samedi 28 avril 2018

Nico par Gainsbourg

Avant d'être égérie new-yorkaise et devenir une des voix du Velvet Underground, puis d'enregistrer six albums en solo, Christa Päffgen (1938-1988) mieux connue comme Nico, a été mannequin à quinze ans et actrice à vingt ans.
Enrôlée, en 1959, par Fellini dans sa Dolce Vita, la starlette aura la vedette d'un film de Jacques Poitrenaud, Strip-tease, de 1962.
Dans ce film plutôt anecdotique, elle interprète une allemande qui déserte sa troupe de danse pour devenir strip-teaseuse et faire la rencontre d'un gosse de riche dont elle devient la maîtresse. 
Afin de se venger d'une humiliation de la part du jeune con, elle remet une dernière séance d'effeuillage avant de retrouver le chemin de la danse. 
On a eu chaud, mais la morale est sauve.
Un extrait intéressant avec le pianiste Joe Turner et un petit jeune qui perçait dans le métier, à quatre mains.

 

Ainsi que la fameuse scène qui est l'occasion d'une chanson écrite par Gainsbourg arrangée par le pianiste de jazz Alain Goraguer. Celui-ci travailla aussi avec Boris Vian et Bobby Lapointe. Même si le Lucien se plagie vaguement avec cette démarque de L'Eau à la bouche, c'est l'occasion d'entendre la voix si particulière de la future chanteuse en second du Velvet.

mardi 24 avril 2018

25 avril 1974

Le bon vieux temps de l'auto-stop
Cette histoire a beau être archi-connue, cette année on revient sur le quarante-quatrième anniversaire de la "Révolution" (le mot coup d'état serait plus juste) portugaise qui balaya en vingt-quatre heures suivies de deux ou trois ans d'espoirs, quarante ans de fascisme religieux à la sauce lusitanienne.
Elle fut conçue par quelques officiers subalternes des guerres coloniales (Angola, Mozambique, Guinée-Bissau) épuisés par une situation absurde, qui formèrent le "clandestin" MFA, Mouvement des Forces Armées, qui décidèrent de liquider le gouvernement de Caetano, "démocratiser, décoloniser et développer" et remettre, dans un premier temps, le pouvoir à une baderne d'opposition : le général Antonio Spinola.
Après une première tentative foireuse le 16 mars, le putsch fut déclenché dans la nuit du 24 au 25 avril après s'être assuré la neutralité de la Marine et de l'aviation. De son PC, "Oscar" (Otelo Carvalho) coordonne les mouvements de troupes vers Lisbonne, Porto ainsi que toutes les administrations, radios et les unités considérées loyalistes.

À 23h55 la diffusion chanson E depois de Adeus (représentant le Portugal à l'Eurovision) donne le signal de mouvement.
Mais l'histoire a surtout retenu le deuxième signal, celui de confirmation, passé à la radio à 00.20 : Grândola Vila Morena.

La suite : les objectifs tombant les uns après les autres, la population envahissant les rues malgré les injonctions des mutins, des affrontements minimum (il y aurait eu quatre morts), les prisons ouvertes et deux années d'intense agitation sociale qui termineront par une mise au pas suite à laquelle certaines têtes pensantes du putsch iront croupir en taule.



Enregistrée en 1971 par Zeca Afonso en hommage à la Sociedade Musical Fraternidade Operária Grandolense (Société musicale Fraternité ouvrière de Grândola — petite ville agricole de l’Alentejo, Sud du Portugal), Grândola Vila Morena est devenue un hymne politique et local.
Il est, depuis, régulièrement entonnée dans les manifestations et a trouvé, en 2013, un regain de force contre le gouvernement de Manuel Passos Coelho.
José Manuel Cerqueira Afonso dos Santos, "Zeca Afonso", (1929-1987) fut étudiant à Coimbra, vécut en Angola, devint professeur d’histoire au Mozambique, avant d’être renvoyé de l’éducation nationale pour ses prises de position politique. Il a fait plusieurs séjours dans les prisons de l’Estado Novo. Libéré, il a persisté à écrire, à chanter, à enregistrer des disques clandestins ou censurés. Il fut interdit de le nommer dans les journaux, de sorte que, pour contourner la censure, son nom écrit à l’envers (Esoj Osnofa) fut parfois employé dans la presse, reconnu par les initiés. Sympathisant communiste, puis d'extrême-gauche avant et après le 25 avril, il s’engagea en faveur de la Réforme agraire au Portugal, particulièrement en Alentejo

 Terminons sur un bel hommage venu du pays voisin : Lluis Llach, Abril74


jeudi 19 avril 2018

Béranger reprend Guthrie


Quelle mouche a donc piquée François Béranger pour, en 1978, chanter cette ode aux sections syndicales (sur l'album Participe Présent) ?
On suppose que ce fut certainement l'envie de rendre un hommage à Woodrow Wilson "Woody" Guthrie (1912-1967), immense chanteur américain country et folk des années 1930 et 1940.
Grâce à ce Blues parlé du syndicat adaptation de son Talking Union écrit fin 1941, on comprend  entre les lignes, que cet individualiste anarchisant de Woody avait du mal à suivre les dernières consignes, suite aux contorsions politiques du PC des États-Unis. En effet, les USA entrant finalement en guerre aux côtés de l'URSS, plus question d'entraver la production de l'effort de guerre, on ne veut plus voir les prolos qu'au boulot ou à l'armée.
Ne trouvant pas la version de Woody en solo, en voici une, contemporaine de son écriture, interprétée par les Almanac Singers, collectif d'agit-prop monté par Pete Seeger, Lee Hays (communistes orthodoxes, eux), Cisco Houston, Josh White, Millard Lampell, Sis Cunnigham, etc... dont Woody fit partie de 1941 à 1943 avant de laisser les staliniens jouer entre eux.


On constatera que Béranger écrivit une traduction tout à fait fidèle à l'originale, ce qui nous renforce l'idée d'un hommage à l'auteur bien plus qu'une apologie d'appareils sur lesquels plus grand monde ne se faisait d'illusions, même il y a une trentaine d'années.


Comme il y est fait allusion à la fin de cette version, une fameuse photo d'une grève qui dura plus de trois mois en Bretagne :
Grève du joint français (1972)
Et un joli portrait de l'auteur par le talentueux Robert Crumb.



lundi 16 avril 2018

Duo JeHan et Nougaro

JP Audiger et JeHan
En 1993, JeHaN Cayrecastel monte à Paris. Il occupera trois ans d'affilée la scène du théâtre Montmartre-Galabru avec uniquement des textes de Bernard Dimey.
Il en fait deux disques, Paroles de Dimey et Divin Dimey, en 1996 et 1998.
Claude Nougaro commente : La première fois que je l'ai entendu, il interprétait Bernard Dimey et les mains encore chaudes de bravos, je me suis précipité vers sa loge, de la reconnaissance plein les yeux. Dieu merci, la race des grands interprètes, les Montand, les Piaf, les Mouloudji, n'est pas éteinte. JeHaN s'avance sur la scène vivante de l'émotion et si le cœur est le muscle de l'amour, ah ! que voilà un bel athlète !"
Ces deux-là s'offrent donc un duo sur cette jolie version de Si tu me payes un verre, mélancolique ode au bistrot du coin et à ses rencontres.
Que voulez-vous, on a toujours eu un faible pour les bars du lundi soir: on s'y voit entre habitués.






vendredi 13 avril 2018

Usage judicieux de Maurice Chevalier dans une gendarmerie

Un homme de trop de Costa Gavras (1967)

Tiré d'un roman de Jean-Pierre Chabrol*, Un homme de trop est le deuxième film de Costa-Gavras qui, suite au succès de Compartiment tueurs, avait eu les coudées franches pour réaliser un authentique western cévenol avec un casting de luxe.
Voyez un peu la brochette... Par ordre d'apparition : Med Hondo, Jean-Claude Brialy, Patrick Préjean, Claude Brasseur, Jacques Perrin, Gérard Blain, Bruno Cremer, François Périer, Pierre Clémenti, Charles Vanel et Michel Piccoli.
Las, ce film trop particulier sur la résistance se révélera un échec commercial. Costa se rattrapera deux ans plus tard avec Z.
Là où ce réalisateur nous intéresse, c'est que dans ses six premiers films, c'est à dire jusqu'à Section spéciale (1975) il accorde une importance toute particulière et parfois franchement inhabituelle au son, que ce soit au niveau des bruitages ou de la musique.
En témoigne cette réjouissante séquence du saccage de la gendarmerie sur fond d'un Maurice Chevalier tonitruant qui donne à tous du cœur à l'ouvrage.
On dédie la séquence à tous ceux et celles qui ont trop subi les gendarmes, ces derniers temps.



Ce Galopin de Costa profite de l'occasion pour rappeler, au passage, qu'outre le Momo, Herbert von Karajan fit aussi une très belle carrière à l'ombre du troisième Reich.
La Chanson du maçon était sortie en 1941 (et youp la boum !) Elle était signée de Maurice Vandair, Maurice Chevalier et Henri Betti.




* Seul changement notable par rapport au roman : le personnage interprété par Piccoli n'y est plus un simplet de village criminel mais un pacifiste anarchiste.


mardi 10 avril 2018

René-Louis Lafforgue, poète anar





En 1936, l'abject général Mola donna l'ordre de fusiller tout opposant sur son territoire d'Aragon et de Navarre. Vivant à San Sebastian et affiliée à la CNT, la famille franco-espagnole de René-Louis Lafforgue, alors âgé de 8 ans, passe la frontière française comme des dizaine de milliers d'autres.
Tout gosse, il participe à un réseau de résistance pendant l'occupation durant laquelle un de ses frères est tué.
Dans l'après-guerre, il est boucher, charpentier, machiniste, puis acteur avec Charles Dullin et tourne avec le Mime Marceau.
Tâtant du cabaret et de la chanson il remporte le prix de Deauville en 1954 et sort son grand succès, la java Julie la rousse, en 1956. Contrairement à ce qu'ont affirmé certaines mauvaises langues, cette chanson n'a rien à voir avec l'ancien rédac' chef de Libé.


En 1962, il ouvre un cabaret "L'école buissonnière" rue de l'Arbalète. S'y produisent Pierre Louki, Bobby LapointeMaurice Fanon, Paul Préboist, Christine Sèvres, Léo Campion, Béatrice Arnac... Le lieu est aussi un rendez-vous de pacifistes et d'anarchistes.
Outre quatorze Eps chez Pathé-Marconi, il a joué dans seize films et trois séries télévisées. Ce libertaire aura raté mai 68 : il s'est tué dans un accident de la route sur un tournage le 3 juin 1967 du côté d'Albi. Il avait 39 ans.
Le voici à la télévision en juin 1957, pour un autre de ses succès populaires : Le poseur de rail. Avec une pensée pour les camarades en grève. 


 

Georges Brassens, présent dans cette séquence, disait de lui "Il a l'air de chanter avec un croûton de pain à portée de la main. Sa guitare est de très mauvais bois mais qu'est-ce que ça peut bien nous faire! Il chante. Il ne tend pas la patte. Il ne dit pas « À votre bon cœur Messieurs Dames ». Il choisit. Il n'est pas poète pour n'importe qui. Donne qui veut, donne qui peut."

vendredi 6 avril 2018

Un peu de tristesse



Le seul truc rigolo là-dedans, et pour l'instant, c'est qu'il prend plus de temps de radio que Johnny. Salut à toi.

La bataille duraille et la loco déraille. (Actualités)

Nous n'oublierons pas les jaunes (Yorkshire 1984)

Une petite histoire qui semble bien écrite en 1911* par le ménestrel des syndicalistes IWW Joe Hill (Joel Hägglund), fusillé à Salt Lake City (Utah) en 1915 suite à un procès truqué.
Ce travailleur, poète et chanteur n'ayant pas été enregistré, nombreux et nombreuses furent ceux qui reprirent ses chansons là où ses héritiers s'appellent Woody Guthrie ou Bob Dylan, entre autres.

Pete Seeger, figure du folk qui proteste, interprète ici ce détournement.
Chauffeur de locomotive, Casey Jones, fut tué dans un accident ferroviaire où, en évitant une plus grosse catastrophe, il fut considéré comme un héros national, sujet de ballades ou même de gospels.
Suite à un conflit entre cheminots et patrons des chemins de fer, les syndicalistes lassés de la  pieuse figure de l'ouvrier modèle, chantèrent une variante : Casey Jones, the Union scab (Casey Jones, le jaune).  
Refusant la grève, l'obstiné crétin finit par dérailler (à cause d'un sabotage ou de l'état lamentable du matériel ? Le doute demeure).
Arrivé au paradis, la bourrique se retrouve embauchée par Saint Pierre pour briser la grève des anges nouvellement syndiqués. Qui, indignés, le précipitent au bas de l'escalier céleste et le Diable se fait un plaisir de lui faire entretenir les chaudières infernales. "Voilà ce que tu as gagné à faire le jaune sur la SP Line..."



Bon, tirez-en les conclusions que vous voudrez, tout ça, est un prétexte à exhiber cette affiche qu'on peut trouver sur les murs de Toulouse et de quelques autres lieus.


* Précision de Serge : en septembre/octobre 1911, à San Pedro, où passait la Southern Pacific dont il est question dans la chanson, en pleine grève nationale
des cheminots. C'est une parodie, l'original du même nom date de 1909,
histoire d'un mécano qui se sacrifie pour son chauffeur dans un accident. Elle a été tirée en format carte à jouer et vendue en soutien aux grévistes de l'époque.

lundi 2 avril 2018

Émission d'avril : il ya 50 ans, le beau printemps

Le premier qui rira...

Bon, on a tâché  de fêter à notre manière, pas commémorer... le terme nous faisant gerber.
Sans avoir la moindre envie de rejouer la farce, nous rappelons à notre aimable auditoire que les rues de nos villes qui furent bitumées à la va-vite dans les années 70 sont désormais repavées.
À bons entendeurs...
On a refourgué

Malicorne                                      Intro
Évariste                                         La révolution
Polnareff                                        L'amour avec toi
Les Gottamou                                Le Monkiss de la police
CA du Théâtre de l'épée de bois   Ah, le joli mois de mai à Paris
Léo Ferré                                      Comme un fille
Suzane Gabriello                           Les flics de mon pays
Vanessa Hachloum                       Chanson du CMDO
Stella                                             L'idole des jaunes
Dominique Grange                        Grève illimitée
Thierry Freedom                           Monsieur le délégué
Gérard Manset                              Animal, on est mal
Les Barricadiers                           Elle n'est pas morte
Camizole                                       Charles de Gaulle
Philippe Clay                                Mes universités
Jean-Michel Caradec                    Mai 68   
Nougaro                                       Paris mai
intermède de l'usine Wonder 
Sheila                                           Petite fille de français moyen
Jean Sommer                                Vous êtes grands
intermède par Georges Séguy
José Molina                                  En esta plaza
Karel Kryl                                    Braticku zavrej vratko
Tako Kotiko                                 Oh, le joli mois de mai...

L'émission peut donc s'entendre ou s'archiver en cliquant là.
Les extraits lus sont de Plus vivants que jamais de Pierre Peuchmaurd (Libertalia) et de Les Années d'Annie Ernaux.
On vous met aussi la face B du 45 tour d'Évariste :  La faute à Nanterre



Si c'est Paris Match qui le dit....
Et du free jazz qui ne voulait pas sortir en direct : Red Noise (1971)

 


Ps : En ce qui concerne l'origine de la Chanson du CMDO, le camarade Joseph Ponthus nous signale ce lien illustrant le propos avec la version de Jacques Douai : http://www.artpoetique.fr/poemes/chanson_du_siege_de_la_rochelle.php

Et pour l'histoire, une petite chronologie subjective de mai / juin / juillet par le camarade Tomás Ibáñez.