Voici une personnalité attachante et méconnue du monde des cabarets à l'époque dorée de la rive gauche.
Jacqueline Amélie Boissonet (1931-1981) est devenue Christine Sèvres dans sa jeunesse fugueuse pour ne point affecter sa famille, qui avait honte de ses envies de devenir actrice et chanteuse, ce qui ne se faisait point chez les jeunes filles normales de l'après-guerre, et en s'inspirant de la station de métro d'en face, reprenant sans le savoir (ou en le sachant, on n'y étais pas) la tradition des agents secrets de la France libre de l'époque londonienne.
Vu que le théâtre ne lui réussit guère et qu'elle doit se coltiner une gosse fruit du péché, elle fut vendeuse, mannequin, entraîneuse de cabaret, serveuse, portraitiste aux terrasses de cafés, dessinatrice industrielle, secrétaire d'écrivains, puis employée de bureau pendant la première moitié des années 1950.
En 1956, elle se lance plus sérieusement dans la chanson et la poésie en se produisant à l'Écluse, au Vieux Colombier, chez Milord l'Arsouille, à la Colombe, etc. C'est en 1956 qu'elle y croise l'homme de sa vie, un débutant nommé Jean Ferrat, qui lui offre quelques chansons et l'épouse en 1961.
Malgré l'ombre porté par Ferrat qui devient de plus en plus populaire sans être encore le chanteur officiel du parti, elle enregistre trois tires pour une compilation de cabaretiers en 1959 puis son premier 45 tours, en 1962: Les Nomades, d'une facture très classique pour l'époque mais avec un voix remarquée.
Malgré des premières parties de Brassens ou Barbara, elle demeure relativement discrète et la sortie de son album, Oscar et Irma, en 1968, plutôt inaperçue. Faut dire que sortir un album le 10 mai de cette année est un sacré coup de scoumoune qui ne peut conduire qu'à un four monumental !
On y trouve néanmoins une surprenante perle avec cette reprise de Brigitte Fontaine, Les dieux sont dingues.
Bloquée dans sa carrière, rendue amère par le succès de monsieur Sèvres, elle persiste un temps à l'Écluse avant de jeter l'éponge en 1972.
Elle suit néanmoins son moustachu avec sa fille dans sa résidence ardéchoise où elle devient peintre. Elle n'a regagné le studio d'enregistrement qu'en 1980 pour reprendre la Matinée, de 1969, un duo avec la vedette.
Bouffée par le crabe, elle meurt dans le Sud en 1981.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire