En juin 1978, le groupe fait son premier concert avec, dès le début, ce style rafraichissant qui caractérise les groupes punks (provocation que l'on retrouve notamment dans les textes de chansons tels " Patrick Henry est innocent " ou " Pétain, Darlan, c'était le bon temps ").
À partir de l'automne 1978, le groupe fait plusieurs concerts en Normandie et à Paris, notamment avec les Dogs et l'accueil du public comme celui des journalistes rock est excellent. En mars 1979, les Olivensteins sortent en autoproduction un premier (et unique) 45 tours 3 titres qui est produit par Lionel Hermani gérant du petit magasin de disque Mélodies Massacre et premier producteur des Dogs. Le disque est logiquement commercialisé par Mélodie Massacre, dont le vendeur est Eric Tandy, le frère ainé du chanteur et parolier du groupe.
Les 2000 exemplaires du 45 tours sont rapidement épuisés et les critiques de la presse rock sont enthousiastes. Patrice Blanc-Francard passe ainsi régulièrement le morceau " Euthanasie " pendant plusieurs mois au cours de son émission musicale Loup-Garou sur France Inter. Le succès du 45 tours permet au groupe d'enchaîner les concerts, et les Olivensteins rêvent cette fois de sortir un véritable album 33 tours. le label Barclay, qui vient de signer les Sex Pistols pour la France est très intéressé, mais l'opposition totale du Docteur Olievenstein à l'utilisation de son nom fait capoter le projet.
A ce coup dur s'ajoutent les pressions des RG et à nouveau du Docteur Olivenstein, qui fait annuler leur concert prévu en décembre 1979 au Palace en première partie de Stiff Little Fingers (Belfast). Frustrés par l'impossibilité d'enregistrer leur album tant espéré et peu en phase avec le nouveau public punk, composé de plus en plus par des nouveaux skinheads, le groupe décide de séparer après un ultime concert en janvier 1980 dans la salle St Croix des Pelletiers à Rouen.
Plus tard Gilles Tandy reforme un autre groupe dans la même veine et à la durée aussi éphémère : LES GLOIRES LOCALES. Ensuite il fonde les Rythmeurs qui sortent un disque chez New Rose Records et se séparent.
Gilles Tandy finira par entamer une carrière solo et publiera deux albums.
En 2011, paraît une anthologie du groupe, la première et unique...
Ci-dessous, une unique trace filmée par FR3 Normandie
Extrait d'interview
Vous vous définissiez punk à l’époque ?
Gilles Tandy : Oui, oui, dès le début. On va se couper
les cheveux, porter des badges… Mais ce n’était pas le grand guignol,
j’étais au lycée, je prenais plaisir à mettre une cravate sur un
tee-shirt, ce qui plaisait beaucoup aux profs…
Je suis retourné à Rouen fin 77. Là, il y avait une émulation liée à
l’activité de “Mélodies Massacre”, plein de disques sortaient sur des
labels indépendants, tous ces jeunes groupes jouaient vite et simple
avec une énergie pas possible… C’était vraiment excitant. Ça n’existait
pas en France…
J’étais déjà assez copain avec les Dogs qui sortaient leur premier 45
tours.
Je n’ai pas de définition du punk… C’est un truc qu’on a vécu…
Le côté attitude m’exaspérait déjà… Ma passion était davantage liée à
la musique qui déferlait à ce moment-là. Le punk parisien vu de ma
province, que ce soit à Rouen ou à Sète, je trouvais ça ridicule,
grotesque même. J’ai rencontré la plupart des acteurs de la scène
parisienne bien après, je me suis bien entendu avec certains d’entre
eux, mais pour nous, à l’époque ce n’était qu’une bande de poseurs… Je
pense que ça n’a pas beaucoup changé aujourd’hui…
On va former les Olivensteins vraiment par hasard. Éric écrivait des
textes derrière le comptoir du magasin. Il ne se doutait pas que ça
allait devenir des chansons. Moi j’aimais bien chanter. Avec Vincent,
qui officiait comme guitariste de “Section Spéciale”, on a décidé de
faire un groupe un peu sur un coup de tête. Mimi, le batteur des Dogs
partait à l’armée. Dominique nous a laissé un local de répétition à
disposition. On a démarré avec un texte, “Patrick Henri est innocent”.
C’est parti comme ça, un dimanche d’avril 78. On avait recruté des gens à
droite à gauche. En plus de Vincent, qui pour l’occasion, tiendra la
batterie, le guitariste lors de cette répète était le chanteur de
“Section Spéciale”, le bassiste n’avait jamais joué de basse, moi je
n’avais jamais vraiment chanté dans un micro… Il y avait aussi Dominique
des Dogs au saxo, et Hugues jouait de la guitare. C’est devenu sérieux
assez rapidement. 15 jours après, on peaufinait déjà la première
formation des Olivensteins. Au départ c’est un gag, mais très vite,
Vincent a pris la guitare, composé des morceaux, Éric a pondu des textes
à tire-larigot… On a trouvé un bassiste, un batteur…
En juin 78, un des membres du groupe avait trouvé un truc, dans une
fête de psys qui commémoraient les dix ans de Mai 68, sur les hauteurs
de Rouen. (On ignorait bien sûr que 39 ans plus tard, un tel évènement
serait purement et simplement prohibé, par un pouvoir revenu d’un autre
âge, pour qui la perception de “Pétain Darlan c’était le bon temps” ne
serait malheureusement pas du second degré). Là, on a débarqué, on a
vraiment foutu la zone… On est allé très loin. Chanter “Patrick Henri
est innocent”, avec le doigt pointé sur le ventre d’une femme enceinte…
C’est vrai que ce n’était pas très malin, mais il fallait aller dans la
provoc, on était là pour ça… Rires… Notre première prestation…
D’où le nom ?
Gilles Tandy : Non, le nom on l’avait déjà. On avait le
nom avant le groupe. Éric avait croisé Olivenstein dans un concert de
Johnny Thunder au Gibus. Le nom du groupe est né d’un retour
Paris-Rouen, par le premier train, de 5h30…
Ensuite répétitions, les premiers vrais concerts à partir de l’automne
1978. On a fait un concert au Gibus, on a joué devant cinq ou six
personnes, et on s’est retrouvé avec le matos sur le trottoir… Comme
beaucoup de gens au Gibus à l’époque… Fallait pas aller demander le
cachet… Rires…
On a fait pas mal de premières parties des Dogs, et on a joué au “Rose
Bonbon” en novembre 1978. Il y avait un concert en matinée, un en
soirée, 150 personnes en matinée, et à minuit un peu plus, mais si on
compte le nombre de gens qui disent nous avoir vus ces deux soirs-là, on
remplit Bercy. Juste après ces concerts, il y a l’article de Garnier
dans Rock & Folk. Ça fait parler mais ça ne fait pas décoller
grand-chose… En 1978, pour trouver des concerts… C’est encore la
préhistoire…
Quel était l’état de la scène ?
Gilles Tandy : Nous on a joué à Rouen, en banlieue du
Havre (en première partie des Damned), au Havre une fois, mais, étant
Rouennais et chantant en français, on y était plus ou moins triquards,
sinon, Caen et Paris. On n’a jamais joué ailleurs. La scène était
quasiment inexistante. Et il fallait voir les organisations… Les
sonorisateurs étaient la plupart d’anciens balloches qui ne comprenaient
rien à ce qu’on faisait, les sons étaient dégueulasses, les scènes
n’étaient pas vraiment des scènes, il y avait des trucs horribles…
Vous chantiez en Français, ce qui n’est pas très “tendance” ?
Gilles Tandy : Oui, mais il y avait quelque chose à
faire. La plupart des groupes punks chantaient en français à l’époque.
Asphalt Jungle, je ne sais pas s’ils chantaient en français ou en
anglais puisqu’on ne comprend absolument rien… Mais il y avait cette
envie de chanter en français… On ne pensait pas encore à la carrière
américaine… Rires…
On avait des paroles plutôt sociales. Ça pouvait être de la dérision,
mais elles étaient basées soit sur la vie de tous les jours, soit… Il
pouvait y avoir l’histoire, avec “Pétain Darlan, c’était le bon temps”…
Il faut voir aussi le contexte. En 1978, on se fait traiter de petits
cons par toute une génération de vieux schnocks et la réponse c’était :
“hé ho, il n’y a pas que nous qui avons fait des conneries !” C’était
très con, mais il y avait évidemment énormément de degrés derrière… Tout
le monde ne va pas comprendre. Là, on aura des problèmes, on a failli
se faire casser la gueule… Mais on n’était pas dépassés. Le tout étant
fait au dixième degré, on prenait ça au dixième degré. On parlait de
beaucoup de choses. Ça allait d’une ode à John Wayne, qui était un
morceau sur le côté affligeant des westerns spaghetti, à “Fier de ne
rien faire”, où là, il y avait un message, qui est toujours d’actualité…
Vous allez enregistrer votre premier disque très rapidement ?
Gilles Tandy : Oui, en mars 1979. Au départ, on voulait
tout faire dans la cave, mais Lionel Herrmani de Mélodies Massacre, le
producteur des Dogs nous a poussé à faire ça bien, il savait qu’il y
avait un potentiel énorme. Donc les trois titres ont été enregistrés et
mixés en huit heures. Le disque est sorti un mois après, le premier
tirage a été épuisé en trois semaines…
Tout marchait avec le bouche-à-oreille. Mais ça va
surtout fonctionner après la séparation du groupe. C’est dommage… Après,
Blanc-Francart va le passer tout l’été sur France Inter, Manœuvre fera
un truc dithyrambique dans Rock & Folk, mais c’est toujours dur de
trouver des concerts… On n’a pas de tourneur, on marche à la démerde, on
n’a pas de fric non plus. Ça va être un obstacle parce que tout le
monde est obligé d’aller bosser… Le disque est assez vite épuisé, et on
cherche une distribution pour le ressortir au format maxi 45 tours. 90%
des boîtes de disques cherchent le nouveau Téléphone. Comme toujours en
France, Téléphone marche bien, donc il faut faire du Téléphone, ils ne
comprendront rien, une fois de plus, à ce qu’il se passe. Barclay est
intéressé, et, au moment de signer, ils nous disent : ”il faudrait
peut-être voir avec le médecin, à cause du nom, on risque un procès,
bla-bla-bla, bla-bla-bla…” Donc voilà, c’était fini… Rires… Il va y
avoir toute une série de trucs négatifs qui vont faire que le groupe ne
va pas durer…
L’arrivée des R.G. au concert, c’est un truc qui va vraiment nous faire
chier. On n’a pas fait ça pour ça… L’arrivée des keupons à crête et à
la Valstar, au premier rang on n’a pas fait ça pour ça non plus… En
1979, on écoutait les Fall, les Mekons, les Swell Maps… Très vite, on a
commencé à déchanter. On devait faire la première partie de Stiff Little
Fingers au Palace, et le docteur Olivenstein passe un truc dans
France-Soir, comme quoi il est hors de question qu’un groupe se présente
au Palace sous son nom. Donc le concert est annulé, alors que ça aurait
été un tremplin pour nous.
Il y a comme ça, tout un enchaînement de désillusions, qui fait que le
groupe ne tient pas. On donne un dernier concert en janvier 1980. Après
le groupe se sépare.
Vous n’avez eu qu’une seule sortie discographique ?
Gilles Tandy : Voilà. Par la suite, la rondelle va coter
dans toutes les bourses de disques, ça m’a toujours fait un peu mal au
coeur. En 1984, il me restait une caisse de singles, et je les ai vendus
à 20 balles dédicacés, à des mômes, alors que les mecs en face le
vendaient déjà à 500 balles.
On avait de quoi faire un album.
Finalement, c’est peut-être très bien comme ça aussi… Rires… Le punk,
c’était, de toute façon, quelque chose de totalement éphémère.
Fier de ne rien faire :
Ce morceau, c’est Dominique qui l’a composé pour moi,
et, bien sûr, les paroles sont d’Éric. Il avait composé la musique, avec
les arpèges du début. Dans la mesure où je n’écrivais pas les chansons,
il fallait toujours se démerder à faire combiner les deux (paroles et
musique), voire les trois, puisque j’avais mon mot à dire quand même, et
je devais apprendre à poser ma voix. C’est un des tous premiers
morceaux…
Euthanasie, on ne devait pas le faire. Au départ, la chanson avait deux
couplets de plus, et on la jouait moins vite, vraiment lourdement, elle
durait cinq minutes. On trouvait ça chiant. Le jour de l’enregistrement,
on avait un peu de temps, et on s’est dit : “on va essayer de la faire
quand même en enlevant deux couplets.”
Négatif, c’était ce qu’on avait choisi pour faire la face B. On avait
déjà prévu de faire un 45 tours derrière, avec un morceau qui s’appelait
“je hais les fils de riches”, qui n’a jamais été enregistré.
Le rock Rouennais...J'ai un souvenir impérissable des DOGS en concert, j'ai rarement retrouvé une telle classe et une approche si particulière du Rock'n'roll...Le Lp "Walking Shadows" est incontournable.
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