- Le voilà bien leur Front populaire, peste Dartmann en repoussant son assiette. Il faut le combattre bec et ongles.
- Oui mais comment ? Je demande. On va nous dire que le seul moyen efficace de combattre le fascisme, c'est l'armée unifiée.
- Mais ce n'est pas vrai ! proteste Dartmann. Les miliciens qui ont tenu au Jarama, c'était une armée unifiée ? Non. Les ouvriers qui ont combattu l'insurrection à Barcelone, c'était une armée régulière ? Non. Les unités internationales qui se sont formées au pied levé pour se lancer à l'assaut contre les fascistes au bout de deux semaines d'entraînement seulement, c'était...
- Tu sais que je connais tous ces arguments, Dartmann, et que je suis d'accord avec toi. Sur toute le ligne.
- Alors ?
- On peut disposer de tous les arguments irréfutables qu'on veut, mais si les gens ne veulent pas les entendre ? T'as pensé à ça un peu ?
- Et comment veux-tu convaincre les gens autrement que par des arguments ?
- Alors là, tu me poses une colle.
(...)
- On va perdre si ça continue comme ça, dit Dartmann en se donnant bonne contenance. Il faut être aveugle pour ne pas voir que ce qui fait notre force, c'est l'ouvrier armé qui décide de ses propres méthodes de combat avec ses compagnons de travail ou de quartier, l'ouvrier armé qui sait qu'il est vraiment maître de son destin, l'ouvrier qui n'a pas peur de se lancer au combat parce qu'il est partie prenante des initiatives de combat. Et justement, ces républicains bourgeois ne sont pas aveugles. Ils veulent freiner toutes les initiatives ouvrières, détruire tous les acquis de la révolution et ils vont se servir de cette armée prétendument populaire pour le faire. Et les amis les plus fidèles des républicains bourgeois, c'est qui ?
- Les communistes.
- Et moi donc, suis-je un ami fidèle des républic...
- Les staliniens, je veux dire.
- Exact. Les staliniens.
David M. Thomas Un plat de sang andalou
Pour paraphraser l'écrivain Isaac Rosa, encore un putain de roman sur la guerre d'Espagne. Mais ce premier volet d'une trilogie incomplète (le troisième tome n'est toujours pas édité) écrit en français par un prolo gallois rescapé de la grande grève de 1984, recèle d'agréables surprises. À commencer par le cadre d'Almería, généralement ignoré.
Tout parallèle avec une situation présente ne serait qu'abusif.
Faute de mieux, un extrait musical du très moyen film de Vicente Aranda, Libertarias (1996)
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