jeudi 18 mars 2021

La vocation de Marc Police

 

"Rockeur-agriculteur". Il paraît que, jeune adolescent, j’avais donné cette réponse à une conseillère d’orientation qui me demandait ce que je voulais faire plus tard. Personnellement, je n’en ai aucun souvenir. En revanche, je me souviens que ce souhait singulier m’a souvent été rappelé de façon peu charitable, voire carrément moqueuse. C’est embêtant de se faire charrier pour un événement qu’on a oublié. Je me suis même demandé s’il avait réellement eu lieu.
Une chose est sûre : il y avait bien des séances de sensibilisation à l’orientation professionnelle au collège. Dans un capharnaüm dantesque, la conseillère essayait en vain de nous projeter vers un futur qui nous semblait bien lointain. Et les pseudo-rebelles que nous étions ne manquaient pas de se lancer dans des déclarations intempestives. Toutefois, « rockeur-agriculteur », ça semblait sortir de nulle part. Dans les années 1980, les premiers étaient synonymes de "cool", les seconds de "plouc". À l’époque, je ne savais pas encore que le rock’n’roll étaient né chez les péquenots du sud des États-Unis. Il fallait donc chercher  ailleurs.
Et puis, ça m’est revenu. C’était dans le village de mon grand-père. Il y a quarante ans, la région entière était un océan de vignes, peuplé par ceux que les gens des montagnes tarnaises appelaient les Paybassols. Il y avait ce métayer, dont la famille avait traversé les Pyrénées, qui était affecté d’un bégaiement d’anthologie. Sa sœur disait qu’il était né de la rencontre d’un dialecte catalano-occitano-français et d’un instituteur sadique. Les conversations étaient souvent éprouvantes, et les parties de cartes frisaient le pagnolesque. Cependant, une fois par semaine, il enfilait un costume, coiffait une perruque, et montait sur scène pour s’asseoir derrière sa batterie et chanter dans son groupe qui tournait sur la côte. Évidemment, il le faisait sans bégayer, et cette transfiguration était incroyable.

 
Pour la petite histoire, le guitariste Marc Police, qui a œuvré au sein du groupe de rockabilly toulousain Jezebel Rock de 1979 à 1983, souffrait aussi de bégaiement. Ce qui ne l’a pas empêché de devenir un guitariste fort reconnu de la surf française. Puis il se fit sauter le caisson un jour de 1991. Il a joué essentiellement dans les Pasadenas et les Wampas.

Merci à l'ami Peponne pour sa vigilance sur les archives de Toulouse

Qui n'a rien à voir avec ce qui précède

Aujourd'hui, 18 mars, voici 150 ans que débutait la Commune de Paris et 100 ans qu'agonisait celle de Kronstadt. Mais, là-dessus, la gôche préfère cultiver une prudente amnésie.



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