vendredi 17 avril 2015

On a chanté les voyous de papier


Le grand Franquin le proclamait haut et fort : il est bien plus enrichissant de créer  et dessiner des méchants plutôt que des héros positifs. À coup sûr, les truands les plus célèbres de l'histoire de la BD francophones sont restés les Pieds Nickelés, inventés par Louis Forton et apparus en 1908 dans l'Épatant. Mélange d'apaches et de baltringues, leur nom est passé dans la langue pour désigner des malfaiteurs à la mie de pain. 
Fallait s'y attendre, ces drôles quelque peu anarchisses, qui s'attaquaient surtout aux puissants (quitte à exproprier le Président ou à dîner chez la Reine) sont tombés dans le panneau de l'Union Sacrée en 14-18 et les planches de ces années sombres sont marquées par un racisme anti-boche d'autant plus étonnant que chez Forton, tout le monde en prend également pour son grade et que Ribouldingue est tout de même marié à une Africaine.   

La chanson a fini par s'attaquer au mythe.
En le prenant souvent tardivement et comme un résidu de culture populaire déjà momifié. Plus tôt, ça aurait certainement pas fait assez sérieux (la BD, c'est pour les chiards, quoi ! )
Une fantaisie d'Arthur H :







Le succès de Forton fut tel que ses personnages ont été repris par Perré et Badert en 1934, puis par Pellos, créateur de Bibi Fricotin à partir de 1948.
Depuis 2008, nos pignoufs, tombés dans le domaine public ont été repris par de nombreux auteurs.
Les Pieds Nickelés ont inspiré au moins trois films.





Plus curieux : une adaptation, d'après Forton, réalisée au thêatre San marco de Trente en décembre 2011.
Emilio Galante, flûte; Gianni Gebbia, sax alto; Tiziano Popoli, laptop, piano ;
Luca Bellemo Elisa Bertoldi Lucas Da Tos Denise Fondriest Isabella Magnanini Valentina Melchiori Martin Muscente Camelia Tapurica Marianna Weber, bruitages, voix.


Et puis, malgré la niaiserie réactionnaire du monde de Disney et ses stupides adaptations  par Chantal Goya, nos rockers d'OTH ont chanté l'autre bande de balourds américains, nettement moins truculents que les précédents, en 1986.


On reste quelque peu sur sa faim.
À quand Zorglub, Raspoutine (celui de Pratt ou de Sokal), Lady X, Angel Face ou Fu-Manchu servis par de vrais interprètes ?
Lecteurs, lectrices si vous avez des tuyaux, gi ! On prend !
Où sont les rengaines pour nos salauds d'enfance ?

15 commentaires:

  1. Pour Fu Manchu, on a celle-là, excellente :

    Enfant du Treizième,
    Dans son HLM
    Monsieur Ping écrivait des poèmes
    À mademoiselle Li,
    Qui était très jolie
    et qui le rendait ravi au lit.

    Monsieur Ping est tout heureux
    Monsieur Ping est tout joyeux
    En Chine, on rit quand on est...
    Très amoureux !

    Son voisin du d'ssous
    Monsieur Fu Man Chu
    De Monsieur Ping était très jaloux
    Car Mademoiselle Li
    Lui plaisait aussi
    et il voulait l'avoir dans son lit.

    Monsieur Ping et Fu Man Chu
    Ne sont pas amis du tout
    Ils se regardent de travers....
    De porc laqué !

    Un jour Fu Man Chu
    armé d'un bambou
    Décidé à faire un mauvais coup
    au fond du parking
    dit à Monsieur Ping
    "Toi manger pissenlit par racine".

    Monsieur Ping est dans les choux
    il a reçu plein de coups
    Pif ! Paf ! Pif ! Bang ! Houw !
    Fu Man Chu et un bandit
    il emmène mad'moiselle Li
    Cette histoire triste est finie...
    d'hirondelle !

    Allez, puisqu'en ce moment je suis dans les jeux, je vous laisse montrer votre érudition en nous révélant de qui c'est ! Par contre, à part 20 secondes sur Deezer, j'ai pas trouvé le son sur le net...

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  2. Facile, Wrob : c'est "Mr Ping", morceau de l'album Jour de fête d'Au bonheur des dames en 1988 (j'ai l'intégrale du groupe, si un jour t'as besoin…)

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  3. Je sais George, tu l'avais mis en ligne sur Lexo quand Divshare fonctionnait, c'était le bon temps ! c'est là que j'ai téléchargé l'album. Merci encore, mon fils est dingue de "Pouêt ! Pouêt !" (moi aussi je commence à devenir dingue à force de l'entendre 300 fois de suite quand ça le prend...), et il aime bien "M. Ping" aussi.

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  4. Les Pieds-Nickelés (B.Coquatrix-J.Valmy-M.Lanjean) / Les Frères Jacques - 1950

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  5. Merci Wrob, le Fu-Manchu m'avait échappé.
    Il a eu bien plus de popularité chez les roast-beefs ( avec The Kinks, par exemple)
    Quant à vous, estimé anonyme, z'êtes un précieux érudit.
    Merci le tuyau et pour la compile yougo de l'article précédent.
    Personne n'a rien sur Fantômas ?
    Jules

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  6. Fantômas ? Suffisait de demander. Mais il n'a là qu'un rôle secondaire, supplanté par un criminel bien plus redoutable (pour les gallinacés) !

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  7. Pas mieux, Wrob.
    Et j'avoue avoir moi aussi un faible particulier pour Pouê Pouêt !, au point d'itou pas me lasser de l'écouter en boucle (il a fallu que j'explique à ma propre petiote le fonctionnement d'une boîte de vitesse et la différence entre une Ami 6 et une Ferrari…)

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  8. Ah ! Enfin un initié ! Alors nous allons pouvoir exégéser ensemble George ! Je ne comprends pas la fin de la chanson, et j'ai des doutes sur son sens global :

    - à la fin, la voiture derrière la Ferrari finit par la doubler et son chauffeur déclare : "Mais dites-moi qu'est-ce que je pourrais faire, j'suis coincé en première !" Comment peut-il doubler la Ferrari étant coincé en première ? Ou alors c'est là le gag, la Ferrari est tellement lente que même une auto en première peut la doubler ? Mais alors pourquoi une telle lenteur ?

    - est-ce toujours la même voiture qui veut doubler ou y en a-t-il une différente à chaque couplet ? A un moment il y a un tracteur, mais peut-être est-ce une métaphore pour la même Ami 6 censée être un veau...

    Bref, si ces subtilités cabalistiques ne dérangent en rien la jeune pousse qui nous les impose ad libitum pour elle, nauseam pour nous à force, elles nous plongent vraiment, ma compagne et moi, dans des vertiges existentiels ! Si vous pouviez nous éclairer un peu...

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  9. Bon sang, Wrob, là vraiment tu me troues le plexus solaire !

    La chanson relève de l'absurde le plus total : au dernier couplet, ils sont à 260 km/h sur l'autoroute, et c'est là que le conducteur de l'Ami 6 version "Campeur" (c'est à l'évidence toujours la même voiture, que le chanteur qualifie tantôt de "tas de ferraille" et de "tracteur" — métaphores, en effet) gueule en doublant : "Mais dites-moi qu'est-ce que je pourrais faire, j'suis coincé en première !" (alors que le chauffeur de la Ferrari est, lui, en quatrième, évidemment).

    En première, sur n'importer quelle bagnole, tu ne dépasses pas 20 km/h maxi, sinon tu crames ton moteur…

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  10. D'ailleurs, à bien réécouter, c'est tout l'album qui est placé sous le signe du nonsense : prête attention aux paroles de "L'hôtel Sans-Souci", "Roulez bourrés" ou "Ta robe en taffetas", par exemple…

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  11. Ok, merci George ! Oui, nonsense partout, bien sûr. Mais tu as quand même répondu aux questions que je me posais sur celui-ci précisément. On a donc affaire à une Ami 6, toujours la même, qui dépasse les 260 km/h en première. Maintenant les termes du nonsense sont clairs ! Toutes ces chansons sont hilarantes et je savoure bien aussi celles que tu cites. J'aime bien "Je suis venu te dire que tu t'en vas" également. Ma copine moins, j'ai l'impression qu'elle la prend un peu pour elle...

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  12. Tant mieux si tel est le cas puisqu'il dit : "Tu comptais dans ma vie / Mais ma femme et mes enfants aussi" — donc elle n'aurait à s'en faire que si tu cultivais des relations extra-conjugales — ce qui n'est pas le cas, n'est-ce pas, en bon anarchiste,mmmh ?

    Dans cette chanson, un autre problème relatif à l'automobile.

    Au début, on entend :

    "[…] c'est toi qui t'en vas et je te paye le taxi."

    Mais juste après :

    "Oui c'est dur / Mais la voiture / J'en ai besoin, je te le jure ! / Allez, rends-moi les clés / T'es jeune, tu peux marcher…

    Soit incohérence, soit le mec devient de plus en plus infect au fil de la chanson (le plus probable, à mon sens).

    Un bon plagiat par anticipation du sujet de cette chanson ici, en adaptation ciné géniale.

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  13. Dites, les aminches vous voudriez pas monter une émission radio ensemble ?
    Du genre où on pourrait vous appeler pour gagner des binouzes.
    Comme ça on pourrait faire des duplex.
    Jules

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  14. Pas bête, Jules !

    On pourrait même appeler l'émission "D'entendre l'herbe"…

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