mardi 30 août 2022

Christine Sèvres, encore une malchanceuse

 

Voici une personnalité attachante et méconnue du monde des cabarets à l'époque dorée de la rive gauche.
Jacqueline Amélie Boissonet (1931-1981) est devenue Christine Sèvres dans sa jeunesse fugueuse pour ne point affecter sa famille, qui avait honte de ses envies de devenir actrice et chanteuse, ce qui ne se faisait point chez les jeunes filles normales de l'après-guerre, et en s'inspirant de la station de métro d'en face, reprenant sans le savoir (ou en le sachant, on n'y étais pas) la tradition des agents secrets de la France libre de l'époque londonienne.
Vu que le théâtre ne lui réussit guère et qu'elle doit se coltiner une gosse fruit du péché, elle fut vendeuse, mannequin, entraîneuse de cabaret, serveuse, portraitiste aux terrasses de cafés, dessinatrice industrielle, secrétaire d'écrivains, puis employée de bureau pendant la première moitié des années 1950.
 
En 1956, elle se lance plus sérieusement dans la chanson et la poésie en se produisant à l'Écluse, au Vieux Colombier, chez Milord l'Arsouille, à la Colombe, etc. C'est en 1956 qu'elle y croise l'homme de sa vie, un débutant nommé Jean Ferrat, qui lui offre quelques chansons et l'épouse en 1961.
Malgré l'ombre porté par Ferrat qui devient de plus en plus populaire sans être encore le chanteur officiel du parti, elle enregistre trois tires pour une compilation de cabaretiers en 1959 puis son premier 45 tours, en 1962: Les Nomades, d'une facture très classique pour l'époque mais avec un voix remarquée.
 

Malgré des premières parties de Brassens ou Barbara, elle demeure relativement discrète et la sortie de son album, Oscar et Irma, en 1968, plutôt inaperçue. Faut dire que sortir un album le 10 mai de cette année est un sacré coup de scoumoune qui ne peut conduire qu'à un four monumental ! 
On y trouve néanmoins une surprenante perle avec cette reprise de Brigitte Fontaine, Les dieux sont dingues.
 

Bloquée dans sa carrière, rendue amère par le succès de monsieur Sèvres, elle persiste un temps à l'Écluse avant de jeter l'éponge en 1972.
Elle suit néanmoins son moustachu avec sa fille dans sa résidence ardéchoise où elle devient peintre. Elle n'a regagné le studio d'enregistrement qu'en 1980 pour reprendre la Matinée, de 1969, un duo avec la vedette.


Bouffée par le crabe, elle meurt dans le Sud en 1981.

dimanche 14 août 2022

Un fossoyeur nommé Joe

 

Cette photo trouvée sur le blog de Mr Pop nous a fait creuser le sujet.
Contrairement à ce qu'aurait fait son collègue Malcolm Mc Laren, inventeur auto-revendiqué des Pistols, le trotskiste Bernie Rhodes, manager des Clash n'a jamais utilisé cette anecdote pour monter une légende et le premier intéressé, néanmoins pas avare en anecdotes souvent exagérées, ne s'en est guère vanté.
Et pourtant, ce mélancolique fossoyeur, employé municipal du cimetière de St Woolos à Newcastle n'est autre que John Graham Mellor, plus connu sous son nom de scène : Joe Strummer.
Un public amorphe

En 1973, le Joe, 21 ans, a déjà de la suite dans les idées : ayant rompu avec son milieu bourgeois (père diplomate, mère infirmière) il accepte tout boulot pour survivre dont celui-ci, à 15 livres la semaine, en attendant de connaître la gloire grâce à son premier groupe The Vultures. Ce qui signifie "Vautours" et colle donc à merveille avec le job du moment. Le groupe n'ira nulle part et notre Rastignac du rock déménage dans un squat londonien de Walterton Road pour monter un groupe de pub rock tout simplement nommé selon l'adresse du domicile : The 101er's.  

Qui se font une renommée dans les bistrots de la capitale, sortent un single (dont voici la face A) et se retrouvent avec une bande d'excités en première partie, The Sex Pistols, qui va changer la destinée du jeune homme.
Mais ça, c'est une autre histoire...

 

Achevons avec une anecdote, un autre personnage des débuts du punk anglais, Dave Vanian, des Damned, fut lui aussi fossoyeur à ses débuts. Il l'assuma beucoup plus volontiers en se mitonnant un look de Nosferatu. 
Une curiosité en hommage à la profession, un texte du jeune David Bowie de 1966.
 


lundi 8 août 2022

Charniers universels

 

La Bornaina (Asturies)

Ce n'étaient ni des héros ni des martyrs, ils sont seulement partis se battre, avec la rage des pauvres, contre un fascisme brutal.
Ils ont combattu les caciques et le mépris militaire et y ont perdu leurs vies simplement pour la dignité.
Les tueurs rigolaient et le putain de curé les bénissait pendant qu'ils les flinguaient au nom de son Dieu.
Face au soleil, à l'aube, avec une chemise bleue, on les a jetés comme des chiens dans une fosse commune.
Le silence des morts crie à la liberté.
Ils les ont tué d'un tir dans la nuque ou fusillé contre un mur, les ont éliminé avec une fureur criminelle. 
Les tueurs rigolaient et ce putain de curé les bénissait pendant qu'ils flinguaient au nom de son Dieu.
Ceux qui ont appuyé sur la gâchette ne devraient jamais oublier que leurs balles n'ont pas tué tout le monde. Que personne ne tue la vérité. 
Dans une tranchée, entre cadavres criblés, est née une démocratie.
Face au soleil, à l'aube, avec une chemise bleue, on les a jetés comme des chiens dans une fosse commune.
Le silence des morts crie à la liberté.
LA PLAIE RESTE OUVERTE !    
Gatillazo Fosa común (trad. maison)  
 

 

Photo certainement montage (on ne tire pas si près d'un mur, ça ricoche !)

Pravia (Asturies)