mercredi 12 octobre 2016

Simone Bartel à la télévision (1960)



On aime un peu, beaucoup, passionnément, Simone Bartel, aussi est-ce une joie de relayer ce document mis en ligne par Dominique HMG.
C'était à l'émission "Discorama" du 1er juillet 1960, où elle chantait "Le bal de Meudon", paroles et musique de Claude Aubry. Pour l'occasion, elle était accompagnée de l'orchestre de Jacques Lasry.
HMG a inséré les paroles pour permettre aux internautes de suivre le propos de cette chanson qui, dixit Mac Orlan,
"Participe heureusement aux joies de la banlieue. En général, cette jeune chanteuse s'attache moins aux paysages de la rue française qu'aux paysages sentimentaux de la mélancolie. Elle sait obtenir de ce mot connu des confidences que l'amour protège plus qu'il ne détruit.

"Le bal de Meudon" est tiré du troisième 45 tours BAM de Simone Bartel, où figurent également "Comète" de Paul Villaz et une superbe "Porteuse d'eau" d'Anne Sylvestre.
Il est possible d'écouter tout ce disque sur le site consacré à la chanteuse :
http://simone.bartel.free.fr/streamer...

lundi 10 octobre 2016

Poème d'amour (Roque Dalton)

L'Humanité est un concept pour onanistes
Roque Dalton (Taberna y otros lugares. 1967)

Poème d'amour
Roque en 1963

Ceux qui ont agrandi le Canal de Panama
(À qui on a donné le "silver roll" et surtout pas le "gold roll")
Ceux qui ont réarmé la flotte du Pacifique
dans les arsenaux de Californie.
Ceux qui ont moisi dans les prisons du Guatemala,
du Mexique, du Honduras, du Nicaragua
comme voleurs, contrebandiers, escrocs,
crèves-la-faim.
("Je me permets de vous renvoyer le corps de cet individu
qui n'est qu'un vagabond suspect
aggravé du fait d'être un Salvadorien").
Celles qui ont peuplé les bars, les bordels
de tous les ports et capitales de la zone
("la Grotte bleue", "La Petite culotte" "Le Happyland")
Les semeurs de maïs en jungle étrangère,
les rois des faits divers,
ceux dont personne ne sait jamais d'où ils viennent,
les meilleurs artisans du monde,
criblés de balles en passant les frontières.
Qui sont mort de paludisme,
de piqûres de scorpions, de serpents,
dans l'enfer des bananeraies.
Ceux qui ont pleuré, ivres, à l'hymne national
sous les cyclones du Pacifique ou les neiges du Nord,
les abandonnés, les mendiants, les défoncés à la marijuana, 
les Guanacos*, fils de la Grande pute.
Ceux qui sont revenus de justesse.
Ceux qui ont eu un peu de chance.
Les éternels sans-papiers,
bons à tout faire, tout vendre, tout manger.
Les premiers à sortir la lame, 
les tristes les plus tristes du monde,
mes compatriotes,
mes frères.

Extrait du texte "La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens et la politique est la quintessence de l'économie" in Les histoires interdites du Petit Poucet.  
Traduction maison.

Quasiment inconnu en France, Roque Antonio Dalton** Garcia (1935-1975), poète et combattant, est l'objet d'un culte en Amérique Centrale. Il réunit la puissance du poète, l'éthique du révolutionnaire, le talent de l'humoriste, une solide réputation d'amoureux et une des morts les plus tragiques de la guerre civile salvadorienne. Ayant échappé par deux fois à la peine capitale (dont par une évasion due à un séisme), à une truie en fureur et à quelques maris jaloux, il finira fusillé par ses propres camarades le 10 mai 1975, dans la plus pure tradition des purges staliniennes. Il a été réhabilité par les mêmes quelques années plus tard. Lui qui "faisait rire les pierres" aurait certainement goûté l'ironie du sort !  


 
Cette chanson n'est pas l'hommage d'un groupe madrilène : Tio Manuel (Manuel Castillo) est l'ex guitariste des groupes parisiens Spoons, Wunderbach, Catch 22, les Outsiders et, occasionnellement la Souris Déglinguée.

* Les Salvadoriens sont "Guanacos", au même titre que les Guatémaltèques sont "Chapines" ou les Costa-ricains "Ticos".

** Il affirmait sans rire descendre d'un des frères Dalton. Bob, Grat, Bill et Emett formaient le gang Dalton, décimé à Cofeyville en 1892, qui servira de modèle à Morris.  

vendredi 7 octobre 2016

Édith on motorcycle

Édith Piaf à chanté maintes adaptations en français de chansons ayant déjà fait une belle carrière ailleurs. La plus fameuse restera sans doute "La foule", appropriation du traditionnel péruvien "Que nadie sepa mi sufrir" signé par Angel Cabral, en 1936.
Une version par Maria Dolores Pradera est visible en un simple clic.
On sait généralement moins que "L'homme à la moto" est, en fait, une reprise de Black Denim Trousers and Motorcycle Boots de Jerry Leiber et Mike Stoller,  prolifiques auteurs-compositeurs de dizaines de ballades, rhythm 'n blues, rock, qu'on avait évoqué déjà à propos des impayables Coasters.
L'original avait été enregistré en 1955 par The Cheers et était devenu le premier titre du duo placé au top ten (sixième place des ventes à l'automne 1955).
Cette chanson pour adolescents, très "cinématographique", comme il est d'usage chez Leiber & Stoller, narre les mésaventures d'un p'tit gars, motard de son état, "terreur de la Highway 101", qui néglige quelque peu sa petite amie, la loyale Mary-Lou. Évidemment le gars finit par prendre le train (dans la gueule) et les hommes du shériff ne retrouvent que ses sapes au milieu de la bouillie.
Ce titre, considéré comme la première chanson de bikers, a eu de nombreux interprètes et on ne résiste pas au plaisir de se l'envoyer par (roulements de tambour) Viiiiiiince Taylor ! Et vroum, donc !


 Jean Dréjac, auteur de l'immortel "Ah, le petit vin blanc!", s'est chargé d'une traduction assez fidèle à l'esprit de l'original pour la refiler à la Môme, qu'on n'imaginait pas vraiment s'embarquant du côté des gangs de motards. L'auteur confiera avoir été fasciné par le personnage de Brando dans L'équipée sauvage.
"L'Homme à la moto" fut chanté pour la première fois en 1956, ce qui fait d'Édith Piaf une candidate sérieuse au titre de "Alors, c'est qui a chanté le premier rock 'n roll en français?"
De Vince Taylor (la face A du 45 tour plus haut) à Nicoletta, de Brigitte Fontaine à Catherine Ribeiro, on ne compte plus les reprises de ce qui fut une des chansons les plus populaires de la Môme Piaf.
Qu'on retrouve ici, précisément le 5 août 1956, filmée à l'Olympia pour sa création du tube. 


Edith piaf - L'homme a la moto par tblogosphere

lundi 3 octobre 2016

Herbe tendre d'octobre : les fous chantés (et chantant aussi un peu...)

Titicut Follies de Frederic Wiseman (1967) pas encore à la mode
Bon ben, on s'excuse auprès de touzetoutes, un faux contact farceur a viré les trois premières minutes d'émission, c'est à dire le (pas si) nouveau générique suivi de nos commentaires. Dommage c'était le meilleur de la soirée.
Le reste, c'est pas mal d'inédits :
Alain Kan                           Les blouses blanches
Georgius                             Dorénavant
L'Empereur                        Ils finiront par m'enfermer
Brigitte Fontaine                La vache enragée
Roger Mason                      Le blues de la troisième guerre mondiale
Harry's                               C'est la voix
Énigme spéciale AA            Tutuguri, le rite du soleil noir
Jaafar                                  J'ai peur
F. Hadji Lazaro                   Serré trop fort
Alain Leprest                      Donne-moi de mes nouvelles
Collectif Astéreotypie         Air TGV
Les Colocs                          Dédé
Philippe Katrin                   Marine Le Pen
Brigitte Bardot                   C'est rigolo
Les Fatal Picards               Schyzophrène
Daniel Beretta &
Richard de Bordeaux         Psychose
Thierry Pastor                    Coup de folie

Adoncques ce reste est atteignable sur le site de la radio.
Bonne écoute !

Pour l'édification des foules, la version originale de la chanson de l'Empereur


Et la réponse immédiate de Joséphine XV :



Pour finir par le slow de l'année 1981

vendredi 30 septembre 2016

Brel et quelques suiveurs

Dans des chapitres précédents, nous avons vu à quel point Amsterdam de Brel a fait une belle carrière chez rockers et folkeux anglo-saxons (Bowie, Bailey, Van Ronk, etc.).
Un autre titre du grand Jacques connut et connaît encore un beau destin du côté des screamers et des crooners : Au suivant, écrit en 1964.
Est-ce dû au côté théâtralisé à outrance des paroles de la chanson? À une identification aisée à faire avec ce jeune homme de 20 ans, largué dans une situation incontrôlable ? Broyé qu'il se trouve entre l'institution militaire, misère sexuelle, sa solitude dans la foule et perte de pucelage, tous thèmes assez récurrents dans le rock ? À cette musique de faux tango saccadé assez facilement transposable ? Ou à un peu tout ça en même temps... ?
Pour se faire plaisir, un rappel de l'original.



Nick Cave, talentueux mégalomane (c'est pas très aimable mais qui a vu le film qui lui est consacré comprendra ce qualificatif), en fit une version tout à fait énervée sur scène. Tiens, il est moustachu ?


Où on constate que notre Australien a repompé les arrangements sur les petits gars de Glasgow du Sensational Alex Harvey Band. Mais il s'en cache tellement peu qu'on suppose que Sa Majesté Nick fait là un hommage non dissimulé.
Comparez, c'était en 1973 sur leur deuxième album justement titré "Next". 
Une superbe version du même morceau par des mêmes en live et en studio était déjà disponible à cette page.
On signale aux amateurs de l'écrivain Christopher Brookmyre (il en existe parmi cet honorable lectorat) qu'en s'y rendant,ils pourront aussi apercevoir la tête de Zak, je veux dire Zal Cleminson, le guitariste dont le maquillage inspira les masques des "malfaiteurs" du Petit bréviaire du braqueur.




mercredi 28 septembre 2016

Florelle, l'oubliée de la bande

Voici une artiste fort méconnue, marginalisée dans les mémoires de cette ribambelle de chanteuses et actrices de l'entre-deux guerres .
Ça avait pourtant bien commencé.
Elle est née Odette Rousseau (1898-1974) au sein d'une famille vendéenne montée à Paris.
Sa mère travaillait au café du bas-Montmartre La Cigale depuis 1909. C’est là qu’elle a débuté sur scène, dès l'âge de 13 ans. Elle y est notamment la partenaire d'un autre novice, Raimu, dans un sketch Le Marseillais et la Parigote. Après avoir travaillé dans divers établissements, elle part pour sa première tournée à l’étranger, en 1914, avec la troupe de L’Européen. C’est là qu’elle adopte le pseudonyme de Florelle (du nom d’un comédien de la troupe, Jean Flor). La tournée est évidemment interrompue début août à Vienne, en Autriche, par le déclenchement de la grande boucherie. Après guerre, elle est cooptée par Maurice Chevalier, avec qui elle tourne trois films au début des années 1920. Mais Florelle privilégie sa carrière au music-hall : en 1925, elle est doublure de Mistinguett, meneuse de la revue du Moulin Rouge, Ça, c’est Paris pour une tournée en Amérique du Sud.
Son plus gros succès: Fascination




Pendant la première moitié des années 1930, elle apparaît beaucoup au cinéma : la version française de l'Opéra de quat' sous, elle tourne de nouveau avec Pabst (L'Alantide), puis avec Robert Siodmak (Tumultes), Raymond Bernard (les Misérables), Fritz lang (Liliom) ou Jean Renoir dans l'inoubliable Crime de monsieur Lange (scénario de Prévert). 
La voici d'ailleurs dans le rôle de Valentine Cardès chantant "À la belle étoile" (de Prévert et Kosma) en 1936 :

 


En 1934, elle joue dans la comédie musicale Marie Galante de Jacques Deval, (musique de Kurt Weill) et enregistre plusieurs disques, plus ou moins liés aux films qu’elle tourne. Ils sont devenus à peu près introuvables.
Elle suspend ses activités artistique pendant l'Occupation et donne pas mal de coups de main à plusieurs personnes en situation illégale. Sa carrière en pâtira, oubliée par le public, le seul film notable où on la reconnaît après-guerre est Gervaise de René Clément. Elle se lance alors dans des affaires foireuses : un cinéma, des cafés... en Belgique, au Maroc, en Algérie et à Abidjan. Fait de la figuration épisodique à son retour en France, au milieu des années cinquante, avant d'ouvrir un dernier bistrot aux Sables-d'Olonne.
Elle retourne à Paris et meurt, ruinée, dans un hôpital psychiatrique où elle a été internée suite à un accident de circulation en 1974.
Une destinée marquée par la poisse qu'on croirait sortie d'une chanson réaliste.

dimanche 25 septembre 2016

Folie d'octobre

Le Concert dans l’œuf (Jérôme Bosch)
« Trouvez-vous une différence entre ceux qui, dans la caverne de Platon, regardent les ombres et les images des objets, ne désirant rien de plus et s’y plaisant à merveille, et le sage qui est sorti de la caverne et qui voit les choses comme elles sont ?" Érasme, Éloge de la folie (1509) 

Voulait-il dire par là que la différence entre un esprit sain et un esprit dérangé n'aurait pas l'épaisseur d'un papier à cigarettes ?
Depuis longtemps l'Herbe Tendre se prépare à aborder les rivages de la santé mentale. Crainte, magnifiée, exaltée, source de douleur ou de génie, ou des deux à la fois, la folie sera donc le thème de l'émission du 3 octobre 2016 à 18h sur radio Canal Sud.

Un Thiéfaine en plein dans le mille mais un peu trop long pour figurer décemment dans une émission d'une heure.