mardi 28 novembre 2017

Pétulante Colette Magny

L'ami Grobubar a attiré notre attention sur cette séquence de la Radio Télévision Suisse (Romande).
Les Helvètes confédérés étant réputés pour leur art du camouflage, admirez au passage l'art de planquer le microphone, au cours de cet entretien où notre blues-woman très énervée fait preuve d'une gentillesse et d'une modestie sans faille.
Pour le reste, même si en 1972 le couscous semblait encore exotique et qu'on prêtait encore attention à l'opinion du parti communiste, le fond du problème n'a guère changé. 

 

Les curieux pourront retrouver les archives de la RTS à cette adresse.
C'est parfois surprenant. 

samedi 25 novembre 2017

Décembre, tout s'achète et tout se vend


De Barcelone à Madrid (note d'espoir œcuménique empruntée au Moine Bleu).
C'est à son bon cœur qu'on reconnaît le petit commerçant.
Frank & Golo, Ballade pour un voyou.

Le commerce est, par son essence satanique. C'est le prêté-rendu, c'est le prêt avec le sous-entendu : Rends-moi plus que je ne te donne.
Baudelaire, Mon coeur mis à nu.

Le commerce est vieux comme le monde. Du jour où plusieurs individus vivent sous le même voisinage, il s'établit entre eux des échanges. Que l'on nomme cela d'une façon ou d'une autre, peu importe, le fait est là. Les sociétés primitives subirent cette loi, la société des camps de concentration n'y échappa point.

Christian Bernadac, Des jours sans fin (Mauthausen III).

Pas besoin de vous faire un dessin après un tel préambule. Le mois de décembre, son Père Noël, sa grande bouffe, ses illuminations nocturnes nous a semblé le moment idéal pour revenir sur une activité humaine à laquelle la modernité est allée jusqu'à accoler le paradoxe "d'équitable" en certaines occasions.
On vous vendra donc notre temps d'antenne le lundi 4 décembre à 17h30 sur les 92.2fm de Radio Canal Sud.

Pour patienter, un monsieur 100 000 volts très en verve, à l'Olympia en 1970, en compagnie du violoniste monsieur Pointu nous fait l'article de la vente absurde.


mercredi 22 novembre 2017

Henri tachan, humble emmerdeur


Photo de DR
Né en 1939 à Moulins, Henri Tachan passe, dans sa jeunesse d'un pensionnant catholique (il en gardera une rancune certaine) à un boulot de serveur dans un grand hôtel.
C'est à Québec, en 1962, qu'il se met à déclamer des poèmes Chez Clairette, en sortant du turbin.
Rentré en France et passé à la chanson, il ouvre pour Juliette Gréco et enregistre son premier disque en 1965 (prix de l'académie Charles Cros). Puis il fera des premières parties d'Isabelle Aubret, Félix Leclerc, Pierre Perret et même Brassens à Bobino (1972)
Le tout en restant parfaitement méprisé par les médias.
Et en sortant la bagatelle de seize albums entre 1965 et 2007, dont deux en concert et un en catalan.
Fustigeant les français alors dit "moyens", les curetons, les patriotes et l'hypocrisie ambiante, cet emmerdeur n'était pas dénué d'humour.
La preuve, ce 45 tour de 1967 qui colle à merveille avec le prochain sujet de L'Herbe Tendre :



Ayant également tâté de la chanson scabreuse ou tendre, ses textes ont été édités en quatre volumes par les Éditions du square, illustrés par les dessinateurs de l'ancien Charlie Hebdo (Cabu, Gébé, Reiser, Willem, Wolinski)
Le gars a fait ses Adieux à la scène en 2011.
Détails, précisions et curiosités se trouvent sur un site qui lui est dédié.
Un autre titre, java moqueuse d'octobre 1970, On est tous des putes, chantée à Besançon pour l'enregistrement d'un dvd.





dimanche 19 novembre 2017

Pia Colombo au cinéma


Outre avoir été le populaire de Peyrac de la série historico-érotico primitive, Angélique ou Rémy dans l'excellent Du rififi chez les hommes de Jules Dassin, Robert Hossein a réalisé 13 films, à peu près tous anecdotiques, entre 1955 et 1986.
Le film dont il est le plus fier, Le vampire de Düsseldorf, a, à notre goût, pas très bien vieilli. Mais ce fait-divers, tiré des crimes du tueur Peter Kurten dans l'Allemagne des années 30, s'il est assez laborieux (surtout en la comparant à M le Maudit ou à l'Oeuf du Serpent pour ne citer que ces deux là) nous donne l'occasion de découvrir une chanson.
Elle apparaît lorsque Kurten tombe amoureux d'Ana, chanteuse de bouge qui causera sa perte.
Et c'est Pia Colombo qui double Marie-France Pisier, compagne du réalisateur, dans la scène du cabaret dont on voit un extrait dans cette bande-annonce:


La chanson avait été écrite par André Hossein, père du réalisateur, l'orchestre d'André Lafosse accompagnait le tout.
On peut en écouter l'enregistrement original en cliquant à ce lien.
On reviendra sur la cas de Pia Colombo, chanteuse et actrice aujourd'hui relativement négligée.
En attendant, retrouvons-là dans Un soir de mai de Maurice Fanon, enregistrée en 1965 lors d'un rare passage à la télévision:


jeudi 16 novembre 2017

Casseurs et terroristes (3) Yiddishland

Des teigneux du FPO (1943)
Actuelle capitale de la Lituanie, Vilnius (anciennement Wilno ou Vilna selon qui en cause) était un grand centre intellectuel du judaïsme d'Europe centrale. Au point d'être surnommée "la Jérusalem de Lituanie". La communauté juive, d'environ 55 000 membres, y représentait plus de 28% de la population totale.
Pris au piège du souvenir d'une occupation allemande assez "correcte" lors de la première guerre mondiale et des pogroms menés par la soldatesque russe, une bonne partie des dizaines de milliers de juifs ne cherchèrent pas à passer en URSS lorsqu'il en était encore temps. Épaulés par une police supplétive, une population au mieux indifférente et l'aimable collaboration du groupe Nord de la Wechmacht, les sinistres Einsatzgruppen menèrent la liquidation des deux ghettos de la ville entre juillet 1941 et septembre 1943.

FPO à la libération de Vilnius (1944)

Mais cette région balte est restée également fameuse par le nombre de ses maquis, réfugiés dans les proches forêts dont certains étaient exclusivement formés de partisans juifs, hommes et femmes.
C'est d'un de ces maquis ou du ghetto que sortit le chant Zog nit kejnmol (Ne dis jamais, en yiddish זאג ניט קיין מאל ) qui deviendra l'hymne des résistants juifs de Pologne jusqu'en Ukraine. La mélodie vient du chant soviétique Ce ne sont pas des nuages mais l'orage (То не тучи — грозовые облака) écrit par Dimitri Prokrass en 1935.
Selon les sources, la paternité des paroles annonçant le soulèvement est généralement attribuée au partisan et poète Hirsch Glick et parfois à Shmerke Katsherginski, résistant également membre du FPO (Fareynikte Partizaner Organizatsye, Organisation Unifiée des Partisans) première organisation de guérilla juive montée à Vilnius en 1942, alliance de jeunes sionistes de gauche, bundistes ou communistes préfigurant les futurs détachements de partisans de Lakhva, Varsovie, etc.
D'un refus du fatalisme à l'affirmation Nous sommes (et serons donc toujours) là ! ce chant est devenu un classique du florilège antinazi qui a éclot dans toute une Europe sous la botte.

 
Traduction :
Ne dis jamais que c’est ton denier chemin
Malgré les cieux de plomb qui cachent le bleu du jour
Car sonnera pour nous l’heure tant attendue
Nos pas feront retentir ce cri : nous sommes là
Le soleil illuminera notre présent
Les nuits noires disparaîtront avec l’ennemi
Et si le soleil devait tarder à l’horizon
Ce chant se transmettra comme un appel
Ce chant n’a pas été écrit avec un crayon mais avec du sang
Ce n’est pas le chant d’un oiseau en liberté :
Un peuple entouré de murs qui s’écroulent
l’a chanté, nagan* à la main
Du vert pays des palmiers jusqu’au pays des neiges blanches
Nous arrivons avec nos souffrances et nos douleurs
Et là où est tombée la plus petite goutte de sang
Jaillira notre héroïsme et notre courage
C’est pourquoi ne dis jamais que c’est ton dernier chemin
Malgré les cieux de plomb qui cachent le bleu du jour
Car sonnera pour nous l’heure tant attendue
Nos pas feront retentir ce cri : nous sommes là

Une version contemporaine par le groupe Cartouche, pas les Belges, non, les keupons de la bande à Géraldine


* Le nagan(t) est un revolver russe calibre 7.62 mm.

lundi 13 novembre 2017

Adriano yaourte

Un petit clin d’œil à une bonne idée de rubrique d'un blog ami.
Au sein de la légion des chansons dont on ne comprend pas les paroles, un monument nous est venu d'Italie. Capable du meilleur comme du pire, l’inénarrable Adriano Celentano va jusqu'à revendiquer son charabia sur un 45 tour de fin 1972 au titre psychédélique : (on retient son souffle) Prisencolinensinainciusol. 
Point de prise de son ou de mixage pourri nous empêchant ici de comprendre le message, l'incompréhension EST le message. La chanson, est une ode au yaourt, un volapük destiné à se moquer des Italiens et autres latins qui s'essayent à la langue de Shakespeare et de Gene Vincent. 
L'auteur le confesse : "je pensais que je pourrais écrire une chanson qui n'aura que pour thème l'incapacité de communiquer. Pour ce faire, j'ai dû écrire une chanson où les paroles ne signifient rien".
Parti pour faire un beau bide dans son pays natal, le morceau cartonne en France et, auréolé de cette voisine popularité, il rejoint les hit parades transalpins dans les deux ans. 
Personnellement, il me revient une bande de gosses qui s'essayaient à la chanter et, malgré un bel enthousiasme, c'était pas bien beau à entendre.
Un mélange de deux passages du loustic à la RAI en 1974 :


vendredi 10 novembre 2017

Anthony Perkins

Où l'on constatera que l'acteur américain Anthony Perkins, immortel Norman Bates* de Psychose, (1932-1992) avait non seulement un joli timbre de crooner (il a enregistré plusieurs albums de standard de jazz) mais qu'il en usait avec bonheur pour chanter en français
Et que Gainsbourg est loin d'être le premier à avoir pillé la symphonie N°3 de Brahms.
Faut dire que cette chanson sentimentale, écrite par Françoise Sagan, était extraite du film Aimez-vous Brahms ? d'Anatole Litvak (1961) adaptation du roman de la même Sagan dans lequel on retrouvait le bel Anthony doublé en français par l'élégant Jean-Claude Brialy (en écoutant l'acteur, on s'étonne qu'il ait fallu lui donner une autre voix). La chanson du film était originellement interprétée par Diahann Caroll mais tant Yves Montand, jouant également un rôle dans le film, que Perkins l'enregistrèrent en français.
La bluette est extraite du EP quatre titres Anthony Perkins chante en français  (1962, Pathé-Marconi 45 EG 591)

 

* Rôle qui a autant fait pour sa renommée que bousillé sa carrière en le cantonnant dans ce genre de personnage. 

mardi 7 novembre 2017

Famille je vous chante (HT novembre)

Patriotisme ?
Notre petite tribu vous a donc proposé ce lundi 6 novembre

Les Malpolis                    Une famille d'amour
Négresses Vertes             Famille heureuse
Harry Fragson                 Les amis de monsieur
Fernandel                         Quelle famille !
Rue de la Muette              Ma mère traîne au café
Odette Laure                    Ça tourne pas rond dans ma p'tite tête
De chez l'Ogre                  Liens
Sacha Distel                     Scandale dans la famille
Nicole Louvier                  Philistins
Moustaki                          Maman, papa
Shuriken                          Lettre
Frères Jacques                 L'entrecôte
Chez là                             La famille
Robine & Pierron            Grand-mère gâtiau
F. Béranger                      Ma grand-mère
M. Morelli                        Chanson rhénane
113                                   Tonton du bled
Anne Sylvestre                 Famille pour famille
Noir Désir                        Ces gens là
Marcel & son orchestre   La famille Ingalls
Oxmo Puccino                  Mama lova
Keith Kouna                     Bonsoir shérif

Avec un gros merci à l'ami François pour la dernière.
Cette émission est à retrouver en cliquant à l'endroit habituel.
Le capitaine ACAB nous a par ailleurs communiqué quelques suppléments, dont un grand séducteur toulousain :



Et une chanson tragique d'Agnès Bhil illustrant l'aspect le plus noir de l'institution familiale.


samedi 4 novembre 2017

Extraballe. Ça aurait pu...




Imaginez un fier jeune homme, Jean-Robert Jovenet, qui, outre une ressemblance certaine avec Iggy, possédait le phrasé de Lou Reed et écrivait des textes ironiques et facile à retenir. Rajoutez que notre gaillard fit brièvement ses classes chez les Dogs, en 1975, puis monta Compartiment tueurs avec Jean-Louis Aubert et Richard Kolinka (ceux-là même qui..) traîna dans Asphalt Jungle, puis chez Gasoline.
Ou bien ce gars était le roi des insupportables, ou bien on peut lui attribuer la palme d'or de la déveine, parce que le groupe avec lequel il a finalement fait sa brève carrière Extraballe, est généralement parfaitement oublié, excepté de quelques résidus de l'époque. Trois albums sortis entre 1979 et 1981 dans une indifférence polie. À cause d'un nom à la con ? Et Téléphone, alors ? Ça a empêché les ci-dessus cités de faire carrière, peut-être ?
Non, fort représentatifs des scoumounards de leurs temps, les petits gars ont eu à subir des producteurs ineptes, des labels méprisants et une musique qui aurait pu cartonner mais était peut-être trop à la croisée du punk, new-wave, cold... Trop indéfinis. "Novö" claironnait un artificiel concept, à coup sûr conçu par des apprentis publicitaires.
Et pourtant, à réentendre ce Je travaille à la mine, on comprend pourquoi certains prolos chantonnaient ...à chacun son héroïne, d'un air narquois.
Ça a plutôt moins mal vieilli que bien d'autres.


 

À vrai dire, c'est surtout leur premier album qui restera un coup de maître. Et puis, malgré une poésie assez légère, peu osaient faire allusions à un des plus beaux crimes de l'aviation alliée lors de la deuxième guerre mondiale. Good night Dresden est sur le premier album de 1979. Guitare : Lolita Carabine (également Bulldozer), basse : Murray Ward et batterie : Michel Peyronel.
Peut-être était-ce un poil trop gonflé pour faire guincher en boîte. D'autres l'ont fait peu après avec un tube portant le nom d'un bombardier atomique. 


 
Une fois le groupe séparé, Jean-Robert Jovenet prendra divers pseudonymes et jouera un temps dans les Go-Go Pigalles. Il tournera en Irlande avec le batteur Fuzz Townshend pour un duo plus anecdotique : Interfaith.
Son décès, en 2011, lui a valu un paragraphe dans Rock & Folk.

mercredi 1 novembre 2017

Jazz macabre

Grand introducteur du jazz en France dans les années 1920, Ray Ventura fut, en compagnie de Loulou Gasté et Paul Misraki, le rigolo de service multipliant les chansons à sketches avec son orchestre, "Les collégiens".
Henri Salvador, Sacha Distel, Philippe Lemaire ou Jacques Hélian feront leurs premières armes au sein de ce big-band qui sévira jusqu'aux années 60.
Mais à l'occasion premier novembre, ressortons des tiroirs une adaptation de la Danse macabre de Camille Saint-Saëns (1874) originellement faite pour être accompagnée de paroles d'Henri Cazalis. Même cet air funèbre prend là une gueule joyeusement sautillante.