuis 9h.
À
10h, plusieurs équipes de la BAC patrouillaient à Jeanne d'Arc
(épicentre de l'émeute du 1 décembre) fouillaient déjà les sacs
et palpaient les "suspects". Rappelons que l'appel à J.
d'Arc était pour 13h.
À
13h : déception. La manif maigrelette est entièrement maquée par
la gôche traditionnelle et syndicale qui ne voit aucun inconvénient
à être cernée de flics et dont la protestation consiste à se
mettre à genoux mains sur la tête à l'image des mômes de
Mantes-la-Jolie. Abject. S'ils jouent à terroriser des gamins, il
est de la responsabilité des "adultes" de ne pas, de ne
plus, prendre une pose de victimes. Z'êtes définitivement largués,
bureaucrates.
Bref,
cette manif se dirige vers Arnaud Bernard où est censée se trouver
la manif "climat" mais où on a la bonne surprise de
retrouver deux mille Gilets Jaunes plus "plébéiens",
prols et plus équipés (et qui viennent parfois de loin (fin fond du
Quercy, toute le Hte Garonne, etc.) Coté symbolique des cordons de
GM tentent d'empêcher la jonction des deux groupes et se font
dégager "en douceur".
Moment
statique et hésitant.
Et
les "climatiques " et autres militants partent vers Compans / St
Cyprien entraînant une partie de la manif alors qu'une autre ne voit
pas pourquoi on irait se perdre là-bas et pas vers le centre-ville
(sa magie de Noël). Les GM commencent à pousser au bouclier le
millier du rond-point d'AB alors que la tête de la manif
"officielle" atteignant la station de métro
Compans-Cafarelli se fait... copieusement grenader par les flics
massé dans toutes les rues à droite (vers le centre, donc).
Comme
dès qu'il s'agit de rosser les cognes tout le monde se réconcilie,
la manif aura donc désormais deux rythmes : une avant-garde autiste
qui marche vers le pont des Catalans et St Cyp et une arrière-garde
qui combat les schmidts avec les moyens du bord sur un des seuls
boulevards où il n'y a pas un putain de chantier ! Grenades, reculs,
contre-attaques, grenades etc. et les premiers blessés. Ainsi
jusqu'à la place Héraklés.
C'est
sur le pont des Amidonniers que les contre-attaques reprennent de la
vigueur et vont enfin durer. Enfin de quoi bloquer les rues et
quelques incendies sous les tirs des GM postés au canal de Brienne.
La manif est alors complètement mixte écolos / GJ / lycéens¹
/ étudiants / ruraux / urbains...
Parenthèse
esthétique : quiconque a aimé Ran ou Kagemusha n'a pu
qu'être frappé par cette foule plus ou moins jaune affrontant les
hommes en noir sous les nuages et sur ce pont : on l'aurait cru filmé
par Akira Kurosawa mais en plus beau : c'était enfin vrai.
Infos
arrivant sur les (quelques) portables présents : pendant que ça
fritte aux Amidonniers, il y aurait des affrontements entre François
Verdier / Wilson et autour de Jeanne d'Arc.
À
partir de là (il est 16h30 environ) vont exister plusieurs fronts.
Un
bon millier de GJ / lycéens / divers vont occuper la place du
Capitole. Face à face tendu avec des GM venus du côté Donjon qui,
ayant ordre de ne pas grenader sur le marché de Noël et les
terrasses de luxe vont mener quelques charges mollassonnes face à des
gens qui ne reculent plus. Hélico au-dessus de la foule. Résultat,
malgré leur équipement, ils finissent par reculer jusqu'au métro
Capitole, laissant la place aux mains des insurgés dans une ambiance
tout à fait joyeuse.
Au
même moment, la grosse manif a passé le pont des Catalans et grâce
à la rénovation urbaine il y a enfin de quoi se mettre sous la dent.
L’îlot en chantier face aux Abattoirs est désossé et finit en
barricades et projectiles. Incendies.
Parenthèse
en hommage : les équipes de Street medics (secouristes) ont fait un
boulot formidable. Précisons pour avoir échangé avec eux que ce
sont tous des travailleurs de la santé (internes, pompiers,
infirmiers) , qu'ils refusent de soigner les keufs qui sont assez
bien pris en charge comme ça ("je veux bien lui pisser dessus
pour désinfecter" dixit un medic) et qu'ils avaient ouvert une
infirmerie dans un appartement pour que les blessés ne
se fassent pas ramasser. À 17h, ils en comptaient plus de 40 (tête,
mains, jambes). Chapeau à eux et elles !
La
nuit est tombée. Rive gauche, l'émeute, rejointe par les lascars
des cités, va osciller entre St Cyp / Patte d'Oie / Arènes pour
revenir rue de la République après 20h.
Rive
droite, des groupes épars bordélisent mais moins que le 1 décembre,
les magasins sont fermés, plus rien à foutre des courses de fin
d'année.
Chose
vue vers 19h : une vingtaine de GJ, tendance darons / daronnes
bloquent tranquilou une voie des allées Jean Jaurès. Six bagnoles
de flics déboulent, gazent, la BAC tabasse copieusement et les duls
repartent en laissant tout le monde à terre. Peut-être en
embarquant un mec, tout le monde, n'a pas vu la même chose selon où
il était. Ce passage à tabac n'était que frustration, rage et
sauvagerie impuissante. Combien d'autres saloperies ailleurs ?
Alors
question de base : si, ce 8 décembre, où brûlaient Bordeaux,
Toulouse, Marseille, St Étienne, Le Puy, etc toutes les forces de
l'ordre étaient mobilisées, il reste quoi ? Les paras ? La Légion
? Pourquoi ne pas faire appel à Blackwater ?
Saluts d'une ville qui redevient vivable.
ps
: Dans la nuit de vendredi, grosse émeute à Athènes. Les révoltés
se mettent au gilet jaune (ce qui est stupide, de nuit d'ailleurs, ça
fait une belle cible). En Serbie et en Irak, les manifestants contre
la vie chère enfilent des gilets. Comme disait ce réac d'Audiard (père)
"Depuis qu'en France, on a appris la liberté aux autres en
trucidant la moitié de l'Europe, on peut plus s'en empêcher". On plaisante, bien entendu.
ps
politique : Bien entendu qu'il y a là-dedans des fafs. L'ironie
serait qu'après avoir été les "crétins utiles du Capital",
ils deviennent les idiots utiles à la Sociale. Mais nous en sommes
loin. Quoique tout va si vite de nos jours. À commencer par la joie
qu'ont de parfaits inconnus à se parler ou s'entre-aider.
¹Lycéens qui sont partis en manif sauvage à Toulouse lundi,
mardi, mercredi, jeudi, vendredi...
La révolte contre les taxes abusives a toujours été une constante française (et anglaise, hollandaise, américaine, etc.) Rappelons, en préambule, que sous l'ancien régime, chaque région possédait non seulement ses unités de mesure mais aussi sa fiscalité. Avec, comme conséquence pratique, que la circulation des marchandises hors des barrières d'octroi relevait de la pure et simple contrebande. Le plus célèbre des contrebandiers d'alors, Louis "Belle humeur" Mandrin (1725-1755) est entré dans l'histoire comme un rebelle ayant organisé une guérilla ayant su tisser un fabuleux réseau de protection au sein du peuple. Originaire du Dauphiné, Mandrin, qui avait vu pendre un de ses frères comme faux-monnayeur est d'abord condamné à mort en 1753 pour une bagarre. Il déclare alors la guerre aux collecteurs d'impôts, les fermiers généraux, qui taxent le sel (gabelle), le tissus ou le tabac, entre autres. Il devient très vite chef d'une bande de centaines de passeurs savoyards (la Savoie est alors rattachée au royaume de Sardaigne), formés militairement. Combattant l'administration, il recrute en libérant des prisonniers poursuivis par la ferme générale (en évitant d'enrôler des assassins) et se garde d'attaquer le peuple. Il étend son réseau sur les régions de l'Auvergne, la Bourgogne, Rhône-Alpes et organise même des ventes de produits détaxés en occupant les villes de Beaune, Autun, le Puy-en-Velay (sa préfecture inflammable), Rodez, sous les acclamations de la populace, forçant parfois les collecteurs à racheter sa marchandise à ses conditions. Sa légende populaire commence de son vivant, non seulement auprès des masses mais chez certains philosophes comme Voltaire.
À la demande des fermiers généraux, Louis XV envoie l'armée et, après plusieurs campagnes infructueuses, des soldats déguisés en paysans envahissent la Savoie, où est réfugiée sa bande, violant la souveraineté de ce duché.
Comme tout héros plébéien, Mandrin sera trahi par les siens et jugé en urgence à Valence pour éviter son extradition en Savoie. Son exécution, le 24 mai 1755, passera elle aussi à la légende : roué de coups six heures durant, Mandrin exhortera les quelques 6000 spectateurs à poursuivre la guerre contre le fisc.
Un "Testament politique" sera imprimé la même année à Genève. Extrait : "J'ai
cherché la cause de cette grande affluence de Peuple qui venait chaque
jour s'enrôler sous mes drapeaux; en remontant à sa source, j'ai
découvert qu'elle prenait elle-même son origine dans le système des
Fermes. J'ai trouvé que c'est à celui-ci, qui a renversé en France le
premier ordre du Gouvernement économique, politique, civil qu'il
fallait l'attribuer. Depuis soixante ans une espèce de maladie a attaqué
le Ministère Français. La fureur des Baux (taxes) a prévalu sur tous
les autres systèmes de l'administration. Tout est Ferme aujourd'hui en
France, tout est Contrat, bientôt, il ne sera permis au Peuple de
respirer que par entreprise."
Une complainte naît dès la mort du bandit héroïque. Diffusée par les colporteurs, elle se chante sur un air tiré de l'opéra Hyppolite et Aricie de Jean-Philippe Rameau (1733). Prenant quelques libertés avec l'histoire, cette chanson connaîtra des regains de popularité durant la Commune de Paris et au sein des maquis de l'occupation. Elle a connue de nombreux enregistrements. Si le plus connu est d'Yves Montand, on lui préfère la version de Monique Morelli, chantée en générique de la série Mandrin, bandit d'honneur d'Albert Vidalie et Philippe Fourastié (ORTF, 1971)
Rien de mieux que Bosch pour avoir une petite idée de la chose
Dans un grand mouvement de solidarité, les Vanneaux ont décidé d'accompagner notre président, notre gouvernement, nos députés faire un petit tour aux enfers.
Hélas ! Lucifer étant plus balèze que nous, divers bugs durant l'enregistrement nous privent de nos judicieuses et joyeuses introductions, du moins pour deux morceaux. Bon, on a recollé les chansons tronquées.
Bonne écoute...
Little Bob Story Riot in Toulouse
Thiéfaine 1ère descente aux enfers par la face nord
Higelin Ici c'est l'enfer
Zone infinie L'éternel retour
The Ruts Babylon's burning
Max Romeo Chase the devil
Big Bill Bronzy Hell ain't but a mile and a quarter
Roberto Goyeneche Yira, yira
I Am L'enfer
Hannes Wader Die Moorsoldaten
Theodorakis To stageio
Uncle Topedo Satan kingdom must come down
The Jam Private hell
Niska Story X
Austin Pitre Les flammes d'enfer
La Cliqua Dernier jour sur terre
Willie Dunn I pity the country
Sandie Shaw Sympathy for the devil
Ce samedi 1 décembre à 13 heures, il fallait être sourd, aveugle ou trotskiste pour ne pas comprendre que les affrontements allaient être inévitables.
Faut dire que la manifestation des gilets jaunes avait commencé sous de bons augures : une première prise de parole crachant sur les immigrés et l'intervenante est virée aussi sec sous les quolibets (ça ? L'extrême droite ?) des flics municipaux faisant ce qu'ils savent faire de mieux, c'est à dire emmerder un sdf, aussitôt ramenés à la raison (l'extrême droite, encore ?)
Et puis vers 14h, alors qu'une partie de la manif prétend se joindre au happening syndical qui tente de raccrocher les wagons, l'autre partie emprunte la rue Bayard dans l'intention d'aller bloquer la gare Matabiau.
C'est là que les flics ont tiré une quarantaine de grenades. Et c'est là qu'au lieu de reculer, la foule entame ce qu'on est bien forcé d'appeler une émeute.
Ce qui fut le plus remarquable, ce ne fut pas la froide détermination des protagonistes, l'absence de peur, le mépris le plus total pour les pratiques balisées des casseurs ordinaires (pas de vitrines cassées ou de magasins pillées, ça se passe juste entre eux et nous), le paradoxe de barricadiers chantant la Marseillaise pour entonner ensuite l'Internationale, non, ce qui fut le plus frappant, ce fut la gentillesse, la fraternité, la complicité entre ces parfaits inconnus qui ont résisté cinq heures durant à un torrent de grenades lacrymogènes, soufflantes, de désencerclement dans une joie contagieuse rendant ainsi son honneur à une ville qui était en voie de momification.
On ne rapporte là que ce qu'on a vu.
Et on cède la parole à monsieur Roberto Piazza du Havre. Encore merci Bob.
Camarades catastrophistes, puisqu'on en est à se demander, s'il convient vraiment de se mettre à planter des palmiers dattiers du côté de Hambourg, qu'on suppose que la Creuse ressemblera au désert de Gobi d'ici une génération ou plutôt deux, si on devra bientôt aller visiter notre vieille tata de St Flour en trottinette même pas électrique, si Golfech pétera avant Fessenheim ou l'inverse, ou bien qui des Indiens ou des Pakistanais appuieront les premiers sur le bouton fatidique, à moins que du côté du Détroit de Kertch ou de Pyonyang... Voici quelques angoisses d'il y a cinquante ans, époque où on se marrait avec l'épée de Damoclés du moment. Amis archéologues, soyez sans rancune : c'étaient des temps obscurs pour votre belle science. Serge Reggiani dans L'homme fossile (1968).
Péremptoire, un fanzine de ma jeunesse proclamait, en son éditorial, Nous ne serons pas les Eddy Mitchell de notre génération !
Même s'il est vrai qu'on préférera toujours plutôt être Louise, Monsieur Eddy a finalement fait une carrière discographique et cinématographique plutôt moins pire que bien d'autres.
Au moins et contrairement à beaucoup de ses semblables, notre Schmoll de Ménilmontant sut pratiquer une chanson gentiment contestataire bien AVANT mai 68, se dotant ainsi d'une image de crooner et rocker sceptique pessimiste capable de rallier des blousons noirs de la Porte de Montreuil comme des cadres en plein malaise, comme on disait à l'époque.
Prenez sa chanson "sociale" par excellence, Société anonyme de 1966 (avec ici une apparition de Lulu) :
Monsieur John Warsen, du blog Je suis une tombe, nous fait remarquer que le gars avait auparavant commis une adaptation du No particular place to go d'un Chuck Berry qui, s'il n'avait cure du prix de l'essence, galérait avec sa ceinture de sécurité.
Cette reprise l'ayant rendu lyrique (John, pas Eddy), on se fait une joie de citer la fin de son article :
L'adaptation d'Eddy
Mitchell, quant à elle, escamote subtilement la question raciale,
pour se concentrer sur une critique radicale du capitalisme
financier. Eddy venait de lire La société du spectacle de
Guy Debord et voulait se payer le rêve américain, en épinglant ses
pires travers. A l'époque où sort le quarante-cinq trous A
crédit et en stéréo on pensait que le consumérisme ne
s'en relèverait pas, mais finalement sa capacité à récupérer sa
critique fonde son aptitude à la survie, et je crois bien que tant
que l'homme blanc n'aura pas pollué la dernière rivière et abattu
le dernier arbre, il n'acceptera pas l'idée que l'argent ne se mange
pas, il est un peu idiot, à crédit et en stéréo.
À tort ou à raison, il est beaucoup question de jacqueries ces derniers temps. Voilà l'occasion de se pencher sur des événements survenus outre-manche autour de 1649. Résumons à la louche : de 1642 à 1651, le royaume d'Angleterre connaît une série de guerres civiles résultant de l'affrontement entre son souverain, Charles I, et son parlement qui se dote pour l'occasion d'une force baptisée New model army, dirigée, entre autre, par le hobereau et futur dictateur Oliver Cromwell. Ce conflit entre deux pouvoirs, également voraces, s'est déroulé au sein d'une kyrielle de sectes, hérésies, variantes du protestantisme, qui connurent un franc succès au sein des Têtes rondes, soldats du parlement, ainsi nommés pour leurs coupes au bol les différenciant des aristocrates chevelus.
Au nom d'idéaux qu'on peut qualifier de millénaristes, d'anarchistes ou de communistes primitifs, ces ancêtres des conseils de soldats n'hésitèrent pas à répandre des idées remettant en cause les différences sociales ou la sacro-sainte propriété. "Quand Adam bêchait, quand Ève filait,
où donc était le gentilhomme ?" proclame un des innombrables pamphlets circulant dans l'armée, souvent au mépris de l'interdiction formelle des officiers.
Parmi ce fouillis de révolutionnaires, trois groupes furent particulièrement populaires : les Levellers ( Niveleurs) dont certains devinrent Diggers (Bêcheurs) ainsi appelés pour leur communisme chrétien agricole et les Ranters (Divagateurs) terme péjoratif donné à ces ennemis radicaux de la propriété et de la morale considérés par les puritains comme des hérétiques de la pire espèce.
Vers 1649, un ex marchand de draps, ancien soldat de Cromwell, Gerrard Winstanley, écrit une série de manifestes dans les quels on peut lire : "Lorsque l'humanité commença à acheter et à
vendre, elle perdit son innocence et les hommes commencèrent alors à
s'opprimer les uns les autres et à frauder leur droit naturel" ou " C'est indéniablement affaire de justice que le
peuple travailleur puisse bêcher, labourer et habiter sur les communes,
sans avoir à louer ni a payer une redevance à quiconque". Et joignant la pratique à la parole, ces anciens soldats devenus chômeurs occupent (on emploie alors le mot squat, promis à un bel avenir) des terres sur la colline St George dans le Surrey pour y réaliser leurs rêves de communauté égalitaire de travailleurs.
Bien évidemment les propriétaires et notables locaux, terrifiés à l'idée que paysans et soldats s'emparent des terres, se font un devoir de mettre fin à cette expérience avec la brutalité qui leur est coutumière.
À l'été 1650, la soldatesque a déjà détruit les diverses communautés inspirées par les diggers.
D'après plusieurs historiens, une partie de leurs idées se retrouveront chez quelques pirates britanniques qui créeront d'autres communautés, lointaines et maritimes, celles là.
Il nous en reste au moins un hymne, Digger's song, qui aurait été composé par Winstanley lui-même, ici interprété par Chumbawamba.
Une autre marche narre l'histoire de la colline St George, World turned upside down (Le monde à l'envers). Elle fut composée par le chanteur folk et écrivain de livres pour enfants Leon Rosselson en 1975.
Ou celle de l'agitateur chantant, Billy Bragg (1987)
Comme répliquait un copain à un bigot lui reprochant ses écarts de conduite : "Je préfère encore aller en enfer avec mes copains qu'au paradis avec des connards dans ton genre."
Mais point n'est besoin, pour cela, d'aller courir chez Virgile ou chez Dante. Tout un chacun peut vivre dans un pandémonium plus ou moins personnel ou en collectif. Ce qui a été beaucoup chanté.
Les Vanneaux de passage vous convieront donc une descente aux enfers le lundi 3 décembre à 17h30 sur les ondes de Canal Sud. Sauf si le diable nous emporte d'ici là.
Et pour illustrer le propos précédent, les Canadiens de Dead South (marrant, ça, comme nom) dans In hell I'll be in good company. On vérifiera ça. Mais c'est fou ce qu'on peut faire avec un banjo et un violoncelle.
On en revient toujours à Fréhel.
Parfois par les voies les plus sinueuses.
Tout vient de cet article au sujet des détournements situationnistes de Guy Peterman publié par le collègue George le 15 octobre dernier.
Pas mal de questions restaient en suspens après ça.
Remercions donc chaleureusement les éditions-privées-hors-commerce d'avoir mis à disposition des enregistrements de ces détournements, avec des maquettes de Pour en finir avec le travail accompagnées d'une brochure où on en apprend un peu plus.
On peut les joindre à cette adresse : edition-privee-hors-commerce@mail.com pour jouir de leur salutaire taf d'archiviste
Les rocks made in Peterman ayant été publié par notre Lexomaniaque, une nouvelle surprise vient du détournement de cette valse lente de Fréhel, écrite par Charlys et Maurice Vandair (1935)
Pour mémoire :
Extrait de la brochure:
Peu de mois après
cette parution (du disque Pour en finir avec le travail en 1973, ndr ) Guy Peterman projette de faire un disque de rocks
détournés et avec Francis Lemonnier enregistre une maquette de
quatre titre au studio Saravah en 1975.
Tout cela est détaillé article cité plus haut ndr.
[Les musiciens étaient] Francis Lemonnier,
saxophone ; Michel Muzac, guitare électrique ; Olivier
Zdrzalik-Kowalski, guitare basse,claviers. Le chanteur et le batteur
sont inconnus. Guy Peterman donne la réplique dans le premier titre.
Au cours de cette
même session d’enregistrement et avec les mêmes musiciens, un
cinquième titre est enregistré : il s’agit d’une valse dans
l’esprit du FHAR (Front homosexuel d’action révolutionnaire), Où sont tous mes
amants ?, détournée et chantée par Jean-Louis Rançon (Francis
Lemonnier y joue de l’accordéon,
le violoncelliste est inconnu).
Ce projet de disque
n’aboutira pas mais Guy Peterman continuera à détourner des rocks
qu’il proposera à divers groupes
musicaux dans les années 1970-1980, et récemment, en 2016, le
groupe Gommard a enregistré Y a du
baston dans la taule ! (Riot in Cell Block # 9) sur des paroles de
Guy Peterman.
Interprété par Le
jour de l’addition, ce rock figure aussi sur le CD La Belle qui
accompagne le livre Au pied du mur, 765
raisons d’en finir avec toutes les prisons (L’Insomniaque, 2000)
Notons que d’autres
liens avaient existé entre ces protagonistes, dont la plupart sont
décédés aujourd’hui : Guy Peterman avait connu Étienne
Roda-Gil du temps de la JAC (Jeunesse anarchiste communiste) en 1967.
Et c’est ce dernier qui avait suggéré à Francis Lemonnier et ses
amis le nom de leur groupe, Komintern (le lien renvoie ici à l'article qui leur est consacré )...
Fin juillet 1989, «
sans amertume aucune », Guy Peterman se suicide au cyanure sur les
marches de l’Institut
médico-légal de Paris. Il est inhumé au cimetière du
Montparnasse.
Pour clore ce tour des héritages de l'incontournable Fréhel, on vous avait passé une reprise toute en finesse de la même rengaine par les Garçons Bouchers, en 1992 et en public. Toujours chez Georgie, on a en plus, grâce à un commentaire du sieur Hardipetit, une vidéo toute aussi savoureuse dans laquelle le rôle de la femme fatale est tenu par la camarade Lola Miesseroff (celle là-même qui commit l'intéressant Voyage en outre-gauche chez Libertalia l'an dernier).
À l'origine, un air qui fit les beaux jours des goguettes du XIXème siècle, ces ancêtres des café-concerts, puis des cabarets et précurseurs au sein desquels des chansonniers chroniquaient la vie sociale.
On en a passé une version par Armand Mestral, datant du Siège de Paris, en août 2015
Autre exemple d'un des multiples recyclages de la même mélodie, La complainte du Charlot de La Courtille par Nenesse et Totor, extrait du cd Goualantes de la Vilette et d'ailleurs (l'Insomniaque).
Or, un docte lecteur, Michel Davesnes, nous a récemment signalé : L'air qui sert de support à cette chanson a beaucoup servi, semble-t-il.
Au départ, il s'agit de "Te souviens-tu*", qui illustre l'épopée
napoléonienne. Plus proche de nous, l'air a été repris du côté de
Charleroi, en Belgique, et ça a donné "Lolote", chantée ici par le grand
Julos Beaucarne.
Cette gaillarde interprétation, issue d'un traditionnel wallon, nous a tellement réjouie qu'on vous en donne une transcription :
Au bour del Sambre et pierdu din l'fumière
Voyez Couillet eyet s'clotchi crayeu
C'est là que d'meure em' matante Dorothée
L'veuve dem' mononq Adrien du Crosteu.
A s'nieuve méson nos avons fait ribote
Diminche passé tout in pindant l'cramya.
Pou l'premier coup c'est là qu'dj'ai vu Lolotte
Ri qu'd'y pinser sintez comme em cœur bat (bis)
Gniavet drolà les pu gaies du villadge
In fait d'coumères on n'avou qu'à schwési
On a r'ciné à l'omb' padzou l'fouilladge
Au mitan d'ell' cour padzou l'gros cherigi
Em bonne matante a d'ell bière in bouteye
C'n'est nin l'faro qu'est jamais si bon qu'ça.
Din s'chique Lolotte aste si bi vermeille
Ri qu'd'y pinser sintez comme em cœur bat (bis)
Y dalet mieux, les pinses s'tintent rimplies
Djan l'blanchisseu tinguelle es violon
Y dit z'éfants nos avons çi des filles
Qui n'demandes fonk qu'a danser l'rigodon
Mais qué plési, qué Lolotte est contenne
Après l'quadrille on boute en' mazurka.
Dj'ai triané in serrant s'main dins l'mienne...
Ri qu'd'y pinser sintez comme em cœur bat (bis)
V'là l'swer venu pour dinser chacun s'presse
El violonneux raclout aveuc ardeur
L'bière comme l'amour vos faisou tourner l'tiesse
Vin nom d'en chique dji nadjou din l'bonheur
Mais l'pa Lolotte in viyant qu'dji l'imbrasse
D'un coup d'chabot m'fait plondgi din l'puria. El coumère s'inceurt eyet mi dji m'ramasse
Ciel qué coup d'pid sintez comme em cœur bat (bis)
Dji m'sovéré du cramia d'em matante
Dji crwé bi qu'jai l' croupion mitant desmis
Dji prind des bains à l'vapeur d'yau boullante
Grignant des dints tous les coups qu'dji m'achi
Mais quind j'devrou s'quetter m'dernière culotte
Pour m'apougny aveu s'man eyet s'pa. Putot mori que d'véqui sin Lolotte
Ri qu'd'y pinser sintez comme em cœur bat (bis)
* Te souviens-tu ? est effectivement une chanson de nostalgie napoléonienne datant de l'immédiate Restauration. Paroles Émile Debraux, musique Joseph-Denis Doche
Non seulement on sait bien va tous y passer, mais l'anniversaire de la Grande boucherie est là pour nous rappeler que les diverses manières collectives d'atteindre cette étape sont non seulement excessivement variées mais aussi fort à la mode au cours de notre grande peur de l'an 2000.
Adeptes de l'adage "Dansons en attendant la mort", plutôt que de se repentir de quoi que ce soit, faisons une pause grâce à une petite ballade apocalyptique, le Blues en fin du monde chanté par un Nino Ferrer qui n'hésitait pas à se représenter sous les traits du dépressif Capitaine Nino d'Hugo Pratt.
C'est extrait du ''Concert chez Harry '' enregistré les 13 & 14 juin 1995 .