dimanche 6 septembre 2020

Le massacre de Peterloo


Il fut un temps où les britanniques étaient les rois du néologisme.
Ainsi, la manifestation sanglante du 16 août 1819 à Manchester resta dans la  mémoire collective comme le massacre de Perterlo est une contraction entre le terrain de St Peter, où se tenait un rassemblement populaire, et la bataille de Waterloo avec ses fameuses charges de cavalerie qui avait eu lieu quatre ans auparavant.
En 1819, famine et chômage régnaient dans le pays. Les syndicats étaient assimilés à des sociétés secrètes et en être membre revenait à être puni de déportation en Australie. Les prolos du nord n'étant pas représentés au parlement, ils réclamaient une simple voix à la chambre. Tétanisé par la trouille d'une révolution, à la française, le gouvernement suspendit l'habeas corpus et les garanties individuelles.
Une "grande assemblée" fut donc convoquée par les radicaux Joseph Johnson et Joseph Hunt qui ne réclamaient, au fond, qu'une réforme parlementaire : "Dans les rues de Manchester et des villes alentour, la ruine et la famine nous crève les yeux, l'état de ce district est véritablement abominable et je crois que seul le plus grand effort pourrait prévenir une insurrection. Ô que vous à Londres y soyez préparés" (lettre de Johnson à Hunt interceptée par les flics de sa gracieuse majesté).
Ce 16 août, une vingtaine de cortèges issus des cités ouvrières entourant Manchester convergèrent sur la ville afin de tenir l'assemblée. Les soi-disant radicaux avaient donné des instructions strictes afin que la manifestation soit joyeuse et pacifique. Contrairement aux habitudes des rassemblements britanniques assez bordéliques et avinés, cette fois, la consigne était "propreté, sobriété, ordre et paix, ainsi qu'interdiction de toute arme". Les ouvriers de la région s'étaient même entraînés à défiler en bon ordre, ce qui ne fit qu'affoler un peu plus les autorités.
50 000 personnes étaient donc rassemblées sur ce pré, d'où avait été retiré la moindre pierre, pour écouter Hunt leur vendre le suffrage universel (masculin).
À peine le meeting entamé, il fut chargé par la milice locale, la yeomanry et un régiment de hussards à cheval qui, sans tirer le moindre coup de feu se contentèrent de sabrer et piétiner la foule. On releva 15 morts et pus de 500 amochés.
Hunt et ses réformateurs furent emprisonnés et le gouvernement passa la loi des "Six actes" qui interdisait tout rassemblement et restreignait encore plus les droits. Le Prince Régent, futur roi George IV, alla féliciter personnellement la milice. 
Entre cette tuerie et les révoltes luddites, l'ère industrielle anglaise commençait en fanfare.
L'histoire est encore vive dans la mémoire britannique. Il existe une Peterloo Overture écrite par le compositeur classique Malcolm Arnold. Les Oldham Tinkers la narrent ici à l'ancienne.


Les folkeux de Steeleye Span inclurent l'événement sur leur disque Bloody men. Voici Ned Ludd 5 (Peterloo day).



2 commentaires:

  1. Les Anglais continuent à être des champions du néologisme, et par exemple, ils parlent maintenant du "Brovid", combinaison du Brexit + Covid, comme aussi des "Covidiots", contraction de Covid + idiots.

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