Répétons-le encore une fois, on peut avoir été le dernier rempart du gaullisme en 1968 et avoir eu un talent incontestable. Et quelle ne fut pas notre surprise de découvrir ce grand dégingandé de Philippe Clay en "vedette américaine", enfin pas vraiment, mais plutôt dans une séquence de cabaret rien que pour lui dans un film américain de l'âge d'or, plus précisément dans Bell Book and Candle (L'adorable voisine, Richard Quine, 1958) film par ailleurs avec d'optique malgré la présence de Kim Novak, Charles Stewart ou Jack Lemon, excusez du peu...
Il y interprète Le Noyé assassiné chanson d'Aznavour et Florence Véran et si sa performance est louable, la spectatrice traduisant les paroles tout en faisant des commentaires sur le fait que ce pauvre Français est privé de vin et de femmes depuis dix ans tout en détestant l'eau est assez hilarante.
Cinquante ans après la disparition dans son lit de cette barbaque faisandée et sanguinaire, 20% des jeunes espagnols affirment ressentir de la nostalgie pour le régime de Francisco Franco.
Rappelons qu'à l'époque, ce même dictateur sut se débarrasser de ses phalangistes les plus excités en les envoyant jouer à la guerre européenne du côté de Leningrad dans la Division Azul* (División Española de Voluntarios).
Nous ne saurions trop conseiller à ces dynamiques jeunes gens d'assumer leur mélancolie en partant jouer à la guerre européenne du côté de l'Ukraine.
Et en plus, tu peux choisir ton camp, camarade !
* Ce qui était finalement bien moins risqué pour lui que d'aller s'emparer de Gibraltar, comme l'exigeait son créancier, Adolf H.
PS (OE) : Bien des questions que vous vous posez sur l'après, dite transaction démocratique, trouveront quelques réponses là.
On a souvent quelques chouettes surprises dans les rues de la perle d'Al Andaluz, la toujours superbe et néanmoins livrée au tourisme de masse, j'ai nommé Grenade.
Quel rapport avec notre John Mellor adoré ?
Déjà, il existe une placette Joe Strummer au bas du quartier du Realejo, en dessous de l'Alhambra. Elle fut inaugurée en grande pompes le 20 mai 2013. Il y avait ce jour-là sa veuve, Lucinda Garland, ses filles, Jazz et Lola, quelques vieilles connaissances, Marcia Farquhar, Esperanza Romero et Richard Dudanski, tous trois anciens du squat situé au 101 Walterton road, où naquirent The 101ers, premier groupe de pub rock sérieux de Strummer, le violoniste Tymon Dogg, Mick Jones de vous savez qui, des membres des Pogues (Joe fit une tournée avec eux) et un échantillon de la fine fleur du rock et flamenco grenadin (Quini Almendros, Curro Albayzin, José Antonio Lapido, José Antonio García, Lagartija Nick, etc.). Accompagnés d'une foule d'habitants venus faire la bringue au bout de la nuit.
Plutôt que d'aller faire le couillon à Almeriaou sur la Costa Brava, comme les Anglais moyens, notre agité de la Telecaster fréquentait déjà la cité dans les années 70 avec sa copine de l'époque, Palmolive, future batteuse des Slits.
Mais en 1984, ayant décidé de jeter l'éponge suite à une prolongation désastreuse de The Clash, Strummer s'établit à Grenade.
Quelque peu émotionnellement en vrac et s'inspirant sans doute de son éphémère carrière de fossoyeur, le grand projet de la légende ci-devant punk était de tenir une quincaillerie du côté de Víznar, bled situé à une dizaine de bornes de Grenade, où se trouveraient, les reste de Federico García Lorca, massacré par des phalangistes en 1936 en compagnie de plusieurs centaines d'autres.
Ladite quincaillerie n'aurait évidemment constitué qu'un camouflage destiné à mener à bien l'exhumation du poète.
Bien entendu, ce projet délirant resta à l'état de rêve et il en demeure une trace dans le documentaire de Carlos Prats, Quiero tener una ferretería en Andalucia.
Par contre notre Strummer farceur profita de son séjour, non seulement pour faire la tournée des bars de la ville mais surtout produire le second album du groupe de rock local 091 (numéro d'appel de police secours à l'époque) formé par José Ignacio Lapido, Tacho Gonzalez, José Antonio García (El Pito) et Antonio Arias, bassiste qui rejoindra ensuite le groupe Lagartija Nick.
Le titre qui donne son nom à l'album :
Enfin, inévitablement une très honorable reprise de Spanish bombs par les Mexicains de Tijuana No datant de 1998.
C'était pas mieux avant : en 1968, ils sortaient les armes de guerre
Le 25 mars 2023, lors d’une manifestation à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) contre les mégabassines, les forces de l’ordre ont blessé plus de 200 personnes – dont nous quatre gravement. Une plainte a été déposée par nous ou par nos proches, notamment pour tentative de meurtre et pour entrave à l’arrivée des secours.
Les experts que le procureur de la République a chargés d’enquêter sur les violences policières ont mis deux ans à rendre leurs conclusions, qui sont à la fois partiales et lacunaires. Selon eux, les forces de l’ordre auraient seulement répondu à la violence de certains manifestant-e-s. En fait, comme l’ont démontré force témoignages, images et enquêtes journalistiques, les 3 200 policiers « défendant » un trou de terre vide ont bombardé (de 5 010 grenades) sans sommation l’ensemble des manifestant-e-s.
Toujours selon ces experts, l’organisation des secours n’aurait pas entraîné une « perte de chance » pour les victimes… parce qu’elles ont été soignées sur place « de façon consciencieuse et irréprochable ». En fait, ce n’est pas la qualité de ces soins qui a été dénoncée, c’est l’interdiction faite aux ambulanciers d’accéder aux personnes blessées même quand il y a eu un retour au calme – interdiction que, là encore, divers témoignages confirment.
L’enquête indique que les soignants n’étaient pas autorisés à arriver seuls sur les lieux, et que des tirs « non réglementaires » ont été opérés par les forces de l’ordre. Mais de nombreuses zones d’ombre subsistent dans ses conclusions, en particulier concernant les ordres explicites d’effectuer ces tirs « non réglementaires » : quoique figurant dans le dossier, ils n’ont pas été traités. Enfin, si des « dysfonctionnements inexplicables » sont relevés dans l’organisation des secours (le PC pompiers ne répondait pas aux appels à l’aide, des motards de la police ont tardé à venir escorter des ambulanciers et les ont abandonnés en chemin, etc.), aucun avis n’est émis dessus. La manière dont a été conduite cette enquête laisse clairement apparaître l’intention de classer sans suite nos plaintes ; aussi demandons-nous la poursuite des investigations.
Loin d’être un événement ponctuel, le 25 mars 2023 à Sainte-Soline s’inscrit dans un processus visant depuis de nombreuses années à banaliser une répression toujours plus violente. L’objectif de l’État ce jour-là n’était pas d’empêcher les manifestant-e-s de parvenir sur le chantier de la mégabassine, mais de dissuader quiconque de manifester à nouveau contre de telles constructions – lesquelles ont depuis été jugées inutiles et illégales par les autorités compétentes. La mobilisation antibassines de Sainte-Soline a ainsi été pour l’État une occasion d’appliquer sa « doctrine du maintien de l’ordre », qui implique d’assimiler les mobilisations sociales à des attentats terroristes afin de déclencher officieusement un plan Orsec permettant leur répression par de véritables moyens militaires, mais ne prévoyant pas les moyens sanitaires à la hauteur de cette répression.
Le terrorisme, c’est ça : rendre une population passive face aux agissements d’un pouvoir devenu omnipotent. Nous avons aujourd’hui les preuves audio et vidéo de ce dont nous nous doutions : les actes qui ont causé tant de blessures et fait frôler la mort à nombre d’entre nous ne sont pas l’œuvre d’individus particulièrement violents, mais découlent de l’ordre donné par une institution. Et des actes semblables ont blessé et tué dans d’autres contextes (mouvements des Gilets jaunes ou contre la réforme des retraites, émeutes après la mort de Nahel…). Alors nous voulons faire peser sur cette institution le cadre juridique dont elle s’affranchit délibérément. Apporter un éclairage sur ce dossier ne suffira évidemment pas à le clôturer, mais cela nous aidera à trouver les réponses dont nous avons besoin et à affirmer un refus de se laisser tétaniser par la terreur.
Nous n’en continuerons pas moins de mener d’autres batailles pour une réelle justice sociale et environnementale.
MICKAËL, SERGE, ALIX, OLIVIER et des proches,
le 5 novembre 2025.
À la vision de la vidéo publiée par Médiapart / Libération, ce n'est pas tant la brutalité, somme toute raisonnée, comme écrit ci-dessus, de la garde mobile (corps qui, sous l'acronyme de GMR, connut ses heures de gloire sous l'Occupation dans la chasse aux maquis et réfractaires) mais c'est plutôt le niveau de jubilation et la misère du vocabulaire. Ce qui tend à confirmer qu'une bonne part des concernés ne sont que de mauvais voyous (les "bons", eux, assument leurs risques) se protégeant sous l'uniforme et que leurs expressions et leur "humour" ne sont autres que ceux de nervis fascistes.
Il était une fois quatre gars plus vraiment dans le vent qui décidèrent, malgré leurs multiples activités annexes, de combattre l'ennui et la médiocrité ambiante par tous les moyens à leur portée.
Ainsi naquirent les Smugglers (en français passeurs, contrebandiers) aimable combo de rythm'n blues à tendance punkisante voire rockabilly s'ils sont en forme. Passant d’une baladelibidineuse à un blues mexicain, d’un rock alcoolisé à un chant de voyou de la Belle époque, d‘un hymne aux guérilleros à un country folk en hommage à l’espoir nos lascars (Nick Zegrick à la basse, Champion Jack Thierry à la guitare, Mojo Guitou à l'harmonica et Julio V. au chant) se mirent donc à écumer irrégulièrement* les bistrots du midi toulousain, les bonnes causes à défendre ou un piquet de grève si on en trouve encore un qui tient.
Malgré les crins poussant dans dans leurs mains, nos lascars ont fini par laisser une trace en espérant que la postérité se montrera bonne fille.
Après tout, si Sixto Rodriguez est arrivé à réaliser un comme-back en Afrique du Sud**, qu'est ce qui les empêcherait de devenir cultes et reconnus en Albanie ou au Paraguay ?
En attendant cette future glorieuse tournée, on peut toujours les entendre en cliquant à cette adresse, sachant que tout téléchargement y est gratuit et fortement encouragé.
Afin d'illustrer le propos, voici leur première vidéo sur le tube : un hommage aux guérilleros anti-franquistes tout comme au groupe de Pampelune, Barricada.
Avec par ordre d'apparition (hélas, de disparition serait plus juste) sur les images... Bah, on vous le dira pas ce coup-là.
De l'aventure, de l'amour, de la fureur, de la dérision, donc.
Ça tombe bien, ils seront au Bistro Ducoin (40 rue du gal Compans, Toulouse) jeudi prochain, le 16 !
Ah ! Bien entendu les trois gugusses de l'affiche ne sont pas le groupe annoncé. Qui sont-ils donc ? Sachez juste que la photo fut prise aux États-Unis en 1977.
Et tant qu'on y est, quelque part entre Muddy Waters et Guy Debord, un classique
* Ça leur va si bien !
** Vu dans un documentaire que nous soupçonnons fort d'être bidonné ( Sugar man, de Malik Bendjelloul, 2013)
S'il est une maxime toujours vivace à Mexico, c'est bien "Nous n'oublierons pas le 2 octobre". Ce qui fait référence à "la nuit de Tlatelolco" ou la tuerie qui mit le point final à la rébellion de la jeunesse mexicaine en 1968.
Tout avait commencé là-bas au mois de juillet, le 22. Le feu aux poudres avait été allumé par des bagarres entre diverses bandes d'étudiants et des porros, gros bras chargés par le parti au pouvoir de faire le ménage des éléments contestataires à la matraque, tous ces jeunes gens ayant ensuite été brutalement dispersés par la police anti-émeute.
1968 était aussi l'année où le président Gustavo Díaz Ordaz s'était payé SES Jeux Olympiques qui débutaient le 12 octobre et était prêt à tout pour que ceux-ci soient la vitrine d'un pays triomphant (ça vous rappelle rien ?).
Rajoutons que ces années furent celles d'une expansion soudaine de la ville de Mexico et que les étudiantes et étudiants qui se répandaient dans les rues étaient petit à petit rejoints par des jeunes prolos et marginaux ravis de défier le pouvoir (ça vous rappelle rien ?).
Durant tout le mois d'août, les rues de la capitale, puis des autres villes du pays, furent envahies de manifestations contre la répression et un régime sclérosé soi-disant héritier de la Révolution de 1911-1920 (qui fut, en fin de compte, la confiscation du pouvoir par des propriétaires du Nord).
Le côté remarquable étant qu'aucun leader n'était apparu et que le seul organe menant ce combat était le Comité national de grève (CNH) formé d'un groupe de 250 représentants des écoles en excluant tout parti politique.
Bus incendié au cours des affrontements
Dès l'origine, ce mouvement, qui réclamait essentiellement un peu d'autonomie et de démocratie, la libération des prisonniers et la dissolution de corps répressifs (dont les sinistres granaderos) fut traité par l'État comme "tentative subversive téléguidée de l'étranger pour instaurer un régime communiste" et ses participants de "délinquants, terroristes et dangers sociaux" (ça vous rappelle toujours rien ?).
Ce qui fait que le niveau de répression fut particulièrement élevé, surtout dès la nuit tombée, le gouvernement n'hésitant pas à envoyer l'armée fédérale contrôler la rue.
Blindés sur la place du Zocalo
Les troubles ne faiblissant pas et la date des JO se rapprochant, l'État mit les bouchées doubles : fin septembre, la soldatesque s'empare de l'Université Autonome (UNAM) au sud et de l'Institut Polytechnique National (IPN) au nord de la ville, école fréquentée par des étudiants plus pauvres et qui donnera une nuit d'affrontements sanglants.Suite à cette répression, le CNH appela à un meeting géant près de l'IPN, sur la place dite "des trois cultures" (on y trouve un reste de pyramide aztèque, une église espagnole et des immeubles modernes et moches) plus connue comme place Tlatelolco (comme ça se prononce).
Le quartier étant cerné par les troupes fédérales, un groupe paramilitaire (le bataillon "Olympie") se chargea d'ouvrir le feu sur les soldats depuis toits et terrasses suite à un signal lancé par un hélicoptère, atteignant même le général commandant le dispositif.
La réponse fut immédiate : les fédéraux mitraillèrent copieusement la place, laissant environ plus de 300 cadavres (qui furent aussitôt escamotés), commirent plusieurs exécutions sommaires dans les appartements alentour, procédèrent à des arrestations massives (la plupart des prisonniers ayant atterri, au secret, au camp militaire n°1) et achevèrent ainsi violemment cette révolte de la jeunesse mexicaine.
L'État reconnut officiellement 4 morts et les JO s'ouvrirent en grandes pompes le 12.
Un procès monstre fut ensuite monté contre les prétendus "auteurs intellectuels" du mouvement (dont l'écrivain communiste dissident José Revueltas) et on envoya des centaines de gens moisir à la prison de Lecumberri avant une amnistie de 1971.
Il fallut attendre 1998 pour qu'une commission d'enquête soit mise en place (mais les archives avaient magiquement disparu) et 2002 pour que l'État reconnaisse un semblant de responsabilité.
Depuis les années 1980, ce massacre est commémoré chaque 2 octobre par des manifestations, généralement agitées, devenues le rendez-vous de la jeunesse (mais pas que) en colère.
Une des dernières séquelles de la tuerie fut la disparition des 45 étudiants de l'école normale d'Ayotzinapa (Guerrero) en 2014. Ces jeunes gens s'étaient emparés d'autobus pour se rendre à la manif du 2 à Mexico avant d'être interceptés à Iguala par des policiers, confiés à des narcos et disparus à côté d'un camp militaire.
À l'heure actuelle, on en est encore là...
À titre d'illustration musicale, le chanteur agitateur de rue José de Molina(ici d'après une VHS de 1995)dans En esta plaza. On vous laisse son long discours avant.
Et les rockers chilangos de La Maldita Vecindad commémorant eux aussi le 2 octobre.
La place Tlatelolco le 3 octobre au matin
Et suite à un commentaire, on rajoute les Salario Minimo (nom de groupe utopique)