C’étaient ces
temps froids et sauvages qui ont emporté mon frangin en moins de
temps qu’il n’en faut pour télécharger un film sur l’émule.
On a dispersé ses cendres à l’embouchure du Pagasarri et on a
observé les courants d’air les dégueuler au loin, même si je
reste persuadé qu’une partie a filé directos dans mon estomac.
Des fois, il me fait tellement mal que je n’ai plus le moindre
doute à ce sujet.
Ça aurait pu arriver n’importe comment, en s’envoyant un cocktail de pneumonie et de tuberculose avec de la poudre de ciment au lieu de la pâtissière, avec une fixette sortie d’une fosse septique ou shooté par le train de Plencia sans pouvoir virer son survêtement des rails. Mais c’est le virus qui l’a niqué. Bien avant que les virus ne se propagent par envois d’e-mails et n’aillent effacer les dossiers de ton disque dur. La Bête, comme on l’appelait. Après, on lui a donné d’autres noms : VIH, Sida, syndrome d’immunodéficience. Toujours cette vieille histoire de noms à la con qu’on donne à cette bonne vieille mort.
Ça aurait pu arriver n’importe comment, en s’envoyant un cocktail de pneumonie et de tuberculose avec de la poudre de ciment au lieu de la pâtissière, avec une fixette sortie d’une fosse septique ou shooté par le train de Plencia sans pouvoir virer son survêtement des rails. Mais c’est le virus qui l’a niqué. Bien avant que les virus ne se propagent par envois d’e-mails et n’aillent effacer les dossiers de ton disque dur. La Bête, comme on l’appelait. Après, on lui a donné d’autres noms : VIH, Sida, syndrome d’immunodéficience. Toujours cette vieille histoire de noms à la con qu’on donne à cette bonne vieille mort.
Il est entré chez
nous quand personne ne s’y attendait, comme ces casses-couilles de
Jéhovah qui viennent dans l’après-midi te brouter les burnes avec
la parole de Dieu. C’était avant que les téléphones ne perdent
leur cordon torsadé pour se retrouver à se balader dans les poches
des gens. Avant que Tata Wikipedia n’ait réponse à tout. Et ni
les marchandises étalées au marché, ni Informe Semanal, ni
Sa Majesté le Roi dans son discours de vœux de bonne année ne nous
ont expliqué pourquoi on devait crever si jeunes et si beaux.
C’est dans ces
eaux-là qu’on a monté le groupe. On n’avait aucune technique
musicale, mais on y mettait une furie qui effrayait les pires Rambos
du quartier. Rien à voir avec aujourd’hui où tout est devenu
pédanterie. Je me souviens de nos premiers accords : une bombe
de rage prête à exploser ! Une vitesse vertigineuse pour
traverser la vie. On a commencé dans la cave de la vieille à
Bataka. Son grand-père élevait des lapins là-dedans, mais les
voisins avaient porté le pet parce que ça schlinguait velu dans
l’entrée. Le syndic avait donc exigé que le vieux tue ses
bestiaux. Ce qui fut fait. On le croisait, errant sans but dans les
rues, morne, avec un air de lapin, jusqu’à ce que la prostate
l’emporte. À moins que ça n’ait été la myxomatose.
On a donc dû nettoyer la merde laissée par les grandes oreilles et en quelques semaines, on l’a remplacée par notre propre merde. (...)
On a donc dû nettoyer la merde laissée par les grandes oreilles et en quelques semaines, on l’a remplacée par notre propre merde. (...)
Pelukas passait au
local pour jouer de temps en temps. Il avait des paroles zengagées
et il voulait nous faire passer du côté du Émélénevé*
mais on lui riait au nez. On était des délinquants, rejetons de
travailleurs immigrés et on vivait dans des quartiers à
l’esthétique toute soviétique, dans des cubes aux murs épais
comme du papier à rouler. L’alcool, les humiliations, le pointage
au chômage, la reconversion industrielle, les aides sociales et de
la drepou dans les veines, voilà la réalité. L’été, on partait
en Estremadura où on nous appelait « les Basques »
et à Bilbao, nous n’étions que des Estrémègnes, bref, des
parias où qu’on aille. Vraiment rien à envier aux familles
déstructurées d’aujourd’hui.
Josu Arteaga Les Rats de Biscaye (2015)
Yeah, j'avais lu cette nouvelle à l'époque de l'hospitalisation d'Hafed Benotman, quand la tribu de ses aminches avait fait mailing list commune pour échanger... des nouvelles. Le traducteur est de vos amis ?
RépondreSupprimerOn peut l'affirmer, oui.
RépondreSupprimerEncore qu'il y a des jours...
J.